FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 15716  de  M.   Bocquet Alain ( Communiste - Nord ) QE
Ministère interrogé :  emploi et solidarité
Ministère attributaire :  emploi et solidarité
Question publiée au JO le :  15/06/1998  page :  3220
Réponse publiée au JO le :  07/09/1998  page :  4947
Rubrique :  entreprises
Tête d'analyse :  redressement judiciaire
Analyse :  créances des salariés. garantie
Texte de la QUESTION : M. Alain Bocquet attire l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur l'application de la loi du 27 décembre 1973 à prévoir une garantie de paiement des salariés en cas de défaillance de l'entreprise. « Tout employeur doit assurer ses salariés contre le risque de non-paiement en cas de redressement judiciaire. Ce régime d'assurance est mis en oeuvre par une association créée par les organisations d'employeurs. La garantie est limitée, toutes créances confondues, à un ou des montants fixés par décret ». Un décret du 25 novembre 1976 donne définition suivante des plafonds AGS 4 et 13 (art. D. 143-2) : « Le montant maximum de la garantie prévue à l'article L. 143-II-8 du code du travail est fixé à treize fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage lorsque les créances résultent de dispositions législatives ou réglementaires ou de stipulations d'une convention collective et sont nées d'un contrat de travail dont la date de conclusion est antérieure de plus de six mois à la décision prononçant le redressement judiciaire. Dans les autres cas, le montant de cette garantie est limité à quatre fois le plafond mentionné au premier alinéa ci-dessus ». Or la dérive juridique de l'article D. 143-2 due à l'acharnement de l'AGS a permis d'éliminer de facto, au fil des années, le « plafond 13 », au profit exclusif du « plafond 4 », seul appliqué. L'AGS estime qu'un salaire, même légèrement supérieur au minimum garanti, ne résulte pas de la convention collective, s'il n'est pas rigoureusement égal à ce minimum garanti. Cela revient à appliquer un plafond sur le salaire (non prévu par la loi) et non plus sur l'ensemble des créances du salarié, comme en dispose la loi du 27 décembre 1975. Il y a donc détournement de la volonté du législateur. Il lui demande les mesures qu'elle compte prendre pour que : le plafond « 13 » défini à l'article D. 143-2 du code du travail soit ramené à dix fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage... ; le plafond si les créances définies à l'article D. 143-2 résultent de stipulations d'une convention collective, c'est-à-dire si les appointements servant au calcul des créances sont compris entre une fois et une fois et quart le salaire minimum garanti par la convention collective... ; les présentes dispositions soient applicables immédiatement aux dossiers en cours d'instruction et à venir à l'AGS, ainsi qu'aux dossiers en cours de procédure.
Texte de la REPONSE : L'honorable parlementaire appelle l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur les difficultés résultant des imprécisions de l'article D. 143-2 du code du travail. Ledit article, issu du décret n° 76-1065 du 25 novembre 1976, définit les modalités de mise en oeuvre du double plafonnement de la prise en charge des créances salariales par l'AGS (association pour la gestion du régime d'assurance des créances des salariés) en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l'employeur. L'honorable parlementaire estime qu'il a connu une dérive interprétative remettant en cause la bonne application des lois du 27 décembre 1973 et du 27 décembre 1975, relatives à la garantie des créances salariales. Le plafond maximum de la garantie est en effet réservé par la pratique de l'AGS aux seuls salariés dont le salaire est égal au minimum fixé par la convention collective. L'honorable parlementaire propose qu'un plafond « 10 » et non plus « 13 » soit appliqué aux créances des salariés calculées sur la base d'appointement compris entre une fois et une fois et quart le salaire minimum garanti par la convention collective. Ce nouveau plafond s'appliquerait immédiatement aux dossiers en cours d'instruction. L'article D. 143-2 du code du travail prévoit l'existence d'un double plafond établi sur la base de 4 et 13 fois le plafond mensuel de l'assurance chômage (soit 16 et 52 fois le plafond de la sécurité sociale). Le plafond 13 est applicable aux seules créances résultant de dispositions législatives ou réglementaires ou de stipulations d'une convention collective et nées d'un contrat de travail dont la date de conclusion est antérieure de plus de six mois à la décision prononçant le redressement judiciaire. Le plafond 4 s'applique dans les autres cas. La Cour de cassation a précisé que relèvent du plafond 13 les créances résultant des dispositions législatives ou réglementaires ou d'une convention collective, qui portent sur des salaires, autres rémunérations, indemnités dont le montant lui-même a été fixé par une loi, un règlement ou une convention collective (arrêt du 5 avril 1994, ASSEDIC de la région d'Auvergne contre M. Sudre). Il ressort de cet arrêt que les salaires, rémunérations et indemnités dont l'existence trouve son origine dans des dispositions législatives ou réglementaires ou dans les conventions collectives, mais dont le montant a été fixé par la volonté commune des parties, relèvent du plafond 4. Une créance dont le montant est supérieur à celui qui résulterait de la simple application des textes législatifs, réglementaires ou conventionnels relève donc du plafond 4 pour son intégralité. De plus, la Cour de cassation fait une interprétation stricte des dispositions concernant les plafonds 4 et 13, qui aboutit à l'application d'un plafond unique dans les cas où la créance du salarié relève pour une part du plafond 4 et pour une autre part du plafond 13. La règle définie dans un arrêt rendu le 9 février 1994 repose sur la nature des créances. Elle est la suivante : si le montant des créances relevant du plafond 13 dépasse le montant du plafond 4, le plafond 13 est applicable à l'ensemble des créances y compris celles qui par elles-mêmes relèveraient du plafond 4 ; si le montant des créances relevant du plafond 13 ne dépasse pas le montant du plafond 4, seul le plafond 4 est applicable à l'ensemble des créances y compris celles qui par elles-mêmes relèveraient du plafond 13. La comparaison est ainsi établie par rapport au montant du plafond 4 et non par rapport aux créances relevant du plafond 4. L'interprétation de la réglementation qui est faite par la Cour de cassation introduit un important effet de seuil. L'existence d'une créance dont le montant est légèrement supérieur au minimum prévu par les textes peut ainsi entraîner une diminution de plus de deux tiers de la prise en charge par l'assurance garantie des salaires. Il est précisé à l'honorable parlementaire que les solutions à apporter aux inconvénients liés à la mise en oeuvre du système de double plafonnement de la garantie AGS font actuellement l'objet d'une réflexion approfondie, prenant en compte le nécessaire équilibre entre les impératifs de compétitivité des entreprises et la satisfaction des droits des salariés.
COM 11 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O