FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 66514  de  M.   Jacquat Denis ( Démocratie libérale et indépendants - Moselle ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  01/10/2001  page :  5537
Réponse publiée au JO le :  19/11/2001  page :  6644
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  code pénal
Analyse :  prise illégale d'intérêts. maires. logement communal au profit d'un ascendant ou d'un descendant. champ d'application
Texte de la QUESTION : M. Denis Jacquat demande à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, de bien vouloir lui préciser si un proche parent (fils ou fille) d'un maire peut devenir locataire d'un logement communal, sans que ce maire ne commette, par personne interposée, le délit de prise illégale d'intérêt. Il souhaiterait notamment qu'elle lui précise si la dérogation figurant à l'alinéa 3 de l'article 432-12 du code pénal, qui permet à un maire d'une commune de 3 500 habitants au plus de conclure un bail d'habitation avec la commune pour son propre logement, est transposable à ses ascendants et descendants. Il la remercie de bien vouloir l'informer à ce sujet.
Texte de la REPONSE : La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'article 432-12 du code pénal interdit à des personnes exerçant des fonctions ou des missions publiques de se placer dans une situation où leur intérêt particulier serait en contradiction avec l'intérêt général. Cette interdiction répond au double objectif d'éviter, d'une part, qu'elles ne tirent profit de leurs fonctions dans leur intérêt personnel, et négligent ainsi l'intérêt public qu'elles doivent servir, d'autre part, qu'elles puissent seulement en être suspectées. Les maires sont personnellement chargés de la surveillance des affaires de la commune, et en conservent le contrôle, y compris pour les affaires pour lesquelles ils auraient accordé délégations à leurs adjoints, en vertu de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales. Ils doivent donc être considérés comme exerçant la surveillance et l'administration de l'ensemble des affaires communales au sens de l'article 4323-12 du code pénal. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, l'intérêt susceptible d'être pris en compte, pour la caractérisation du délit, peut être « matériel ou moral, direct ou indirect » (Cass. crim., 5 novembre 1998, Czmal). C'est ainsi qu'est coupable de prise illégale d'intérêt le maire, président d'un syndicat intercommunal, qui passe en cette qualité des marchés de travaux et de fournitures avec une société dont le dirigeant est son fils, mais dont il est le véritable maître et bailleur de fonds (Cass. crim., 2 novembre 1961, Bull. crim. n° 438), mais aussi la présidente d'un syndicat intercommunal qui participe en cette qualité à un vote au sein des commissions d'appel d'offres, attribuant des marchés publics à une société gérée par son fils, alors même qu'elle n'aurait pris dans l'opération qu'un intérêt moral (Cass. crim. 3 mai 2001 Ponzo Lucienne). Un maire peut ainsi être déclaré coupable de prise illégale d'intérêts non seulement dans l'hypothèse où il serait rapporté la preuve qu'il a, par interposition de personne, dissimulé l'intérêt personnel qu'il prenait en fait personnellement dans la conclusion d'un contrat de bail avec la commune, mais également dans l'hypothèse où un de ses proches louerait un bien appartenant à la commune alors même qu'il n'aurait aucun intérêt à l'opération, sinon purement moral. Certes, par dérogation aux principes posés à l'alinéa 1 de l'article 432-12 du code pénal, l'alinéa 3 du même article autorise les élus municipaux de communes comptant 3 500 habitants au plus, à conclure des baux d'habitation avec la commune pour leur propre logement. Mais il s'agit là d'une dérogation qui, en tant que telle, doit être interprétée strictement et ne saurait être étendue aux descendants d'un élu municipal. Dès lors, un descendant d'un maire ne saurait devenir locataire d'un logement communal sous peine pour l'élu municipal d'être poursuivi du chef de prise illégale d'intérêt.
DL 11 REP_PUB Lorraine O