FICHE QUESTION
11ème législature
Question N° : 6817  de  M.   Godfrain Jacques ( Rassemblement pour la République - Aveyron ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  24/11/1997  page :  4168
Réponse publiée au JO le :  27/04/1998  page :  2391
Date de signalisat° :  20/04/1998
Rubrique :  moyens de paiement
Tête d'analyse :  chèques
Analyse :  chèques impayés. procédure
Texte de la QUESTION : M. Jacques Godfrain attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le rejet à première présentation d'un chèque pour défaut de provision, ce qui génère un enchaînement solidaire de frais de toute nature, pour la banque présentateur, pour la banque tirée et pour le porteur bénéficiaire de l'impayé. Cependant, il s'avère que le remboursement de ces frais reste inéquitable. Se prévalant de leur position dominante, les banques se servent les premières en ponctionnant sans délai les comptes de leurs clients (émetteurs ou bénéficiaires des chèques impayés). Quant aux bénéficiaires de ces impayés, ils sont eux-mêmes laissés totalement démunis pour faire valoir leurs droits que la loi leur reconnaît explicitement. Les frais de toute nature supportés par les bénéficiaires, qu'ils soient commerçants, artisans ou pompistes, sont notamment ceux des frais de rejet de la banque (entre 60 francs et 90 francs par formule de chèque impayé) auxquels s'additionnent les frais de gestion comptable (contre-passation des écritures, rectifications des bordereaux de déclaration de la TVA collectée, extournes de la TIPP non encaissée, etc.), les frais de confection du courrier adressé au tireur en recommandé pour réclamer le remboursement amiable du préjudice causé. Or, le dernier alinéa de l'article 65-3 du décret-loi du 30 octobre 1935 modifié stipule que ces frais sont en tout état de cause à charge du tireur, l'émetteur défaillant du chèque. Si le solde du compte du tireur le permet, la seconde présentation du chèque impayé seul ne permet pas de demander au banquier tiré de payer tous ces frais ainsi que les intérêts de droit, sauf à utiliser l'allonge du chèque que le décret-loi prévoit en son article 16, avec le consentement du tireur pour un paiement global (cf. Code de commerce, édition Dalloz 97/98, p. 495, note 2, ss art. 16 et analyse de conformité Cabrillac « Annonces de la Seine » du 12 décembre 1996 citée). S'abritant derrière des prétextes pour protéger exclusivement leurs intérêts catégoriels, les banques refusent au bénéficiaire du chèque impayé l'utilisation de l'allonge, pourtant plus simple, moins onéreuse, reconnue par la loi et en doctrine, obligeant ledit bénéficiaire soit à recourir aux services très coûteux pour l'émetteur défaillant de certaines officines de recouvrement (filiales des banques, comme chèque-service), soit à mettre en oeuvre une procédure également extrêmement onéreuse, comme la saisie conservatoire pour l'obtention du paiement de ces frais. Il lui demande en conséquence ce qu'elle entend entreprendre pour que la loi soit enfin respectée pour les bénéficiaires et pour mettre un terme au désordre précipité.
Texte de la REPONSE : la garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'aux termes de l'article 65-3 dernier alinéa du décret loi du 30 octobre 1935 unifiant le droit en matière de chèques et relatif aux cartes de paiement, « les frais de toute nature qu'occasionne le rejet d'un chèque sans provision sont à la charge du tireur ». En revanche, le porteur du chèque impayé n'est pas fondé à réclamer au banquier tiré le paiement des frais. Ainsi, la Cour de cassation a rappelé, dans un arrêt du 21 octobre 1997, « qu'il ne résulte d'aucune disposition de la loi que la banque ait l'obligation, lors de la seconde présentation, de payer, outre le montant du chèque, les frais et intérêts » (Cass. Com., 21 octobre 1997, Dalloz affaires n° 43, 1997, chorniques p. 424). Si le compte présente une provision suffisante à seconde présentation, l'établissement tiré ne règle que le nominal du titre, non les frais de recouvrement exposés par le porteur ou les intérêts de retard. Dans le cas inverse, le tiré est seulement tenu, par application des dispositions de l'article 36 alinéa 2 du décret n° 92-456 du 22 mai 1992 de délivrer, sans frais pour le porteur, un certificat de non-paiement. Il résulte de ces dispositions que le porteur ne peut, en principe, obtenir le paiement des intérêts et frais que dans le cadre d'un recours exercé directement contre le tireur. L'article 45 du décret-loi du 30 octobre 1935 prévoit d'ailleurs que le porteur peut réclamer « à celui contre lequel il peut exercer son recours » (un garant en particulier le tireur, et non le banquier tiré qui a la qualité de débiteur principal) non seulement le montant du chèque impayé mais aussi les intérêts et les frais. Il est, toutefois, exact que le procédé de « l'allonge » évoqué par l'honorable parlementaire, création de la pratique, également connu sous le nom de « Modulo-chèque », est susceptible de permettre au porteur du chèque de recouvrer simultanément, sur seconde présentation, le montant nominal du chèque et des intérêts et frais. Le tireur donne mandat à son banquer d'acquitter les sommes supplémentaires réclamées, les indications nécessaires à leur paiement étant inscrites sur une « allonge » jointe au chèque par le bénéficiaire. Ce procédé ne semble pas, sous réserve de l'appréciation souveraine des cours et tribunaux, se heurter aux dispositions du décret-loi du 30 octobre 1935 déjà cité. En revanche, son utilisation soulève un certain nombre de difficultés pratiques et techniques qui ne permettent pas, en l'état, d'encourager sa généralisation. Une réflexion a, toutefois, été engagée sur le recouvrement des intérêts et frais que les procédures du droit commun, en raison de leur caractère souvent trop onéreux, ne permettent pas toujours d'assurer de façon satisfaisante.
RPR 11 REP_PUB Midi-Pyrénées O