FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 41036  de  M.   Bascou Jacques ( Socialiste - Aude ) QE
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  intérieur
Question publiée au JO le :  07/02/2000  page :  812
Réponse publiée au JO le :  27/03/2000  page :  2025
Rubrique :  marchés publics
Tête d'analyse :  collectivités territoriales
Analyse :  travaux d'urgence. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Jacques Bascou attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les modalités de passation de marchés publics destinés à la réalisation de travaux d'urgence rendus nécessaires à la suite de catastrophes naturelles. L'article 104, ] 4, du code des marchés publics prévoit que des marchés négociés précédés d'une mise en concurrence, doivent être passés pour l'exécution des travaux, fournitures ou services dans les cas d'urgence impérieuse motivée par des circonstances imprévisibles. En outre, une jurisprudence de la Cour des comptes dans un jugement rendu le 7 avril 1999 estime que le caractère imprévisible et urgent de la commande de travaux, même s'il ne peut être contesté, n'exonère pas l'ordonnateur de passer ultérieurement un marché de régularisation après mise en concurrence des entreprises. Pourtant, dans les circonstances exceptionnelles des intempéries que nous avons récemment connu, la réalisation de certains ouvrages ou études en urgence est souvent rendue nécessaire pour faciliter les secours et sauver des vies humaines. Il est évident, d'autre part que ce simulacre de consultation organisée par les textes, ne favorise pas, aux yeux des entreprises et de l'opinion publique, la crédibilité d'institutions telles que la commission d'appel d'offres d'une collectivité publique et des élus qui la composent. Il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière.
Texte de la REPONSE : Les modalités de passation des marchés publics à la suite des intempéries ont fait l'objet d'une circulaire en date du 7 janvier 2000 qui a été adressée aux préfets. Cette circulaire distingue le cas des marchés passés dans les heures, voire les jours, qui suivent immédiatement la tempête de ceux commandés dans les semaines postérieures au sinistre. Dans le premier cas, face à l'urgence, et dans des situations tout à fait exceptionnelles, l'ordonnateur peut recourir à la réquisition d'une entreprise. La jurisprudence administrative admet que des situations exceptionnelles permettent d'écarter temporairement l'application des règles auxquelles l'administration doit normalement se conformer. L'autorité administrative peut être dispensée notamment de certaines règles légales qui compromettraient son action : règles de compétence, règles de forme et de procédure, règles de fond. Les actes pris dans ces circonstances doivent néanmoins être soumis à une légalité particulière dont le juge définit les exigences. Le juge contrôlera l'existence des circonstances exceptionnelles alléguées par l'administration. Le juge, dans chaque cas concret, décide si les circonstances invoquées méritaient vraiment cette qualification, et à partir de quel moment s'est opéré le retour à la normale. Dans le cadre de ses prérogatives de puissance publique, l'administration peut donc s'assurer le concours d'une entreprise moyennant indemnisation. La réquisition est un acte unilatéral, formalisé par un arrêté motivé. L'entreprise est obligée d'obtempérer, sauf à engager fortement sa responsabilité. Elle acquiert un droit indemnitaire et ne peut exiger la négociation de sa rémunération. Cette procédure intervient en dehors du cadre défini par le code des marchés publics. Le comptable procède au paiement au vu de l'arrêté de réquisition de l'entreprise, et éventuellement des pièces que celui-ci prévoit. Dans le second cas, c'est-à-dire s'agissant des commandes passées dans les semaines qui suivent le sinistre, le code des marchés prévoit, dans certaines de ses dispositions, la notion d'urgence. Pour les marchés de l'Etat, cette notion est définie aux articles 94, 96 et 97 du code. Les articles 94 (appel d'offres ouvert des marchés de l'Etat), 96 (appel d'offres restreint des marchés de l'Etat), 296 (appel d'offres ouvert des marchés des collectivités locales) et 298 bis (appel d'offres restreint des marchés des collectivités locales) prévoient qu'en cas d'urgence ne résultant pas de son fait la personne responsable du marché (respectivement le représentant légal de la collectivité) peut décider de ramener le délai de réception des offres dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres à quinze jours au moins. De même, le délai accordé pour remettre les offres à compter de l'envoi de la lettre de consultation, dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres restreint, peut être ramené à quinze jours au moins (article 97 pour les marchés de l'Etat et 299 bis pour les marchés des collectivités). En outre, l'article 104 I-4/ (étendu aux collectivités par l'article 308) permet de passer des marchés négociés précédés d'une mise en concurrence, pour l'exécution des travaux, fourniture ou services, dans les cas d'urgence impérieuse motivée par des circonstances imprévisibles ne permettant pas de respecter les délais prévus. Les dispositions de cet article nécessitent, d'une part, de s'assurer du caractère d'urgence impérieuse motivée par des circonstances imprévisibles, et d'autre part de respecter les règles de mise en concurrence dans le cadre d'un marché négocié. S'agissant de la notion d'urgence, elle fait l'objet d'un contrôle très strict par le juge administratif. Si l'urgence impérieuse existe et s'accompagne de circonstances totalement imprévisibles et indépendantes de l'administration, la procédure est régulière. La procédure d'urgence impérieuse pourra être utilisée lorsque l'accès à un bâtiment par le public est conditionné par des travaux de sécurité de première nécessité. Néanmoins, le recours à la procédure des marchés négociés n'exclut pas le respect des règles de mise en concurrence. Ainsi, la commission d'appel d'offres qui doit être convoquée dans les délais donne un avis motivé. Un dossier de consultation est remis ou envoyé à chaque entreprise mise en compétition. Le marché est signé, après négociation sommaire. En outre, dès lors que le seuil de 300 000 francs fixé par l'article 321 du code des marchés publics est dépassé, le paiement de la dépense imprévisible et urgente ne peut être effectué que dans le cadre d'un marché. Le comptable devra requérir toutes les pièces prévues à l'article 42 de la liste des pièces justificatives annexée au décret n° 83-16 du 13 janvier 1983 modifié. Un paiement effectué en l'absence de ces pièces engage sa responsabilité. La Cour des comptes a cependant admis, dans un jugement du 7 avril 1999, que l'ordonnateur pouvait passer une commande imprévisible et urgente sans marché, même au-delà du seuil de 300 000 francs ; cependant le juge a considéré que le caractère imprévisible et urgent de la commande n'exonérait pas l'ordonnateur de passer dès que possible un marché, ni le comptable d'exiger la production de ce marché pour en assurer le paiement (CC n° 22580 du 7 avril 1999, Syndicat intercommunal d'adduction d'eau potable du Haut-Chatelleraudais). Pour tous les autres travaux, les procédures normales prévues par le code des marchés doivent être respectées.
SOC 11 REP_PUB Languedoc-Roussillon O