FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 59679  de  M.   Montebourg Arnaud ( Socialiste - Saône-et-Loire ) QE
Ministère interrogé :  aménagement du territoire et environnement
Ministère attributaire :  aménagement du territoire et environnement
Question publiée au JO le :  09/04/2001  page :  2041
Réponse publiée au JO le :  15/10/2001  page :  5922
Rubrique :  publicité
Tête d'analyse :  réglementation
Analyse :  véhicules de transport de voyageurs ou de marchandises
Texte de la QUESTION : M. Arnaud Montebourg appelle l'attention de Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur les dispositions de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et pré-enseignes, intégrée au code de l'environnement en ses articles L. 581-15 et suivants et ses décrets d'application. Ces dispositions dressent le cadre législatif et réglementaire applicable à l'utilisation publicitaire des véhicules terrestres à moteur. L'article 6 de la loi du 29 décembre 1979 pose le principe de l'autorisation de la publicité sur les véhicules à l'intérieur des agglomérations. Hors agglomérations, toute publicité sur véhicules est interdite sous réserve de « zone de publicité ». Parallèlement, et indépendamment des dispositions de la loi de 1979, le décret du 11 février 1976 relatif à la publicité sur les voies ouvertes à la circulation publique réglemente l'utilisation du domaine public à des fins publicitaires. Son article 7 alinéa 1 dispose que « la publicité et les enseignes publicitaires et préenseignes sont interdites sur les voies ouvertes à la circulation publique, à l'exception de la publicité peinte ou fixée sur des véhicules circulant ou stationnant sur des voies ouvertes à la circulation publique ». Il existe donc un certain flottement quant à la règle applicable en matière de publicité sur des véhicules en dehors des agglomérations. Cette incertitude touche également la notion du caractère accessoire ou principal de l'utilisation publicitaire du véhicule, énoncé à l'article L. 581-15 du code de l'environnement : « La publicité sur les véhicules terrestres, sur l'eau ou dans les airs peut être réglementée, subordonnée à autorisation ou interdite, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Toutefois, les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables à la publicité relative à l'activité exercée par le propriétaire ou l'usager d'un véhicule, sous réserve que ce véhicule ne soit pas utilisé ou équipé à des fins essentiellement publicitares ». La notion du caractère accessoire ou principal de l'utilisation publicitaire d'un véhicule ne reçoit pas de définition légale et réglementaire. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer, à propos des dispositions de la loi 79-1150 du 29 décembre 1979, intégrées au code de l'environnement en ses articles L. 581-15 et suivants, et ses décrets d'application, quels sont les critères d'appréciation du caractère accessoire de l'utilisation publicitaire qui peut être faite d'un véhicule transportant des marchandises ou des personnes. Il lui demande également, et sans présager de la réponse à sa précédente question, de bien vouloir lui indiquer si une entreprise de marquage et/ou de location d'espaces publicitaires sur des véhicules de transport de marchandises ou de personnes peut librement exercer son activité sur le territoire national à partir du moment où l'utilisation publicitaire dudit véhicule reste l'accessoire de son utilisation principale.
Texte de la REPONSE : la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance avec intérêt de la question écrite relative aux critères d'appréciation et à la légalité de l'utilisation accessoirement publicitaire des véhicules de transport de personnes ou de marchandises par une entreprise de marquage ou de locations d'espaces publicitaires au regard des dispositions de l'article L. 581-15 du code de l'environnement et du décret n° 82-764 du 6 septembre 1982. Un examen attentif des textes applicables et des apports des jurisprudences pénales et administratives permet d'apporter les éléments de réponse suivants. Si la liberté d'affichage, procédant de la liberté d'expression, est rappelée comme un principe fondamental à l'article L. 581-1 du code de l'environnement, celle-ci est partiellement restreinte pour protéger le cadre de vie : « Chacun a le droit de s'exprimer et de diffuser informations et idées, quelle qu'en soit la nature, par le moyen de la publicité, d'enseignes et de préenseignes, conformément aux lois en vigueur et sous réserve des dispositions du présent chapitre (chapitre unique du titre VIII du livre V du code de l'environnement) ». S'agissant du contrôle de la publicité sur des véhicules, si celui-ci ne concerne pas la publicité relative à l'activité exercée par le propriétaire ou l'usager d'un véhicule qui peut s'analyser comme une enseigne, il concerne en revanche tous les véhicules qui sont utilisés ou équipés à des fins essentiellement publicitaires (cf. 2e alinéa de l'article L. 581-15 du code de l'environnement). En l'état actuel de la jurisprudence, le caractère essentiellement ou accessoirement publicitaire qui conditionne l'applicabilité du décret du 6 septembre 1982 à un véhicule s'apprécie au regard de l'équipement et de l'utilisation de celui-ci. S'agissant de l'équipement d'un véhicule, il emporte une qualification essentiellement publicitaire, même lorsque les publicités sont relatives à l'activité de son propriétaire, dès lors qu'il y a eu aménagement spécial pour recevoir de la publicité par modification de la carrosserie et que la taille du véhicule est disproportionnée avec celle requise pour les besoins de l'activité, que les slogans employés sont particulièrement tapageurs ou que la taille de la publicité dépasse 16 mètres carrés (CA Paris, 13e Ch., Sect. B 9/5/85 Boulinier, CA Paris 25/5/88 Almeida confirmé par Cass. crim. 3/5/89 Americo Almeida n° 88-85591). Quant à l'utilisation d'un véhicule, il arrive qu'il soit détourné de son usage initial (livraison, déplacements professionnels ou personnels, transport, dépannage, etc.) et circule ou stationne dans l'unique but de diffuser de la publicité. La jurisprudence est venue préciser certains points de la réglementation dans des cas semblables. Ainsi, par exemple : le tribunal administratif de Montpellier (3 avril 1989, SARL Quelennec contre préfet de l'Hérault, req. n° 8720973) a jugé qu'une camionnette de livraison stationnée et portant la mention « ouvert » en indiquant la direction à prendre pour se rendre au magasin, devait être regardée au lieu de constatation de l'infraction comme un véhicule utilisé à des fins essentiellement publicitaires, même s'il n'était pas équipé dans ce but et comportait une publicité relative à l'activité de son propriétaire. La Cour de Cassation a confirmé qu'une camionnette appartenant au propriétaire d'un restaurant et couverte de publicité au profit de son établissement, laissée en stationnement en travers d'un chemin d'exploitation à proximité d'une route nationale était immobilisée de manière à être vue par les automobilistes en un lieu choisi en vue de diffuser de la publicité au profit du restaurant et devait être regardée comme utilisée à des fins essentiellement publicitaires au moment de l'infraction (CA Besançon, chambre correctionnelle, 28/4/98, confirmée par Cass. crim. 1/6/99 Philipe Gille, n° 98-84866). Le problème aujourd'hui posé concerne le développement de dispositifs proposés par les sociétés de publicité qui visent le marché des véhicules particuliers ou de transport. Il s'agit d'utiliser comme support publicitaire un simple film micro-perforé apposé sur la lunette arrière ou la carrosserie des véhicules, spécialement étudié pour ne pas gêner la visibilité. Ce procédé est déjà utilisé sur les carrosseries et certaines surfaces vitrées des véhicules de transport en commun et des taxis, par certaines régies publicitaires. Si ces pratiques n'ont pas encore été examinées par un juge, on peut considérer que la société qui appose ces films publicitaires sur ces véhicules et loue des emplacements aux propriétaires de ces véhicules, aurait une démarche tendant à équiper ces véhicules à des fins essentiellement publicitaires, puisque c'est l'objet même de son activité. Toutefois, l'utilisation de ces véhicules par leurs propriétaires ou usagers, pourrait ne pas être considérée dans tous les cas comme équipés à des fins essentiellement publicitaires, dès lors qu'ils continueraient d'utiliser leur véhicule pour le transport de voyageurs, de marchandises ou pour leurs déplacements personnels. Le caractère essentiellement ou accessoirement publicitaire de l'équipement ou de l'usage du véhicule et la légalité de son utilisation devra donc s'examiner au regard des circonstances de temps, de lieu et des conditions de circulation du véhicule concerné. Il résulte que la publicité sur des véhicules terrestres n'est légale qu'à certaines conditions et que cette légalité s'apprécie au regard à la fois de l'équipement du véhicule au moment de l'infraction. Une entreprise qui compterait utiliser des véhicules de transport à des fins accessoirement publicitaires pourra donc exercer son activité dans le respect des limites posées par les textes et précisées par la jurisprudence. En revanche, un véhicule supportant de la publicité sans rapport avec l'activité de son propriétaire et équipé ou utilisé à des fins essentiellement publicitaires ne pourra circuler que dans les lieux où la publicité est autorisée. Enfin, en aucun cas, un véhicule ne pourra supporter plus de 16 mètres carrés de publicités au total. Par ailleurs, s'il est exact que les dispositions de l'article 7 du décret n° 76-148 du 11 février 1976, intégré depuis le 25 mars 2001 au code de la route (art. R. 418-5), ne font pas obstacle, au regard de la sécurité routière, à la présence de publicité circulant ou stationnant sur la voie publique, cette utilisation publicitaire des véhicules reste bien évidemment subordonnée aux dispositions applicables à ces véhicules en vertu du code de l'environnement et de ses textes d'application au nom de la protection du cadre de vie. Si des débordements trop importants étaient constatés dans l'utilisation publicitaire de véhicules professionnels, particuliers ou de transport de marchandises ou de voyageurs, qu'ils soient terrestres, aériens ou maritimes, et que les outils juridiques existants ne permettaient pas de faire face à toutes les situations, le ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement engagerait alors l'élaboration d'une réglementation plus restrictive et plus précise pour chaque type de véhicule.
SOC 11 REP_PUB Bourgogne O