FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 60858  de  M.   Accoyer Bernard ( Rassemblement pour la République - Haute-Savoie ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  14/05/2001  page :  2781
Réponse publiée au JO le :  01/10/2001  page :  5665
Erratum de la Réponse publié au JO le :  22/10/2001  page :  6097
Rubrique :  justice
Tête d'analyse :  indemnisation des victimes
Analyse :  dommages et intérêts. versement. procédure
Texte de la QUESTION : M. Bernard Accoyer attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les modalités de versement des dommages et intérêts aux victimes d'infraction pénale. Dans le cas de condamnation d'auteurs d'infractions pénales à verser des dommages et intérêts, les victimes doivent effectuer les démarches nécessaires au versement des sommes. Dans un premier temps, une action à l'amiable par l'intermédiaire d'une lettre recommandée avec un avis de réception doit être effectuée. Dans l'éventualité où cette première étape n'aboutit pas, la victime doit demander au greffe de la chambre correctionnelle une copie exécutoire du jugement et la remettre à un huissier de justice qui contraindra la personne condamnée à payer en effectuant des saisies. Il paraît paradoxal que la victime ait à faire valoir ses droits et à effectuer les démarches pour obtenir un dédommagement. En effet, ayant déjà subi un préjudice, elle est en plus contrainte d'engager une procédure qui peut s'avérer longue et quelquefois compliquée et dont les frais d'exécution relativement lourds demeurent, dans la plupart des cas, très largement à sa charge. Il lui demande si une simplification ne pourrait pas être envisagée afin que, lorsqu'une condamnation a été proclamé, la procédure de paiement des dommages et intérêts soit automatiquement déclenchée par la justice ou si, à défaut d'indemnisation de la victime par l'auteur de l'infraction, dans un délai fixé par le tribunal, les sanctions pénales pouvaient être alourdies.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'article 707 du code de procédure pénale dispose que le ministère public et les parties poursuivent l'exécution de la sentence, chacun en ce qui le concerne. Ainsi, l'Etat n'a pas la charge de faire exécuter lui-même les décisions rendues en faveur d'un justiciable. En effet, même lorsqu'elle déclenche ou se joint à l'action publique, la demande de la partie civile concerne toujours un intérêt privé. L'intérêt général et la protection des valeurs fondamentales de la société commandent que l'Etat assure la poursuite et la répression des délinquants, mais celui-ci ne saurait se substituer au citoyen dans les litiges à caractère privé. A cet égard, dans les affaires purement civiles, le justiciable qui obtient gain de cause ne voit pas la puissance publique se substituer à lui pour l'exécution de la décision de justice qui a reconnu son droit. Ce même type de règle s'applique donc à la victime ayant obtenu une décision concernant son action civile devant une juridiction répressive. Toutefois, l'Etat peut être amené à prêter son concours aux justiciables qui rencontrent des difficultés dans l'exécution de la décision dont ils sont bénéficiaires. En effet, la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution dispose qu'en cas de recherches infructueuses, le procureur de la République doit entreprendre, à la demande de l'huissier chargé de l'exécution, des recherches quant à l'adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur, ainsi que l'adresse de ce dernier comme de son employeur. En outre, les justiciables plus démunis sont susceptibles d'être aidés par la solidarité nationale. Il leur est en effet possible d'obtenir l'aide juridictionnelle, totale ou partielle, pour l'exécution d'une décision de justice depuis la loi du 3 janvier 1972, relative à l'aide judiciaire. De même, la juridiction répressive peut assortir la condamnation d'un sursis avec mise à l'épreuve prévoyant, sous le contrôle du juge de l'application des peines, l'obligation de réparer les dommages causés par l'infraction (art. 739 et suivants du code de procédure pénale). Par ailleurs, le régime d'indemnisation des victimes d'infractions a été très significativement amélioré depuis la loi du 6 juillet 1990, modifiant le code de procédure pénale et le code des assurances et relatives aux victimes d'infractions, entrée en vigueur le 1er janvier 1991. Ce texte a réformé en profondeur la procédure et les modalités de saisine des commissions d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI). Il a posé le principe du droit à réparation intégrale des dommages résultant d'atteintes graves à la personne. Tel est le cas pour les faits ayant entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité temporaire de travail au moins égale à un mois ainsi que pour les agressions sexuelles ou les viols. Il ne subordonne plus cette indemnisation à l'impossibilité d'obtenir, à un titre quelconque, une indemnisation effective et suffisante du préjudice subi. Corrélativement, le plafond du montant de l'indemnité susceptible d'être allouée par les CIVI a été supprimé. La loi permet également aux victimes de vols, escroqueries, abus de confiance et à celles victimes d'une atteinte à la personne dont l'incapacité totale de travail est inférieure à un mois, qui se trouvent du fait de l'infraction dans une situation matérielle ou psychologique grave, d'obtenir une aide de solidarité. La loi du 15 juin 2000, renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, a ajouté à cette liste la destruction, la détérioration ou la dégradation d'un bien et l'extorsion de fonds. Le président de la CIVI peut accorder une ou plusieurs indemnités provisionnelles en cours de procédure, à valoir sur l'indemnité finale. Les sommes allouées par les CIVI sont versées dans le délai d'un mois par le fonds de garantie, sans que les victimes aient à utiliser les voies d'exécution pour en obtenir paiement. L'intérêt des victimes constitue également une préoccupation constante de l'institution judiciaire dans la phase exécution des peines, pour amener les condamnés à mieux assumer les conséquences de leurs actes. C'est ainsi que les efforts faits par ces derniers pour le remboursement des victimes doivent être retenus par le juge d'application des peines comme l'un des principaux critères d'octroi des mesures d'aménagement de la sanction. Enfin, concernant les débiteurs qui cherchent à échapper à leurs responsabilités, l'article 314-7 du code pénal incrimine l'organisation ou l'aggravation frauduleuse de l'insolvabilité, délit susceptible d'être puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende. Il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'il n'est pas actuellement envisagé de modification des règles qui régissent l'exécution des décisions de justice rendues en faveur des victimes d'infractions pénales.
RPR 11 REP_PUB Rhône-Alpes O