FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 35323  de  M.   Godfrain Jacques ( Rassemblement pour la République - Aveyron ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  04/10/1999  page :  5713
Réponse publiée au JO le :  31/07/2000  page :  4572
Erratum de la Réponse publié au JO le :  21/08/2000  page :  4996
Rubrique :  justice
Tête d'analyse :  tribunaux de commerce
Analyse :  réforme
Texte de la QUESTION : M. Jacques Godfrain attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la mise en place il y a deux ans d'un plan visant à la suppression du tiers des tribunaux de commerce. Cette volonté s'est traduite par des campagnes de presse désobligeantes vis-à-vis des tribunaux et par la publication de rapports, notamment parlementaires, justifiant la réforme de notre justice consulaire. La réforme engagée a suscité de vives réactions, tant chez les commerçants que chez les greffiers des tribunaux de commerce qui se voient menacés de disparition. Ainsi la 17e chambre correctionnelle a reconnu le caractère diffamatoire des accusations rapportées à leur encontre par le journal Le Monde. En outre, 119 communes vont intenter un recours en annulation devant le Conseil d'Etat contre la décision de suppression de leur tribunal de commerce. Il lui demande en conséquence de lui préciser si une liste exhaustive des tribunaux de commerce visés sera publiée et si elle compte publier le décret relatif aux mesures de reclassement et d'indemnisation des personnes de greffe et des greffiers.
Texte de la REPONSE : la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la réforme des tribunaux de commerce, de leur organisation et de leur implantation, constitue l'un des axes de la réforme d'ensemble de la justice qu'elle a engagée depuis 1997. Elle s'inscrit plus précisément dans le cadre de la réforme de la justice commerciale et de l'environnement juridique de l'entreprise annoncée conjointement avec le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le 14 octobre 1998. Elle prévoyait, outre le statut des auxiliaires de justice et la refonte des lois de 1984 et 1985 sur le traitement des difficultés des entreprises, la réforme des tribunaux de commerce eux-mêmes et de la carte de ces juridictions. Elle est liée à la nécessité d'adapter cette justice dans son fonctionnement et dans son implantation territoriale. La mixité, c'est-à-dire l'association de juges élus et professionnels dans une même formation de jugement, a pour objectif d'assurer une justice de qualité puisque se trouveront réunies la connaissance des règles de fond et de procédure et la perception, pour chaque affaire, de sa dimension économique. Les grandes orientations de la réforme ont été arrêtées le 31 mai 1999. Elles font suite aux conclusions d'une commission constituée en accord avec monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le 23 décembre 1998, et chargée de déterminer les modalités de la mise en oeuvre de cette réforme. Le président du tribunal de commerce restera un juge élu avec des pouvoirs propres aménagés et encadrés pour tenir compte de l'introduction de la mixité et pour garantir l'autonomie des formations de jugement. Il conserve en matière juridictionnelle l'ensemble de ses pouvoirs propres qu'il s'agisse d'ordonnances sur requête ou des référés et ce quel que soit le contentieux concerné. Des formations de jugements mixtes, associant magistrats professionnels et juges élus seront présidées par les magistrats du corps judiciaire et auront compétence pour traiter des procédures collectives, des litiges liés au contrat de société et aux instruments financiers et des affaires de concurrence relevant de l'ordonnance du 1er décembre 1986. Le reste des contentieux attribués aux tribunaux de commerce continuera à relever des formations de jugement purement consulaires présidées par un juge élu. Cette réforme ne remet aucunement en cause la plénitude des attributions de tout juge. Quel que soit son statut, quelle que soit sa fonction, chacun pourra s'exprimer dans le cadre du délibéré collégial, aucun membre de la formation de jugement n'ayant voix prépondérante. Plusieurs mesures d'accompagnement seront mises en oeuvre pour assurer la réussite de la réforme. Elles porteront notamment sur la formation des juges, les règles déontologiques et le mode d'élection. Parallèlement, les juges consulaires remplissant notamment des conditions d'expérience dans les fonctions consulaires pourront accéder aux cours d'appel. Ils seront amenés à participer en qualité de conseillers exerçant à titre temporaire aux formations de jugement qui connaissent des recours formés contre les décisions rendues en première instance dans les matières relevant des tribunaux de commerce. S'agissant de la carte des tribunaux de commerce les premières décisions ont été prises aux termes du décret n° 99-659 du 30 juillet 1999 qui a porté suppression, à compter du 1er janvier 2000, de trente-six tribunaux de commerce. Ces suppressions ont ainsi concerné à titre principal trente-quatre juridictions dans les cours d'appel de Caen, Dijon, Montpellier, Poitiers, Rouen et Riom qui, comptant dans leur ressort le tiers des tribunaux de commerce existants, étaient jugées prioritaires, deux tribunaux situés dans le ressort des cours d'appel d'Amiens et de Bourges ayant par ailleurs été supprimés pour répondre à des besoins exprimés localement. Ces décisions ont été prises après une concertation menée localement par la mission de réforme de la carte judiciaire créée auprès du directeur des services judiciaires. Dans le cadre des déplacements qu'elle effectue dans les cours d'appel concernées cette mission est ainsi amenée à rencontrer les élus et l'ensemble des représentants des professions judiciaires et juridiques, parmi lesquels les greffiers. Cette mission a ainsi conduit ses travaux selon une procédure adpatée à chaque type de juridiction et en tenant compte des réalités locales, du souci d'aménagement du territoire mais également d'autres impératifs tels que le renforcement de la présence du parquet ou l'introduction de la mixité dans les tribunaux de commerce. Les travaux se sont poursuivi dans le même souci de concertation dans les autres cours d'appel. Aucun objectif quantitatif n'a été fixé pour redessiner entièrement la carte des tribunaux de commerce. La suppression de certaines juridictions a été contestée devant le Conseil d'Etat. Le recours tendant à l'annulation du décret précité en ce qu'il portait suppression du tribunal de commerce de la commune de Granville a été rejeté par la Haute-Assemblée le 29 décembre 1999. L'incidence des suppressions de tribunaux de comemrce sur la situation des greffiers de ces juridictions et de leurs personnels obéit à deux régimes juridiques différents. Les employés des greffes des tribunaux de commerce supprimés, salariés de droit privé, voient leur situation régie par les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail. Dans cette mesure, ils bénéficient de la protection offerte par ce texte qui prévoit la poursuite du contrat de travail avec le greffier de la juridiction à laquelle le tribunal supprimé se trouve rattaché et qui devient alors leur nouvel employeur. S'agissant de l'incidence de la suppression de tribunaux de commerce pour les greffiers des juridictions supprimées, la situation de ces officiers publics et ministériels a fait l'objet d'une attention particulière dans le cadre des décrets 99-1017 et 99-1018 des 1er et 6 décembre 1999. Ces textes qui ont ainsi appréhendé la situation tant professionnelle que patrimoniale des greffiers de tribunaux de commerce ont été élaborés dans le cadre d'une concertation permanente avec les représentants du conseil national des greffiers des tribunaux de commerce. Le décret 99-1017 relatif aux conditions d'accès aux professions judiciaires et juridiques de certains greffiers de tribunal de commerce a ainsi prévu, en faveur des seuls greffiers dont l'un au moins des offices est supprimé par suite d'une nouvelle délimitation de circonscriptions judiciaires, dès lors qu'ils ont exercé leurs fonctions pendant dix ans au moins, des modalités exceptionnelles d'accès aux professions d'administrateur judiciaire, d'avocat, d'avoué, de commissaire priseur, d'huissier de justice, de mandataire judiciaire à la liquidation des entreprises et de notaire. En vertu de ce texte, les greffiers des tribunaux de commerce concernés, sous réserve de conditions de durée d'exercice de leurs fonctions, bénéficient ainsi de plein droit d'une dispense de diplôme et d'examen d'aptitude et peuvent bénéficier d'une dispense partielle de stage. Ces passerelles d'accès à d'autres professions judiciaires et juridiques s'ajoutent ainsi à la possibilité déjà existante pour les greffiers dont la juridiction a été supprimée de s'associer au greffier du tribunal de rattachement. Ceux-ci peuvent, par ailleurs, sous réserve de ce qu'ils remplissent les conditions statutaires, accéder à la magistrature dans les conditions fixées par l'ordonnance 58-1290 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Le décret 99-1018 relatif à la profession de greffier de tribunal de commerce et aux conséquences des modifications des ressorts des tribunaux de commerce, sans remettre en cause le principe selon lequel les parties déterminent librement le montant de l'indemnité due au greffier dont l'office est supprimé, modernise la procédure d'indemnisation des greffiers des tribunaux de commerce. En centralisant la gestion des dossiers entre les mains d'une commission nationale, ce texte rationalise et harmonise les modalités d'évaluation des greffes au vu desquelles sont établies, en cas de désaccord entre les parties, les propositions d'indemnisation. Ces propositions seront déterminées en prenant pour éléments de référence la recette nette et le solde d'exploitation de l'office supprimé. Ces deux données traduisent, la première, l'activité de l'entreprise, et la seconde, son résultat. Il s'agit de données fiables et objectives dont la prise en compte garantit une juste appréciation de la valeur des offices. De plus, l'article 17 du décret prévoit expressément qu'il n'y a pas lieu d'attendre l'expiration de la deuxième année civile après la suppression du greffe pour indemniser le greffier dont l'office est supprimé dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire. De même la commission pourra être saisie dès l'entrée en vigueur de textes portant suppression de tribunaux de commerce. Cette commission nationale a été rapidement mise en place. L'arrêté qui en fixe la composition a été pris le 14 janvier 2000 et publié au Journal officiel le 22 janvier.
RPR 11 REP_PUB Midi-Pyrénées O