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Texte de la QUESTION :
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M. Laurent Dominati attire l'attention de M. le Premier ministre sur l'inexécution des jugements ayant condamné l'Etat à payer des indemnités aux victimes de l'amiante. Dans une affaire jugée en juin dernier par le tribunal des affaires de sécurité sociale, la responsabilité du ministère de la défense a belle et bien été reconnue et l'Etat s'est vu condamner à allouer des indemnités à la victime. Or, depuis et malgré de nombreuses relances, par avocats interposés, l'Etat ne s'est toujours pas exécuté, tant et si bien que le ministère en question vient d'être assigné devant le juge de l'exécution afin de le contraindre à se plier à la décision rendue, il y a de cela sept mois ! Il est, alors, permis de douter de la solidarité de l'Etat à l'égard des victimes de ce drame sanitaire et de leurs ayants droit quand on constate, par ailleurs, les réticences de ce même Etat à payer les indemnités qui leurs sont dues, en raison des préjudices, parfois dramatiques, subis du fait de cette substance reconnue comme étant dangereuse. Dans ces conditions, il demande au chef du Gouvernement de bien vouloir faire cesser au plus vite une telle situation qui fait naître et croître légitimement un sentiment de colère et de profonde injustice chez les victimes et qui n'est, de toute évidence, pas digne d'un Etat qui se veut être un Etat de droit, garant de la démocratie. Il lui demande, enfin, de faire en sorte qu'une telle situation ne se reproduise à l'avenir.
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Texte de la REPONSE :
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Les délais importants constatés dans l'exécution des jugements concernant les agents du ministère de la défense victimes de l'amiante ne traduisent nullement une réticence de la part de l'Etat à procéder à cette exécution. Ils résultent exclusivement de la complexité des modalités d'exécution et de la mise en place des crédits importants nécessités par les condamnations. En effet, dans de très nombreuses instances, les tribunaux des affaires de sécurité sociale accordent l'exécution provisoire des jugements, d'une part, pour le paiement de la majoration de la rente assortie des intérêts au taux légal qui s'y rattachent et, d'autre part, pour le paiement aux ayants droit, à concurrence de la moitié, de l'indemnisation des préjudices extrapatrimoniaux assortis des intérêts au taux légal à compter de la date de la demande de reconnaissance de la faute inexcusable. Selon la nature des indemnités allouées, plusieurs services sont appelés à intervenir pour leur calcul et leur montant et en assurer le paiement (service des pensions des armées, Caisse des dépôts et consignations, direction des affaires juridiques, contrôle financier ministériel, trésoreries générales). Concernant plus particulièrement l'affaire évoquée par l'honorable parlementaire, le règlement des sommes est intervenu et la partie adverse s'est déstinée devant le juge de l'exécution. De plus, les jugements des tribunaux des affaires de sécurité sociale, dont la mise en exécution a été ordonnée, écartent la prescription biennale résultant de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale. Cet article précise que les droits des victimes aux prestations et indemnités prévues au titre de la législation des accidents du travail se prescrivent par deux ans à dater du jour de l'accident, de la date de la première constatation médicale ou de la clôture de l'enquête. Or, cette position a été infirmée par la cour d'appel de Caen dans différents arrêts rendus les 22 novembre 1999, 3 janvier et 29 mai 2000. En outre, il a été constaté que le montant accordé par le tribunal des affaires de sécurité sociale à certains ayants droits, en réparation des préjudices, a été minoré par cette cour d'appel. Les décisions de cette juridiction risquent donc d'obliger l'Etat à devoir réclamer aux victimes et à leurs ayants droit le remboursement des sommes versées sur le fondement de jugements qui, tout en étant exécutoires, ne sont pas définitifs et ont été réformés par le juge d'appel. Il s'agit de situations particulièrement délicates qui doivent être évitées autant que possible. En effet, elles ne peuvent qu'engendrer l'incompréhension et être encore plus gravement préjudiciables à l'image de l'Etat, même si les intéressés sont systématiquement informés qu'ils peuvent être appelés à reverser les sommes indûment perçues si le jugement dont ils ont bénéficié n'était pas confirmé.
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