FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 12506  de  Mme   Boutin Christine ( Union pour la démocratie française - Yvelines ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  30/03/1998  page :  1754
Réponse publiée au JO le :  22/06/1998  page :  3480
Rubrique :  moyens de paiement
Tête d'analyse :  chèques
Analyse :  chèques impayés. procédure
Texte de la QUESTION : Mme Christine Boutin appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences du rejet à première présentation d'un chèque pour défaut de provision. En effet, il génère un enchaînement solidaire de frais de toute nature pour la banque présentatrice, pour la banque tirée et pour le porteur bénéficiaire de l'impayé. Cependant, il s'avère que le remboursement de ces frais reste inéquitable. Les banques se servent en premier en ponctionnant sans délai les comptes de leurs clients (émetteurs ou bénéficiaires des chèques impayés). Quant aux bénéficiaires de ces impayés, ils sont eux-mêmes laissés totalement démunis pour faire valoir ces droits que la loi reonnaît explicitement. Les frais supportés par les bénéficiaires sont notamment des frais de rejet de la banque (entre 60 et 90 francs par formule de chèque impayé) auxquels s'additionnent les frais de gestion comptable (contre-passation des écritures, rectifications des bordereaux de déclaration de la TVA collectée, extournes de la TIPP non encaissée...), les frais de calcul des intérêts de droit qui doivent être déterminés avec précision, enfin des frais de courrier adressé au tireur en recommandé pour réclamer le remboursement amiable du préjudice causé. Or le dernier alinéa de l'article 65-3 du décret-loi du 30 octobre 1935 modifié stipule que ces frais sont à la charge du tireur, l'émetteur défaillant du chèque. Si le solde du compte du tireur le permet, la seconde présentation du chèque impayé seul ne permet pas de demander au banquier tiré de payer tous ces frais ainsi que les intérêts de droit, sauf à utiliser l'allonge du chèque que le décret-loi prévoit en son article 16, avec le consentement du tireur pour un paiement global. Pourtant, les banques refusent au bénéficiaire du chèque impayé l'utilisation de l'allonge, plus simple et moins onéreuse, obligeant ledit bénéficiaire soit à recourir aux services très coûteux pour l'émetteur défaillant de certaines officines de recouvrement, soit à mettre en oeuvre une procédure également onéreuse, comme la saisine conservatoire, pour l'obtention du paiement de ces frais. C'est pourquoi elle lui demande ce qu'elle entend faire pour que la loi soit enfin respectée pour les bénéficiaires.
Texte de la REPONSE : la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'aux termes de l'article 65-3, dernier alinéa, du décret-loi du 30 octobre 1935 unifiant le droit en matière de chèques et relatif aux cartes de paiement, « les frais de toute nature qu'occasionne le rejet d'un chèque sans provision sont à la charge du tireur ». En revanche, le porteur du chèque impayé n'est pas fondé à réclamer au banquier tiré le paiement des frais. Ainsi, la Cour de cassation a rappelé, dans un arrêt du 21 octobre 1997, « qu'il ne résulte d'aucune disposition de la loi que la banque ait l'obligation, lors de la seconde présentation, de payer, outre le montant du chèque, les frais et intérêts » (Cass. Com., 21 octobre 1997, Dalloz Affaires n° 43, 1997, chroniques, p. 424). Si le compte présente une provision suffisante à seconde présentation, l'établissement tiré ne règle que le nominal du titre, non les frais de recouvrement exposés par le porteur ou les intérêts de retard. Dans le cas inverse, le tiré est seulement tenu, par application des dispositions de l'article 36, alinéa 2, du décret n° 92-456 du 22 mai 1992, de délivrer, sans frais pour le porteur, un certificat de non-paiement. Il résulte de ces dispositions que le porteur ne peut, en principe, obtenir le paiement des intérêts et frais que dans le cadre d'un recours exercé directement contre le tireur. L'article 45 du décret-loi du 30 octobre 1935 prévoit d'ailleurs que le porteur peut réclamer « à celui contre lequel il peut exercer son recours » (un garant, en particulier le tireur, et non le banquier tiré qui a la qualité de débiteur principal) non seulement le montant du chèque impayé mais aussi les intérêts et les frais. Il est, toutefois, exact que le procédé de l'« allonge » évoqué par l'honorable parlementaire, création de la pratique, également connu sous le nom de « modulo-chèque », est susceptible de permettre au porteur du chèque de recouvrer simultanément, sur seconde présentation, le montant nominal du chèque et des intérêts et frais. Le tireur donne mandat à son banquier d'acquitter les sommes supplémentaires réclamées, les indications nécessaires à leur paiement étant inscrites sur une « allonge » jointe au chèque par le bénéficiaire. Ce procédé ne semble pas, sous réserve de l'appréciation des cours et tribunaux, se heurter aux dispositions du décret-loi du 30 octobre 1935 déjà cité. En revanche, son utilisation soulève un certain nombre de difficultés pratiques et techniques qui ne permettent pas, en l'état, d'encourager sa généralisation. Une réflexion a, toutefois, été engagée sur le recouvrement des intérêts et frais que les procédures du droit commun, en raison de leur caractère souvent trop onéreux, ne permettent pas toujours d'assurer de façon satisfaisante.
UDF 11 REP_PUB Ile-de-France O