FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 16777  de  M.   Bouvard Michel ( Rassemblement pour la République - Savoie ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  13/07/1998  page :  3870
Réponse publiée au JO le :  19/10/1998  page :  5738
Erratum de la Réponse publié au JO le :  23/11/1998  page :  6450
Rubrique :  impôts et taxes
Tête d'analyse :  fraude fiscale
Analyse :  dénonciations anonymes. utilisation
Texte de la QUESTION : Le quotidien Les Echos du 19 juin 1998 rapporte une décision de la Cour de cassation du 18 juin permettant à un magistrat d'autoriser une perquisition du fisc chez un contribuable, afin de rechercher la preuve d'une fraude, même si le seul indice est une dénonciation anonyme. M. Michel Bouvard attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur cette jurisprudence instituant la délation anonyme comme moyen d'action des services fiscaux, avec toutes les dérives qui peuvent en résulter pour les libertés publiques. La France doit-elle s'inspirer de la Venise du XVIe siècle où les boîtes à billets à gueule de lion étaient destinées à recevoir les messages des dénonciateurs anonymes sur lesquels s'appuyaient un gouvernement réputé autoritaire et antidémocratique ? Il souhaite donc connaître, compte tenu de cette jurisprudence, si le Gouvernement entend légiférer pour éviter cette pratique, les services fiscaux disposant d'autres moyens pour agir contre la fraude plus compatibles avec le respect des libertés publiques.
Texte de la REPONSE : la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu le 16 juin 1998 un arrêt de rejet du pourvoi formé contre une ordonnance du président du tribunal de grande instance de Paris en date du 16 juillet 1996, ayant autorisé des agents de la direction générale des impôts à effectuer une visite et une saisie de documents dans les locaux commerciaux en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales. La Cour de cassation a motivé sa décision de la manière suivante : « Attendu qu'il n'est pas interdit au juge de faire état d'une déclaration anonyme, dès lors que cette déclaration lui est soumise au moyen d'un document établi par les agents de l'administration et signés par eux, permettant ainsi d'en apprécier la teneur et est corroborée par d'autres éléments d'information décrits et analysés par lui. » Il résulte de ce motif que la dénonciation anonyme qui a été prise en compte était corroborée par d'autres éléments d'information, dont la Cour de cassation relève qu'ils ont été décrits et analysés par le juge. Cer arrêt, comme ceux rendus antérieurement à propos de la mise en oeuvre de l'article L. 16 B susvisé, de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ou de l'article 64 du code des douanes qui mettent en jeu des principes similaires, atteste que le juge judiciaire, gardien de la liberté individuelle aux termes de l'article 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, doit exercer et exerce un contrôle approfondi sur les conditions de mise en oeuvre du pouvoir de visite domiciliaire dont l'exercice par une administration est soumis à son autorisation préalable (Cass. com., 27 novembre 1991, 23 février 1993, 6 avril 1993). Dans ces conditions, il n'est pas envisagé de légiférer en la matière.
RPR 11 REP_PUB Rhône-Alpes O