FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 14516  de  M.   Fousseret Jean-Louis ( Socialiste - Doubs ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  18/05/1998  page :  2750
Réponse publiée au JO le :  26/10/1998  page :  5928
Rubrique :  justice
Tête d'analyse :  témoins
Analyse :  protection
Texte de la QUESTION : M. Jean-Louis Fousseret attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les problèmes que pose pour certaines personnes, par peur de représailles, le fait d'avoir à témoigner. Il reconnaît que la possibilité qu'elles ont de se domicilier au commissariat permet déjà de protéger les témoins. Il lui demande cependant, si elle n'envisage pas d'instituer la possibilité pour ces témoins, à l'image de ce qui se fait chez nos voisins espagnols, de nommer les témoins par un numéro pour les protéger totalement.
Texte de la REPONSE : La ministre de la justice a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire qui a bien voulu l'interroger sur le problème, incontestablement actuel et délicat, de la protection des témoins intervenant dans les procédures judiciaires de nature pénale qu'elle partage totalement ses légitimes préoccupations et qu'elle considère, comme lui-même, que les pouvoirs publics en général, et l'institution judiciaire en particulier, doivent assurer assistance et protection à ceux dont le civisme et le courage permettent à l'oeuvre de justice de s'accomplir. Dans cet esprit, et comme le fait remarquer fort justement l'honorable parlementaire, le législateur a, par la loi du 21 janvier 1995 créant un article 62-1 nouveau du code de procédure pénale, autorisé les témoins à déclarer comme domicile l'adresse du commissariat ou de la brigade de gendarmerie à qui est confiée l'enquête. Cette disposition légale, dérogatoire au principe rappelé par les articles 103, 331 et 445 du code de procédure pénale, selon lequel la véritable adresse du témoin doit figurer au dossier de la procédure, a pour but affirmé d'interdire que des pressions, tant physiques que morales, ou des représailles soint exercées sur des personnes dont le témoignage est susceptible de permettre la manifestation de la vérité. Cette nouvelle disposition est entrée en vigueur après la publication d'un décret en date du 3 septembre 1996 insérant dans le code de procédure pénale un nouvel article R.15-33-1 qui en précise les modalités pratiques d'application. Quoi qu'il en soit, et compte tenu notamment du développement de nouvelles formes de criminalité organisée internationale à la dangerosité incontestée, il paraît nécessaire de mener une réflexion approfondie sur une adaptation et un renforcement des dispositifs légaux et matériels de protection des témoins de justice. Cette réflexion s'impose d'autant plus qu'une résolution du Conseil de l'Union européenne, adoptée le 23 novembre 1995 et relative à la protection des témoins dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée internationale (95/C327/04), invite les Etats membres à mettre en oeuvre des dispositifs adéquats et durables de protection des témoins, tenant compte de la gravité des menaces pesant sur ceux-ci, s'étendant à leurs proches et pouvant recourir, le cas échéant, à des procédés audiovisuels. C'est cette piste que le ministère de la justice se propose d'explorer dans un premier temps, de préférence à la conduite d'une réflexion sur un éventuel statut de témoin anonyme que tant la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation que celle de la Cour européenne des droits de l'homme rendent délicate, un tel procédé portant atteinte au droit, pour la défense, d'interroger ou de faire interroger les témoins de l'accusation. Il pourrait être ainsi envisagé, pour interdire menaces verbales et tentatives d'intimidation physiques, que le témoin et la personne mise en cause ne soient à aucun moment mis en présence. Le recueil ou la réitération du témoignage, à tout moment de la procédure, se ferait par le biais d'un procédé audiovisuel tel que la vidéo ou visio conférence, toutes les dispositions nécessaires étant prises afin que le principe du contradictoire soit assuré. Ces procédés sont d'ailleurs introduits dans le projet de réforme de la convention européenne d'entraide judiciaire, actuellement étudiée au sein des instances de l'Union européenne. Il convient d'observer, à ce propos, que le Parlement a déjà montré son approbation du recours par l'institution judiciaire aux techniques audiovisuelles en votant récemment la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et la répression des infractions sexuelles, qui introduit dans le code de procédure pénale un article prévoyant l'enregistrement vidéo des auditions de mineurs victimes d'infractions sexuelles.
SOC 11 REP_PUB Franche-Comté O