FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 10389  de  M.   Marsaudon Jean ( Rassemblement pour la République - Essonne ) QE
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  23/02/1998  page :  966
Réponse publiée au JO le :  08/02/1999  page :  771
Rubrique :  marchés financiers
Tête d'analyse :  actions
Analyse :  actionnaires détenant 95 % des droits de vote d'une société. pouvoirs. conséquences
Texte de la QUESTION : M. Jean Marsaudon appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'article 6 bis de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988 modifié par la loi n° 93-1444 du 31 décembre 1993. Cette modification permet aux actionnaires qui possèdent au moins 95 % des droits de vote d'une société d'imposer, à l'issue d'une procédure d'offre ou de demande de retrait, aux détenteurs minoritaires, de leur transférer leurs actions (art. 2571 du règlement du conseil des bourses de valeurs). Cette disposition lui semble tout à fait incompatible avec l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen par lequel la propriété est un droit inviolable et sacré dont nul ne peut être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige. Egalement contraire à l'article 545 du code civil, cette mesure ne saurait répondre à des impératifs d'utilité publique puisqu'elle est essentiellement appliquée au sein de groupes privés. Il lui demande donc s'il envisage le retrait de cette disposition inconstitutionnelle.
Texte de la REPONSE : La procédure de retrait obligatoire prévue aujourd'hui par l'article 33-4/ de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 modifiée de modernisation des activités financières permet, selon des modalités précises et sous le contrôle du Conseil des marchés financiers et du juge, à l'actionnaire majoritaire d'une société cotée, s'il détient plus de 95 % des actions ou des droits de vote de ladite société, d'acquérir les titres restants contre une juste indemnisation. Plusieurs points caractérisant cette procédure méritent d'être soulignés. En premier lieu, le législateur a réservé l'utilisation de la procédure de retrait obligatoire à des cas très précis : une offre publique de retrait, non obligatoire, doit d'abord avoir été mise en oeuvre ; ce n'est qu'à l'issue d'une telle offre, et uniquement si les titres non présentés par les actionnaires minoritaires ne représentent pas plus de 5 % du capital ou des droits de vote, que le retrait obligatoire peut être déclenché à l'initiative de l'actionnaire majoritaire. La loi précise enfin les méthodes d'évaluation qui doivent être retenues pour procéder à l'évaluation des titres. En second lieu, au regard des principes constitutionnels rappelés par l'auteur de la question, les garanties procédurales accordées aux actionnaires revêtent une importance toute particulière. Or la loi et les règlements encadrent strictement le déroulement de la procédure de retrait obligatoire. Un expert est ainsi chargé de vérifier l'évaluation des titres établie par l'actionnaire majoritaire. Cet expert, indépendant tant de l'actionnaire majoritaire que de l'établissement financier présentateur de l'offre et en charge de l'évaluation, est désigné sous le contrôle du conseil des marchés financiers et après avis de la Commission des opérations de bourse. L'offre est ensuite soumise au conseil des marchés financiers qui se prononce sur la recevabilité du prix proposé au regard des méthodes d'évaluation prévues par la loi. Enfin, un recours peut être formé devant le juge judiciaire, en l'occurrence la cour d'appel de Paris, contre les décisions prises en la matière par le Conseil des marchés financiers. Ensuite, cette disposition trouve sa contrepartie dans la possibilité offerte, par l'article 33-3/ de la loi du 2 juillet 1996, à tout actionnaire minoritaire d'une société détenue à 95 % au moins par un autre actionnaire de demander à ce majoritaire de lui acheter ses actions, s'il estime qu'il ne peut les céder dans de bonnes conditions sur le marché. L'examen des demandes ainsi formées par des actionnaires minoritaires a été confié par le législateur au conseil des marchés financiers. Enfin, en opportunité, cette procédure, qui est également prévue par le droit des sociétés de nombreux autres Etats, favorise les recompositions des groupes de sociétés et assure leur compétitivité, et donc leur croissance et la pérennité des emplois qu'ils représentent. Ainsi, pendant les années 1994 à 1997, 208 retraits obligatoires ont été réalisés par des sociétés françaises, ce qui témoigne de l'utilité de cette procédure pour les entreprises cotées. Cette procédure permet également d'assurer dans de bonnes conditions la sortie du marché de valeurs dont la liquidité du titre ne permet plus d'offrir aux actionnaires minoritaires des conditions de vente satisfaisantes. Fort de cette expérience positive, le législateur a récemment étendu le mécanisme du retrait obligatoire aux sociétés ayant émis des certificats d'investissement (article 283-1-1 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales tel qu'inséré par la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier).
RPR 11 REP_PUB Ile-de-France O