FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 35956  de  M.   Sauvadet François ( Union pour la démocratie française-Alliance - Côte-d'Or ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  11/10/1999  page :  5860
Réponse publiée au JO le :  31/07/2000  page :  4573
Erratum de la Réponse publié au JO le :  21/08/2000  page :  4996
Rubrique :  justice
Tête d'analyse :  tribunaux de commerce
Analyse :  réforme
Texte de la QUESTION : M. François Sauvadet appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la réforme des tribunaux de commerce qui a été engagée. Le décret du 30 juillet 1999 n'a pas été précédé d'une concertation avec les instances représentatives des greffiers de commerce. Il n'a surtout pas été suivi de mesures d'accompagnement ou de compensation pour les administrateurs et mandataires judiciaires et les greffiers. Un projet de loi devrait être prochainement déposé relatif à la modification de l'organisation et de la composition des tribunaux de commerce. Il souhaiterait savoir si elle entend prendre en compte les vives inquiétudes exprimées par les juges consulaires avant de poursuivre cette réforme aux importantes conséquences.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice fait connaître à l'honorable parlementaire que la réforme de la carte des tribunaux de commerce constitue un élément essentiel de la réforme de la justice qu'elle a engagée, visant à améliorer son fonctionnement, à faciliter l'accès des citoyens au droit ainsi que leur accueil dans les tribunaux. Les premières décisions ont été prises aux termes du décret n° 99-659 du 30 juillet 1999 qui a porté suppression, à compter du 1er janvier 2000, de trente-six tribunaux de commerce. Ces suppressions ont ainsi concerné à titre principal trente-quatre juridictions dans les cours d'appel de Caen, Dijon, Montpellier, Poitiers et Riom qui, comptant dans leur ressort plus du tiers des tribunaux de commerce sur les deux cent vingt-sept existants, étaient jugées prioritaires, deux tribunaux situés dans le ressort des cours d'appel d'Amiens et de Bourges ayant par ailleurs été supprimés pour répondre à des besoins exprimés localement. Ces décisions ont été prises après une concertation menée localement par la mission de réforme de la carte judiciaire créée auprès du directeur des services judiciaires. Dans le cadre des déplacements qu'elle effectue dans les cours d'appel concernées cette mission est ainsi amenée à rencontrer les élus en présence des préfets et l'ensemble des représentants des professions judiciaires et juridiques, parmi lesquels les greffiers des tribunaux de commerce, en présence des premiers présidents et des procureurs généraux des cours d'appel. Cette mission a ainsi conduit ses travaux en tenant compte des réalités locales, du souci d'aménagement du territoire mais également d'autres impératifs tels que le renforcement du parquet ou l'introduction de la mixité dans les tribunaux de commerce. Les travaux se poursuivront dans le même souci de concertation dans les autres cours d'appel. Aucun objectif quantitatif n'a été fixé pour redessiner entièrement la carte des tribunaux de commerce. S'agissant de l'incidence de la suppression de tribunaux de commerce pour les greffiers des juridictions supprimées, la situation de ces officiers publics et ministériels a fait l'objet d'une attention particulière dans le cadre des décrets 99-1017 et 99-1018 des 1er et 6 décembre 1999. Ces textes qui ont ainsi appréhendé la situation tant professionnelle que patrimoniale des greffiers de tribunaux de commerce ont été élaborés dans le cadre d'une concertation permanente avec les représentants de la profession. Le décret 99-1017 relatif aux conditions d'accès aux professions judiciaires et juridiques de certains greffiers de tribunal de commerce a ainsi prévu, en faveur des seuls greffiers dont l'un au moins des offices est supprimé par suite d'une nouvelle élimitation de circonscriptions judiciaires, dès lors qu'ils ont exercé leurs fonctions pendant dix ans au moins, des modalités exceptionnelles d'accès aux professions d'administrateur judiciaire, d'avocat, d'avoué, de commissaire priseur, d'huissier de justice, de mandataire judiciaire à la liquidation des entreprises et de notaire. En vertu de ce texte, les greffiers des tribunaux de commerce concernés, sous réserve de conditions de durée d'exercice de leurs fonctions, bénéficient ainsi de plein droit d'une dispense de diplôme et d'examen d'aptitude et peuvent bénéficier d'une dispense partielle de stage. Ces passerelles d'accès à d'autres professions judiciaires et juridiques s'ajoutent ainsi à la possibilité déjà existante pour les greffiers dont la juridiction a été supprimée de s'associer au greffier du tribunal de rattachement. Ceux-ci peuvent, par ailleurs, sous réserve de ce qu'ils remplissent les conditions statutaires, accéder à la magistrature dans les conditions fixées par l'ordonnance 58-1290 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. Le décret 99-1018 relatif à la profession de greffier de tribunal de commerce et aux conséquences des modifications des ressorts des tribunaux de commerce, sans remettre en cause le principe selon lequel les parties déterminent librement le montant de l'indemnité due au greffier dont l'office est supprimé, modernise la procédure d'indemnisation des greffiers des tribunaux de commerce. En centralisant la gestion des dossiers entre les mains d'une commission nationale, ce texte rationalise et harmonise les modalités d'évaluation des greffes au vue desquelles sont établies, en cas de désaccord entre les parties, les propositions d'indemnisation. Ces propositions seront déterminées en prenant pour éléments de référence la recette nette et le solde d'exploitation de l'office supprimé. Ces deux données traduisent, la première, l'activité de l'entreprise, et la seconde, son résultat. Il s'agit de données fiables et objectives dont la prise en compte garantit une juste appréciation de la valeur des offices. De plus, l'article 17 du décret prévoit expressément qu'il n'y a pas lieu d'attendre l'expiration de la deuxième année civile après la suppression du greffe pour indemniser le greffier dont l'office est supprimé dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire. De même la commission pourra être saisie dès l'entrée en vigueur de textes portant suppression de tribunaux de commerce. Cette commission nationale a été rapidement mise en place. L'arrêté qui en fixe la composition a été pris le 14 janvier 2000 et publié au Journal officiel le 22 janvier. S'agissant des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires, il n'était pas nécessaire de prendre des mesures d'accompagnement spécifiques. Les suppressions de tribunaux de commerce n'ont aucune incidence sur ces professions. En effet, l'article 10 de la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 prévoyait déjà pour les administrateurs judiciaires que : « Les personnes inscrites sur la liste ont vocation à exercer leurs fonctions sur l'ensemble du territoire ». Les mandataires judiciaires sont, eux, désignés par la juridiction parmi les personnes inscrites sur la liste établie pour le ressort de la cour d'appel dont le tribunal relève selon l'article 26 de la même loi. La suppression ou la modification du ressort de certains tribunaux de commerce reste sans effet sur le ressort de la cour d'appel et donc, sur l'activité de ces professionnels. Par ailleurs, s'agissant de la réforme des tribunaux de commerce, eux-mêmes, si les juges consulaires, pour la plupart remplissent leur mission dans le respect des règles de droit, les justiciables, les pouvoirs publics, les professionnels du droit et les juges consulaires eux-mêmes s'attachent à reconnaître que la justice commerciale n'est plus adaptée dans son fonctionnement. La mixité, c'est-à-dire l'association de juges élus et professionnels dans une même formation de jugement, a pour objectif d'assurer une justice de qualité puisque se trouveront réunies la connaissance des règles de fond et de procédure et la perception, pour chaque affaire, de sa dimension économique. Les modalités de la mise en oeuvre de la mixité ont été étudiées par une commission que le garde des sceaux a installée avec monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le 23 décembre 1998 et qui comportait, dans sa composition, un président de tribunal de commerce. Celle-ci a procédé à plus de cent quarante auditions. Elle a, ainsi, été amenée à consulter des représentants du monde économique, des professions judiciaires et juridiques, des magistrats du corps judiciaire et des juges consulaires. Sur la base des conclusions du rapport de cette commission, le principe d'une réforme des tribunaux de commerce reposant sur trois grandes orientations a été arrêté le 31 mai 1999 et est actuellement à l'étude à la Chancellerie. Le président du tribunal de commerce restera un juge élu avec des pouvoirs propres aménagés et encadrés pour tenir compte de l'introduction de la mixité et pour garantir l'autonomie des formations de jugement.. Il conserve en matière juridictionnelle l'ensemble de ses pouvroirs propres qu'il s'agisse d'ordonnances sur requête ou des référés et ce quel que soit le contentieux concerné. Des formations de jugements mixtes, associant magistrats professionnels et juges élus seront présidées par les magistrats du corps judiciaire et auront compétence pour traiter des procédures collectives, des contentieux relatifs au contrat de société commerciale et à leurs instruments financiers et des contentieux relatifs à l'ordonnance du 1er décembre 1986 sur la liberté des prix et la concurrence. Le reste des contentieux attribués aux tribunaux de commerce continuera à relever des formations de jugement purement consulaires présidées par un juge élu. En toute hypothèse, au-delà de ces orientations quant à la composition et à la présidence des formations de jugement, cette réforme ne remet aucunement en cause la plénitude des attributions de tout juge. Quels que soient son statut et sa fonction, chacun pourra s'exprimer dans le cadre du délibéré collégial, aucun membre de la formation de jugement n'ayant voix prépondérante. Plusieurs mesures d'accompagnement seront mises en oeuvre pour assurer la réussite de la réforme. Elles porteront notamment sur la formation des juges, les règles déontologiques et le mode d'élection. Parallèlement les juges consulaires remplissant notamment des conditions d'expérience dans les fonctions consulaires pourront accéder aux cours d'appel. Ils seront amenés à participer en qualité de conseillers exerçant à titre temporaire aux formations de jugement qui connaissent des recours formés contre les décisions rendues en première instance dans les matières relevant des tribunaux de commerce. L'ensemble des orientations retenues constitue une réforme équilibrée en permettant un véritable échange des compétences, cohérente aux divers stades des procédures comme avec le reste de l'organisation judiciaire.
UDF 11 REP_PUB Bourgogne O