FICHE QUESTION
10ème législature
Question N° : 42306  de  M.   Blanc Jacques ( Union pour la démocratie française et du Centre - Lozère ) QE
Ministère interrogé :  fonction publique, réforme de l'état et décentralisation
Ministère attributaire :  fonction publique, réforme de l'état et décentralisation
Question publiée au JO le :  19/08/1996  page :  4485
Réponse publiée au JO le :  14/04/1997  page :  1917
Date de signalisat° :  07/04/1997
Rubrique :  Juridictions administratives
Tête d'analyse :  Tribunaux administratifs
Analyse :  Presidents. saisine pour avis par les executifs locaux. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Jacques Blanc attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la reforme de l'Etat et de la decentralisation sur la possibilite qui pourrait etre offerte aux executifs departementaux et regionaux de saisir les presidents de tribunaux administratifs. Il apparait, en effet, que depuis la decentralisation, ces elus ont vu le champ de leurs responsabilites s'elargir et devenir de plus en plus difficile en raison de la complexite croissante de la legislation, alors que la decentralisation juridictionnelle parait la grande absente des lois de decentralisation. Il serait ainsi judicieux de permettre cette saisine des presidents de tribunal administratif, d'une part pour avis sur toute question de droit relevant du cadre specifique de la decentralisation grace a une modification des articles R. 242 et suivants du code des tribunaux administratifs et, d'autre part, aux fins d'eclaircissements sur les modalites d'execution des decisions de justice, compte tenu des dispositions de la loi no 95-125 du 8 fevrier 1995 et, par une modification de l'article 58 du decret du 30 juillet 1963 portant elargissement de la voie ouverte aux ministres ou par l'adoption d'une mesure reglementaire identique specifique permettant auxdits executifs de solliciter la juridiction administrative locale sur les problemes d'execution de decisions intervenues dans le cadre specifique de la decentralisation. C'est pourquoi il lui demande quelles dispositions pourraient etre prises a ce propos, au moment ou s'engage la reforme de l'Etat.
Texte de la REPONSE : La question soulevee porte sur l'extension des conditions de saisine de la juridiction administrative, a titre consultatif, en faveur des elus locaux, en vue de leur permettre de formuler des demandes d'avis sur un double plan : en amont de la procedure contentieuse, sur toute question de droit relative a la decentralisation et, en aval, sur les modalites d'execution des decisions de justice intervenues dans ce domaine. L'elargissement du champ d'application de l'article R. 242 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel relatif a la mise en oeuvre d'une procedure consultative reservee a la seule competence des prefets (les representants des collectivites decentralisees ne pouvant recourir a cette assistance que par le canal des prefets) n'apparait pas, tant pour des considerations de fait que de droit, opportun. Les reformes successives intervenues en matiere d'organisation juridictionnelle, dont en dernier lieu la loi du 8 fevrier 1995, ont eu pour objet de remedier a l'encombrement persistant de la juridiction administrative et d'accelerer correlativement le cours de la justice. Or, l'extension des cas de saisine serait incontestablement de nature a accroitre le stock d'affaires pendantes devant la juridiction administrative, deja condamnee a diverses reprises par les instances juridictionnelles europeennes en raison de la meconnaissance du « delai raisonnable » de jugement prevu par l'article 6-1 de la convention europeenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertes fondamentales (en ce sens, notamment : CEDH, 24 octobre 1989, H. c/France ; 31 mars 1992, X. c/France). La generalisation de la procedure consultative, relativement peu utilisee actuellement (environ une demande par mois et par tribunal en moyenne) serait en outre susceptible d'alterer l'image d'impartialite du juge, qui, appele a se prononcer au contentieux sur une affaire prealablement soumise a son avis, pourrait etre considere comme « juge et partie ». Les tribunaux sont d'ailleurs tres reticents a cet egard. Au surplus, l'evolution de la jurisprudence europeenne tend a proscrire le « dedoublement fonctionnel » de juge administratif, dont les attributions administratives sont considerees comme un demembrement du pouvoir executif, incompatible avec le principe de separation des autorites administratives et juridictionnelles. Ainsi, la Cour europeenne des droits de l'homme a recemment condamne le Luxembourg, pour violation de l'article 6-1 precite enoncant l'exigence d'un « tribunal independant et impartial », en raison de la dualite fonctionnelle du Conseil d'Etat dans ce pays : double mission consultative et juridictionnelle (affaire Procola). Pour eviter de meme l'accroissement des instances, source de lenteur, au sein de la juridiction administrative, il ne semble pas opportun de modifier l'article 58 du decret du 30 juillet 1963 reservant aux ministres la faculte de saisir le Conseil d'Etat aux fins d'obtenir des eclaircissements sur les modalites d'execution d'une decision de justice. En revanche, la loi du 8 fevrier 1995 relative a l'organisation des juridictions et a la procedure civile, penale et administrative comporte, en son titre IV, une serie de dispositions novatrices destinees a garantir une meilleure execution de la chose jugee : possibilite de demander a la juridiction administrative de prescrire des mesures d'execution d'un jugement, dans un delai determine, et generalisation de la pratique des injonctions, eventuellement assorties d'astreintes.
UDF 10 REP_PUB Languedoc-Roussillon O