FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 107450  de  M.   Morel-A-L'Huissier Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Lozère ) QE
Ministère interrogé :  intérieur et aménagement du territoire
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  17/10/2006  page :  10766
Réponse publiée au JO le :  19/12/2006  page :  13230
Date de changement d'attribution :  24/10/2006
Rubrique :  étrangers
Tête d'analyse :  immigration clandestine
Analyse :  lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur le phénomène migratoire, en particulier sur la stratégie de codéveloppement avec le pays d'origine mentionnée dans le discours de présentation du projet de loi relatif à l'immigration et l'intégration, qui a été définitivement adopté le 24 juillet 2006. Il souhaiterait qu'il lui indique avec force détails la nature de ces projets de codéveloppement et leur état d'avancement actuel. - Question transmise à M. le ministre des affaires étrangères.
Texte de la REPONSE : On entend par codéveloppement toute action d'aide au développement, quelle qu'en soit la nature et quel que soit le secteur dans lequel elle est réalisée, à laquelle participent des migrants vivant en France, quelles que soient les modalités de cette participation (celle-ci peut intervenir à une ou plusieurs étapes du projet : conception, étude de faisabilité, financement, réalisation, évaluation). Le codéveloppement qui constitue l'un des instruments à part entière de coopération pour le développement relève de la compétence des ministres des affaires étrangères et de la coopération. Depuis 2002, un ambassadeur est chargé spécifiquement de ce dossier sur le codéveloppement. Le codéveloppement peut concerner aussi bien les immigrés qui désirent retourner dans leur pays pour y créer une activité que ceux (hommes d'affaires, universitaires, médecins, ingénieurs notamment) qui, tout en étant durablement établis en France : soit sont disposés à investir dans leur pays d'origine pour y promouvoir des activités productives et y réaliser des projets sociaux (école, centres de santé, etc.) ; soit souhaitent faire profiter leur pays d'origine de leurs compétences, de leur savoir-faire et de leurs réseaux de relations. Les enjeux : les communautés de migrants représentent un potentiel qui peut être valorisé pour aider au développement de leur pays d'origine : par les fonds qu'ils rapatrient mais aussi par les qualifications, les compétences et les expériences que beaucoup d'entre eux ont acquis, souvent dans des domaines où leur pays en est déficitaire. Dans les pays d'accueil, les projets de codéveloppement peuvent contribuer à une bonne intégration. Les migrants qui participent aux programmes de codéveloppement sont, par ailleurs, des acteurs de développement, des « ponts » entre les deux espaces (pays d'origine et pays d'accueil), des « facilitateurs » qui contribuent au développement des relations bilatérales. La typologie des actions de codéveloppement ; la promotion de l'investissement productif ; Deux objectifs essentiels sont poursuivis : inciter les migrants à consacrer à l'investissement productif créateur d'emplois dans leur pays d'origine une part plus grande des fonds qu'ils rapatrient ; faciliter l'accès au crédit pour les micro-sociétés ou PME qui, souvent issues du secteur « informel », ont des marchés et sont capables de les satisfaire, mais ne peuvent mettre en valeur ces potentialités, faute des financements nécessaires à leur expansion. Le micro-crédit n'est plus suffisant pour leurs besoins, et les banques ne leur font pas encore confiance, parce qu'elles n'ont pas eu le temps de faire leurs preuves et ne disposent pas des garanties habituellement demandées (alors même qu'elles seraient en fait en mesure de rembourser un prêt). L'Agence française de développement intervient dans ce domaine du codéveloppement et de l'investissement. Les aides à la réinsertion Ces aides concernent des migrants désireux de retourner dans leur pays d'origine pour y créer une activité (petit commerce, agriculture, artisanat, taxi, etc.). Elles consistent en une contribution au financement (comprise entre 4000 et 7000 euros selon la qualité du projet), mais aussi - ce qui est essentiel et gage de succès - en conseil et en accompagnement pour la conception, la mise en oeuvre, le lancement et le suivi du projet. Si nécessaire, une formation est assurée. Le compte épargne codéveloppement s'intègre à cette logique. L'article 1, « Section 7 » de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, prévoit que « Les investissements autorisés à partir des comptes épargne codéveloppement [soient] ceux qui concourent au développement économique des pays bénéficiaires, notamment : a) la création, la reprise ou la prise de participation dans les entreprises locales ; b) l'abondement de fonds destinés à des activités de microfinance ; c) l'acquisition d'immobilier d'entreprise, d'immobilier commercial ou de logements locatifs ; d) le rachat de fonds de commerce ; e) le versement à des fonds d'investissement dédiés au développement ou des sociétés financières spécialisées dans le financement à long terme, opérant dans les pays visés au II. » La mobilisation des compétences des élites de la diaspora ; l'appellation DSTE (Diasporas scientifiques, techniques et économiques) tend à s'imposer pour désigner les élites hautement qualifiées des diasporas. Leur mobilisation peut intervenir sous forme de missions, qui peuvent être répétées à intervalles réguliers (des enseignants peuvent ainsi dispenser des cours, des médecins réaliser des opérations particulièrement délicates, des chercheurs diriger des thèses, etc.). La carte de séjour « compétences et talents » peut favoriser la mise en oeuvre de cet objectif. La carte compétence et talent, mise en place par l'article L. 315-1 de la loi sur l'immigration et l'intégration, a été élaborée pour concilier au mieux attractivité de la France et codéveloppement. Cette carte permet de faire venir en France dans des conditions favorables (autorisation de travailler et de faire venir sa famille) des personnes susceptibles de contribuer au rayonnement de la France et du pays dont elles ont la nationalité. Afin de tenir compte de notre stratégie de codéveloppement, cette carte ne sera renouvelable qu'une fois lorsque son titulaire a la nationalité d'un pays membre de la zone de solidarité prioritaire (ZSP). Par ailleurs, elle ne pourra être accordée à l'étranger ressortissant d'un pays appartenant à la ZSP que lorsque la France a conclu avec ce pays un accord de partenariat pour le codéveloppement ou lorsque cet étranger s'est engagé à retourner dans son pays d'origine au terme d'une période maximale de six ans. Projets d'aménagement local ; des cofinancements peuvent être consentis pour des projets que des associations de migrants envisagent de réaliser dans leur région d'origine, mais qu'elles ne sont pas en mesure de financer entièrement (école, centre de santé, électrification rurale, petits barrages agricoles, etc.) Les modes opératoires : le développement ne saurait être à lui seul l'instrument d'un règlement des problèmes migratoires. En outre, le lien entre transferts et croissance économique ne peut être généralisé et l'impact socio-économique de ces transferts est à nuancer. Par ailleurs, le codéveloppement ne peut prétendre couvrir tous les champs de l'aide au développement et se substituer aux outils classiques de l'aide au développement. En revanche, sa logique participative, permet de rendre les populations confiantes dans leurs capacités et dans leurs pays. Le codéveloppement s'inscrit dans une logique « participative ». La participation des migrants et de leurs associations mais aussi des populations locales, par le biais du codéveloppement, à notre action d'aide au développement est essentielle. Le FORIM (Forum des organisations de solidarité internationale issues des migrations) est, à cet égard, une institution exemplaire. Il est un lieu de concertation entre associations de migrants et administrations françaises sur la politique d'aide au développement. Parmi nos partenaires institutionnels privilégiés, figure l'AFD (Agence française de développement établissement public qui participe aussi à l'élaboration et à la réalisation de programmes spécifiques de codéveloppement : ainsi deux projets ont été mis en oeuvre au Maroc, visant pour l'un, à un appui au tourisme rural, et pour l'autre, à faciliter la création de PME par des migrants résidant à l'étranger. Le champ géographique. Des programmes sont en cours d'exécution ou en voie de démarrage avec quatre pays : Sénégal, Mali (premier programme expérimental engagé en 2003 ayant conduit à une évaluation positive), Maroc, Comores. Le choix de ces pays comme partenaires privilégiés a été déterminé par l'importance de leurs communautés vivant en France, le degré d'organisation de ces communautés (un minimum d'organisation facilite la définition et la mise en oeuvre des projets) et la volonté affichée par les gouvernements de ces pays d'associer leurs communautés vivant à l'étranger, à leur politique de développement. Un programme Cadre, ouvert aux pays d'Afrique subsaharienne membres de la Francophonie (plus l'Éthiopie, Haïti et le Vanuatu), permet d'élargir le champ géographique des possibilités de mise en oeuvre d'actions de codéveloppement dans les pays qui en expriment le souhait et si tous les acteurs adhèrent à cette démarche de codéveloppement. Par ailleurs, un programme spécifique en appui à la mobilisation des DSTE (Diasporas scientifiques, techniques et économiques) établies en France et originaires des sept pays suivants : Algérie, Maroc, Tunisie, Liban, Vietnam, Cambodge, Laos, sera mis en oeuvre dès que possible. Enfin, un programme Inter-Pares est en cours d'élaboration. Il vise à renforcer la mobilité des compétences. En conclusion, le codéveloppement se situe à la confluence de trois problématiques essentielles : les migrations internationales, la mondialisation, et le développement. Les défis qui se posent dans ces trois domaines concernent aussi bien les pays du Nord que ceux du Sud, et des solutions viables ne pourront être trouvées que dans le cadre du dialogue et du partenariat entre les États concernés, en associant les sociétés civiles à ce dialogue. Par ailleurs, la participation des migrants et de leurs associations, par le biais du codéveloppement, à notre action d'aide au développement contribue à mieux les intégrer, par les liens noués avec des services officiels et des associations françaises de solidarité.
UMP 12 REP_PUB Languedoc-Roussillon O