FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 10235  de  M.   Lellouche Pierre ( Rassemblement pour la République - Paris ) QE
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  16/02/1998  page :  779
Réponse publiée au JO le :  13/07/1998  page :  3896
Rubrique :  impôts et taxes
Tête d'analyse :  recouvrement
Analyse :  procédure. contribuables. protection
Texte de la QUESTION : M. Pierre Lellouche attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur certaines pratiques du Trésor public lorsqu'un redressement est mis en recouvrement et sur l'adoption, à chaque loi de finances rectificative, de textes visant à contrarier la jurisprudence des hautes juridictions. En effet, lorsqu'un redressement est mis en recouvrement, le Trésor public envoie systématiquement des commandements de payer dans les quelques jours qui suivent cette mise en recouvrement. S'il en a le droit, son application est manifestement abusive et permet à l'Etat de majorer de 3 % (frais de commandement) les redressements notifiés. Par ailleurs, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie parvient à faire adopter par le Parlement, à chaque loi de finances rectificative, des textes visant uniquement à contrarier la jurisprudence des hautes juridictions (Cour de cassation et Conseil d'Etat). Le législateur, par des mesures rétroactives dites interprétatives, vient annihiler les sanctions que ces juridictions ont pu prononcer contre notre administration. Il lui demande quelles mesures il entend prendre en vue d'arrêter ces pratiques qui nuisent à la crédibilité et l'image même de notre administration et quels dispositifs peuvent être envisagés pour garantir et protéger les droits fondamentaux du citoyen devant l'impôt.
Texte de la REPONSE : Aux termes de l'article L. 255 du livre des procédures fiscales (LDF), lorsque le redevable ne s'est pas acquitté de sa dette à la date limite de paiement, et s'il n'a pas présenté une réclamation suspensive de paiement, le comptable du trésor chargé du recouvrement doit envoyer au débiteur une lettre de rappel avant la notification du premier acte de poursuites devant donner lieu à des frais, en l'occurrence le commandement. A défaut du paiement après la lettre de rappel, les poursuites par voie de commandement ne peuvent être engagées contre les redevables qu'après l'expiration d'un délai de vingt jours à compter de l'envoi de la lettre de rappel. Toutefois, lorsque des majorations de droits ou des intérêts de retard ont été appliqués au débiteur pour non-déclaration ou déclaration insuffisante des revenus et bénéfices imposables, le comptable du trésor peut faire notifier un commandement au contribuable dès l'exigibilité de l'impôt sans qu'une lettre de rappel doive être préalablement notifiée (article L. 260 du LPF). Ces dispositions de l'article L. 260 du LPF sont mises en oeuvre à l'égard des contribuables dont les comptables ont des raisons de penser qu'ils cherchent à organiser leur insolvabilité. Dans ce cas, un commandement peut être notifié à un redevable dès la mise en recouvrement des impôts en cause. Le contribuable est dans tous les cas informé de l'exigibilité immédiate de son impôt par une mention portée sur son avis d'imposition. Il dispose toutefois d'un délai minimum avant que le commandement ne soit notifié par le comptable. Si, cependant, il estime ne pas pouvoir s'acquitter de sa dette dans le délai imparti, il peut s'adresser à la trésorerie dont il dépend afin de solliciter des délais de paiement et le cas échéant la remise des frais de poursuites. S'agissant des dispositions à caractère rétroactif que le Gouvernement est parfois conduit à soumettre au parlement, le Conseil constitutionnel a clairement jugé que « s'il n'appartient ni au législateur ni au Gouvernement de censurer les décisions des juridiques, d'adresser à celles-ci des injonctions et de se substituer à elles dans le jugement des litiges relevant de leur compétence, ces principes ne s'opposent pas à ce que, dans l'exercice de sa compétence et au besoin, sauf en matière pénale, par la voie de dispositions rétroactives, le législateur modifie, dans un but d'intérêt général, les règles que le juge a mission d'appliquer ». Dès lors, et contrairement aux indications données par l'auteur de la question, les dispositions fiscales en cause ne méconnaissent pas les principes constitutionnels et respectent en tout état de cause scrupuleusement les décisions de justice passées en force de chose jugée. Au demeurant, l'examen des rapports et des débats parlementaires souligne que le législateur exerce un contrôle particulièrement vigilant sur l'intérêt et la nécessité des mesures fiscales rétroactives, ce qui explique l'absence de censure du Conseil constitutionnel sur les dispositifs de cette nature qui ont été adoptés par l'actuelle majorité parlementaire.
RPR 11 REP_PUB Ile-de-France O