FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 54777  de  Mme   Aurillac Martine ( Rassemblement pour la République - Paris ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  04/12/2000  page :  6825
Réponse publiée au JO le :  30/04/2001  page :  2629
Rubrique :  télécommunications
Tête d'analyse :  Internet
Analyse :  pédophilie. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : Mme Martine Aurillac appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'impact des nouvelles technologies sur les droits des enfants. Le 19 novembre, à Genève, a eu lieu la première journée contre l'abus des enfants, et le 20 novembre, dixième anniversaire de la convention des droits de l'enfant que la France a ratifiée, a été décrété désormais jour européen des droits de l'enfance. Or, dix ans après, les chiffres sont encore atterrants : 2 à 3 millions d'enfants prostitués dans le monde, 1,2 million de moins de quinze ans atteints du sida, 4 millions de contaminés, et sur le Net, déjà 40 000 sites pédophiles, relevant bien souvent de récidivistes, se servant de diverses couvertures et surtout de techniques sophistiquées permettant l'anonymat. Les ministres européens en charge de l'enfance, travaillent à cet égard, sur un plan commun d'actions, et l'on sait quel travail accomplissent beaucoup de bénévoles : Association mondiale des amis de l'enfance, Enfance et Partage, Mouvement mondial des citoyens pour la protection de l'innocence en danger, et tant d'autres. Mais ils ne peuvent pas tout. Au surplus, même s'il est malaisé de légiférer dans un domaine aussi volatil qu'Internet, les pouvoirs publics ont une responsabilité éminente vis-à-vis de nos enfants. En conséquence, face à cette vague nouvelle de pornographie et de pédophilie sur ce qu'on appelle désormais la toile, elle lui demande quelles sont les propositions qu'elle entend faire et les mesures qu'elle entend prendre dans les meilleurs délais.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux fait connaître à l'honorable parlementaire que la lutte contre les atteintes sexuelles commises à l'encontre des mineurs, et en particulier des actes de pédophilie facilités par le recours au réseau mondial qu'est l'Internet, font partie des préoccupations essentielles du Gouvernement. En premier lieu, il convient de rappeler que la loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions commises à l'encontre des mineurs à érigé en circonstance aggravante le fait d'utiliser, pour la diffusion de l'image ou de la représentation du mineur à destination d'un public non déterminé, un réseau de télécommunications tel Internet. Ainsi, aux termes de l'article 227-23 du code pénal, le fait de fixer, d'enregistrer ou de transmettre l'image ou la représentation d'un mineur lorsque cette image ou cette représentation a un caractère pornographique est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende. La diffusion d'une telle image, son importation ou son exportation est puni des mêmes peines, ces dernières étant porté à cinq ans et 500 000 francs d'amende lorsqu'il a été utilisé, pour la diffusion de l'image ou de la représentation du mineur à destination d'un public non déterminé, un réseau de télécommunications. En deuxième lieu, le conseil de sécurité intérieure en date du 13 novembre 2000, consacré à la question des atteintes et violences sexuelles sur mineurs, a affirmé clairement son intention de poursuivre ses efforts en vue d'une plus grande protection des enfants et d'une répression accrue de ces crimes et délits en améliorant à la fois la prévention, la détection des atteintes sexuelles à l'égard des mineurs, la prise en charge des enfants notamment durant l'enquête et enfin la répression et la coopération tant européenne qu'internationale afin de lutter notamment contre les infractions à caractère pédophile pouvant être facilitées par le réseau mondial qu'est Internet. A cet égard, il convient de souligner qu'un nouvel office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la télécommunication a été créé par décret interministériel n° 2000-405 du 15 mai 2000 afin de renforcer le dispositif répressif déjà en vigueur. Il est constitué notamment de l'office central pour la répression de la traite des êtres humains, de la division nationale pour la répression des atteintes aux personnes et aux biens chargés de lutter contre la pédophilie, de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie et du service technique de recherches judiciaires et de documentation de la gendarmerie nationale (STRJD). Cet office central a pour mission de traiter de manière spécifique la délinquance à caractère pédophile ou pornographique qui se développe sur la toile. Une veille opérationnelle permanente est ainsi organisée sur Internet et plusieurs opérations d'interception ont d'ores et déjà été effectuées. Lors du conseil de sécurité intérieure du 13 novembre 2000, le principe d'une adresse électronique mise en ligne pour que les internautes puissent signaler les sites à caractère illicite auprès de l'office central a été retenu et devrait se mettre en place prochainement. Par ailleurs, le service technique de recherches judiciaire et de documentation de la gendarmerie nationale (STRJD) comprend un centre national de surveillance du réseau Internet qui agit d'initiative ou au profit des unités en recherchant les infractions concernant les atteintes aux personnes par la diffusion de messages à caractère illicite. L'institut de recherche criminelle de la gendarmerie (IRCGN) réalise en outre des examens scientifiques et des expertises judiciaires et peut apporter un soutien technique aux enquêteurs. Enfin, le conseil de sécurité intérieure a annoncé la mise en place d'un groupe de travail interministériel, piloté par le ministère de la justice et relatif au traitement judiciaire des infractions sexuelles facilitées par le réseau Internet. Il est apparu en effet aux services de police judiciaire comme aux magistrats que le développement de ces technologies rendait plus complexe le traitement judiciaire de ces infractions, certains agissements pouvant être commis hors du territoire national ou s'inscrire dans un contexte plus large de criminalité organisée. Ce groupe interministériel de travail, associant les services de police judiciaire compétents en la matière, les administrations centrales des ministères concernés et des acteurs de terrain et intitulé « Internet et pédophilie », a été installé à la chancellerie en décembre 2000 et fonctionne actuellement sous forme de trois sous-groupes examinant les thèmes suivants : la prévention des infractions sexuelles sur Internet et les circuits de signalements des sites pédophiles, les moyens d'améliorer le traitement des enquêtes judiciaires en la matière, les perspectives législatives internes et les instruments juridiques internationaux en cours d'élaboration relatifs à la pédophilie commise via Internet. Ainsi, ce groupe interministériel de travail sera, à l'issue d'une approche complète, pragmatique et concertée, amené à rendre son rapport et émettre des propositions dans les prochains mois.
RPR 11 REP_PUB Ile-de-France O