FICHE QUESTION
10ème législature
Question N° : 31522  de  M.   Derosier Bernard ( Socialiste - Nord ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  06/11/1995  page :  4633
Réponse publiée au JO le :  22/01/1996  page :  395
Date de signalisat° :  15/01/1996
Rubrique :  Systeme penitentiaire
Tête d'analyse :  Detenus
Analyse :  Malades incurables
Texte de la QUESTION : M. Bernard Derosier attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'incarceration des malades atteints d'une maladie en phase terminale. L'emprisonnement, meme pour une duree relativement courte, peut provoquer une degradation de la sante d'un detenu, d'autant plus grave que celui-ci souffre d'une maladie incurable. De facon generale, l'incarceration ou le maintien en detention de malades souffrant soit du sida, soit d'une hepatite C, soit encore de tuberculose au stade terminal, pose un probleme humain auquel l'institution penitentiaire n'est pas en mesure de repondre. Aussi lui demande-t-il les mesures qu'il compte prendre afin de remedier a cette situation.
Texte de la REPONSE : Le probleme souleve par l'honorable parlementaire constitue un sujet constant de preoccupation pour l'institution penitentiaire. Pour y remedier elle beneficie d'une organisation medicale totalement transformee et d'un dispositif reglementaire oriente vers l'individualisation de la peine. Concernant en particulier le VIH (virus de l'immuno-deficience humaine), les derniers resultats de l'enquete regulierement conduite depuis 1988 confirment la tendance observee depuis 1991 d'une diminution de la proportion des detenus atteints par ce virus. En effet, en juin 1995, sur 57 117 personnes incarcerees en France, 1 330 sont atteintes par le VIH - a la connaissance des services medicaux penitentiaires - soit 2,3 p. 100 de la population penale. Les pourcentages etaient de 2,8 p. 100 en 1994 et de 5,8 p. 100 en 1990. En 1995, 156 detenus, soit 12 p. 100 en etaient au stade de sida declare. Cette proportion, en augmentation reguliere depuis 1988, est pour la premiere fois en diminution, et represente 0,27 p. 100 de la population penale. C'est la loi no 94-43 du 18 janvier 1994 qui a transfere la prise en charge sanitaire des detenus du service public penitentiaire au service public hospitalier, conformement aux dispositions de l'article L. 711-3 du code de la sante publique. Une augmentation significative de moyens correlative a ce transfert de responsabilite va permettre d'assurer aux detenus une qualite et une continuite de soins equivalents a ceux offerts a l'ensemble de la population, par la mise en service des unites de consultations et de soins ambulatoires (UCSA). Ce sont desormais des equipes hospitalieres qui interviennent en milieu penitentiaire. Ce dispositif facilite le recours a l'hospitalisation du detenu lorsque son etat de sante n'est plus compatible avec les soins assures au sein de l'etablissement penitentiaire - comme le prevoit l'article D. 382 du code de procedure penale. Il est alors transfere soit dans l'etablissement public de sante national de Fresnes, soit, comme le prevoit la loi de 1994, dans un etablissement public hospitalier du droit commun. En 1994, sur les 221 detenus malades du sida, 56 ont ete hospitalises. En 1995, sur les 156 malades, 64 ont ete hospitalises. Dans le cadre des soins, des 1989, les etablissements les plus concernes par l'infection par le VIH (regions de Paris et de Marseille) ont ete incites a passer des conventions avec les centres d'information et de soins de l'immunodefience humaine (CISIH), services hospitaliers specialises dans les soins aux personnes atteintes par le VIH. Actuellement 27 CISIH interviennent en milieu penitentiaire. En matiere de prevention, depuis 1993 le recours au CDAG (centre de depistage anonyme et gratuit) permet de proposer un depistage aux detenus qui le souhaitent. De nombreux services medicaux organisent des tests contre l'hepatite C - non obligatoires, a la difference de la tuberculose - et pris en charge par les conseils generaux. Le dispositif de droit existant permet de prendre en consideration avec une particuliere attention le cas du detenu atteint d'une maladie incurable : le procureur de la Republique peut surseoir a la mise a execution d'une peine en consideration de la situation particuliere du condamne sur le plan medical ; l'article D. 375 du code de procedure penale dispose que « si le medecin estime que la sante physique ou mentale du detenu risque d'etre affectee par la prolongation de la detention il en avise par ecrit le chef d'etablissement qui en informe aussitot l'autorite judiciaire competente ». Ainsi, le juge d'instruction peut decider, en fonction de l'etat de sante du prevenu, sa mise en liberte provisoire, sous controle judiciaire, avec obligation de soins (art. 138-10 du code de la procedure penale) ; lorsqu'une peine de prison a ete mise a execution, le juge de l'application des peines est competent pour statuer sur l'amenagement de la peine du condamne (art. 722 du code de procedure penale). Il peut decider : 1/ d'un placement en semi-liberte en cours de peine ou des le debut de la peine (art. 132-25 du code penal) au vu de la « necessite de subir un traitement medical ». Il determine dans ce cadre le regime approprie de rattachement du detenu au centre de semi-liberte (art. 132-26) ; 2/ d'un placement en chantier exterieur : l'article D. 131 du CPP l'envisage lorsqu'un traitement medical est prescrit ; 3/ de la liberation conditionnelle lorsque la peine est inferieure a cinq ans, et la proposition de liberation aupres du ministre de la justice dans le cas ou la peine est superieure a cinq ans, liberation assortie de l'obligation de suivre le traitement medical ; 4/ de la suspension ou du fractionnement de l'execution de la peine correctionnelle qui peut etre decide par le juge de l'application des peines, ainsi que par la juridiction du jugement, pour « motif grave d'ordre medical » (art. 720-1 du CPP). En outre, lorsque les conditions liees au reliquat de peine a subir, ou a la nature de la condamnation ne permettent pas d'envisager un amenagement de la mesure privative de liberte, le condamne peut solliciter une mesure de grace aupres du President de la Republique. Ces demandes peuvent etre traitees en urgence et ont recu, notamment en 1994, une reponse frequemment positive, lorsqu'il etait etabli que le pronostic vital de l'interesse etait en jeu.
SOC 10 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O