FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 23814  de  M.   Lengagne Guy ( Radical, Citoyen et Vert - Pas-de-Calais ) QE
Ministère interrogé :  emploi et solidarité
Ministère attributaire :  emploi et solidarité
Question publiée au JO le :  18/01/1999  page :  275
Réponse publiée au JO le :  31/05/1999  page :  3311
Rubrique :  travail
Tête d'analyse :  contrats de travail
Analyse :  précarisation. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Guy Lengagne attire l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur l'accroissement de la précarité sur le marché du travail. En effet, alors que la production, l'investissement et la consommation ont fortement augmenté en 1998, un très grand nombre d'entreprises ont choisi d'utiliser systématiquement les formes les plus précaires de contrat à leur disposition dans la législation du travail. Ainsi, l'emploi intérimaire s'est accru de 30 % l'an passé, et ce tout particulièrement dans le secteur industriel. Parallèlement, le recours aux heures supplémentaires ne cesse de croître. Il semble donc bien que la quantité de main-d'oeuvre soit devenue abusivement la variable d'ajustement privilégiée par un grand nombre d'entreprises, empêchant ainsi ces personnels intérimaires de recouvrer une certaine stabilité sociale. Il la remercie de bien vouloir lui faire connaître ses intentions en la matière.
Texte de la REPONSE : L'honorable parlementaire appelle l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur la multiplication des contrats précaires et notamment des contrats d'intérim qui laisse à penser que la quantité de main-d'oeuvre est devenue abusivement la variable d'ajustement privilégiée par un grand nombre d'entreprises. Il est nécessaire de rappeler que la loi n° 90-613 du 12 juillet 1990, favorisant la stabilité de l'emploi par l'adaptation du régime des contrats précaires, avait pour but de mieux encadrer l'utilisation des contrats précaires (contrats à durée déterminée et contrats temporaires) en clarifiant les conditions de recours et en mettant en place des moyens de contrôle plus efficaces et un régime de sanctions plus dissuasif. Ainsi, le rétablissement d'une liste limitative de cas de recours a permis de limiter l'utilisation des contrats précaires en facilitant la détection et la correction des pratiques abusives par les services d'inspection. Tous les recours au travail intérimaire ou aux contrats à durée déterminée ne constituent pas un détournement systématique de la loi par les employeurs. L'utilisation des contrats précaires peut répondre en effet à un besoin réel de certaines entreprises qui disposent ainsi des souplesses nécessaires pour affronter la concurrence nationale et internationale et les aléas de la conjoncture économique. L'utilisation de contrats précaires s'effectue alors dans le cadre légal que représente le surcroît temporaire d'activité, cas de recours le plus largement répandu avec le remplacement de salarié absent. Il n'en demeure pas moins qu'un certain nombre de dérives sont effectivement constatées dans le recours aux contrats précaires, dérives dues à une utilisation structurelle et permanente de ces contrats pour pourvoir des postes permanents. Plusieurs moyens ont été et seront mis en place pour encadrer le recours aux formes précaires d'emploi. Le recours aux contrats de travail précaires ne peut pas être un mode de régulation permanent des effectifs dans une entreprise et cela d'autant moins d'une part que la stabilisation du taux de croissance devrait conduire les entreprises à embaucher désormais sur des contrats à durée indéterminée, d'autre part que le Gouvernement a proposé au Parlement, qui l'a voté, un important dispositif permettant l'adaptation des entreprises par l'incitation à la réduction et à l'aménagement du temps de travail. La réorganisation qui s'ensuit est de nature à limiter le recours aux dispositifs de la flexibilité externe comme l'intérim ou les contrats à durée déterminée, ainsi qu'en témoignent déjà de nombreux exemples d'entreprises. Par ailleurs, un dispositif de sanctions civiles et pénales est prévu par la loi. Ainsi, le recours irrégulier aux contrats précaires entraîne par le juge la requalification en contrat à durée indéterminée au terme d'une procédure accélérée (affaires de requalification portées directement devant le bureau du jugement sans phase préalable de conciliation au même titre que l'absence d'écrit ou que la poursuite de la relation de travail après l'échéance du terme). A ce titre, la jurisprudence est très fournie en matière de requalification, les juges du fond vérifiant très attentivement la réalité du cas légal mentionné dans le contrat. Enfin, toute infraction aux dispositions de l'article L. 124-2-1 du code du travail fixant la liste des cas de recours aux contrats temporaires est soumise à des sanctions pénales prévues à l'article L. 152-2 du même code. Les contrôleurs et inspecteurs du travail font en l'espèce preuve d'une très grande vigilance. Outre les efforts de conseil et d'information que déploient les services déconcentrés du ministère de l'emploi et de la solidarité pour informer les entreprises qui recourent à ce type de contrat, ils effectuent de nombreux contrôles dans les entreprises qui aboutissent le plus souvent à une mise en conformité des contrats. Rapidement, les outils mis à la disposition des services déconcentrés vont être renforcés afin de faciliter l'analyse de la situation des entreprises au regard du recours aux formes précaires d'emploi et d'accroître l'efficacité des contrôles et des procédures de régularisation. Enfin, une démarche a été engagée en vue de mobiliser les partenaires sociaux, au niveau des branches professionnelles, afin qu'ils négocient et s'accordent pour faire baisser les taux excessifs de recours aux emplois précaires et proposent, en fonction des situations économiques et de l'emploi propres aux branches, des solutions visant à améliorer les trajectoires professionnelles des travailleurs précaires et à développer les moyens d'accès à la qualification. Si cette démarche devait ne pas aboutir, les mesures nécessaires pour maîtriser le volume d'emploi précaire seraient prises.
RCV 11 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O