FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 110180  de  M.   Hage Georges ( Député-e-s Communistes et Républicains - Nord ) QE
Ministère interrogé :  écologie
Ministère attributaire :  écologie
Question publiée au JO le :  14/11/2006  page :  11730
Réponse publiée au JO le :  15/05/2007  page :  4494
Rubrique :  déchets, pollution et nuisances
Tête d'analyse :  déchets industriels
Analyse :  dépollution. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Georges Hage attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la responsabilité de Metaleurop dans la pollution de ses sites industriels. Elle concerne une trentaine d'installations sur le territoire national, dont Auby dans le Nord, Noyelles-Godault et Fouquières-lès-Lens dans le Pas-de-Calais. La loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages a introduit dans le code de l'environnement deux articles - L. 512-17 et L. 512-18 - qui prévoient l'obligation de remise en état des sites des entreprises polluantes après un arrêt définitif de l'exploitation. Or, la dépollution intervenue sur les terrains de Metaleurop, notamment à Auby, n'est pas l'oeuvre de l'entreprise industrielle. Les collectivités et des établissements publics s'y sont substitués. Metaleurop a donc délibérément violé la loi. Il ne doute pas que le Gouvernement ait engagé des recours, tant sur le plan civil que pénal. Il souhaiterait néanmoins savoir où en sont ces poursuites pour obtenir de Metaleurop le respect de la loi et les dispositions qu'entend prendre le Gouvernement afin que les sanctions soient à la mesure des responsabilités prises dans ces pollutions.
Texte de la REPONSE : La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative à la responsabilité de Metaleurop dans la pollution de ses sites industriels. La SAS Metaleurop Nord est une filiale à 99 % de la SA Metaleurop qui est elle-même détenue à 33 % par la société de droit suisse Glencore Finance Bermuda. À ce stade, il semble important de rappeler qu'il est difficile juridiquement de mettre en cause une société mère, à plus forte raison un actionnaire de cette dernière, sauf à démontrer l'immixtion dans les affaires de la filiale par la maison mère, ce que l'Etat a cherché à établir dans un premier temps. C'est pour cela que l'Etat et l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) ont demandé, par assignation en référé pour l'audience du 11 mars 2003 devant le président du tribunal de grande instance de Paris, de Metaleurop SA (société mère du groupe), Metaleurop Nord en liquidation judiciaire (société filiale du groupe et exploitante du site de Noyelles-Godault), Metaleurop commercial, Glencore lnternational AG, Glencore Finance LTD, TUI AG, KPMG SA et la société Deloitte Touche Tohmatsu ; d'ordonner une expertise comptable et financière permettant notamment d'apprécier les circonstances et conditions dans lesquelles ont été décidées la restructuration du site de Noyelles-Godault initiée en juillet 2002 ainsi que la cessation du financement de Metaleurop Nord ; de donner son avis sur la régularité, la sincérité et le caractère d'image fidèle des états financiers de Metaleurop SA, en particulier sur les provisions passées dans les comptes consolidés de Metaleurop SA, notamment dans le but de rechercher si les frais de remise en état du site de Noyelles-Godault et de ses alentours ont été provisionnés. Par ordonnance de référé du 21 mars 2003, le président du TGI de Paris a déclaré irrecevable la demande du ministère de l'écologie et du développement durable (MEDD) et de l'ADEME à l'encontre des sociétés du groupe Metaleurop et les a déboutés de leur demande d'expertise. Le juge des référés a estimé que les demandeurs n'avaient pas d'intérêt à agir à l'encontre des actionnaires du groupe, car le MEDD et l'ADEME ne détiendraient jamais quelque créance que ce soit à l'encontre des actionnaires de l'exploitant du site litigieux, et qu'ils ne pouvaient agir qu'à l'encontre de l'exploitant du site, selon le décret du 21 septembre 1977. Le MEDD et l'ADEME ont interjeté appel de cette ordonnance et par arrêt du 6 août 2003, la Cour d'appel de Paris a confirmé l'ordonnance de référé ayant débouté les demandeurs de la mesure d'expertise. Les actions possibles de la part de l'Etat sont donc épuisées. Suite à cet épisode, le Gouvernement a mené un travail de rédaction d'un projet de décret instituant des garanties financières pour les exploitations susceptibles de présenter un risque de pollution. En dépit des oppositions initiales et des difficultés liées à ce type de dispositif - d'ailleurs soulignées dans un rapport commandé à l'inspection générale de l'environnement et à l'inspection des finances - un projet de décret a pu être mis en consultation. Sa mise en oeuvre devrait permettre de disposer des financements nécessaires à la réalisation des travaux de mise en sécurité du site à l'arrêt de l'exploitation. Par ailleurs, la transposition de la directive n° 2004/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages environnementaux permettra de disposer d'une base d'intervention plus étendue pour mettre en cause les responsables de pollutions. En parallèle, les liquidateurs de la SAS Metaleurop Nord ont engagé une action aux fins d'extension de la liquidation à la SA Metaleurop pour fictivité et confusion des patrimoines. La cour d'appel de Douai, infirmant le jugement du tribunal de grande instance de Béthune, a retenu la confusion des patrimoines. Par arrêt du 19 avril 2005, la Cour de cassation a cassé cet arrêt au motif que la cour d'appel, qui ne statuait pas sur le fondement de l'article L. 624-3 du code de commerce, n'avait pas donné de base légale à sa décision en ne caractérisant pas en quoi, « dans un groupe de sociétés, les conventions de gestion de trésorerie et de change, les échanges de personnel et les avances de fonds par la société mère qu'elle avait constatés révélaient des relations financières anormales constitutives d'une confusion du patrimoine de la société mère avec celui de sa filiale ». Par arrêt du 1er octobre 2005 rendu sur renvoi après cassation, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Béthune en ce qu'il avait rejeté la demande d'extension fondée sur la confusion des patrimoines. Le 2 mars 2006, les liquidateurs de la SAS Metaleurop Nord ont assigné la SA Metaleurop en comblement de l'insuffisance d'actif, sur le fondement de l'article L. 624-3 (ancien) du code de commerce. lls demandent que celle-ci soit condamnée à supporter les dettes de la SAS Metaleurop Nord à hauteur de 50 000 000 euros. Au soutien de leur action, ils invoquent la qualité de dirigeant de fait de la SA Metaleurop et l'existence de fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif. L'affaire, qui devait être plaidée le 26 septembre 2006, a été renvoyée au 12 décembre 2006. Elle a été mise en délibéré jusqu'à fin février 2007. Le jugement rendu déboutait les liquidateurs de leur demande. Cela n'ouvre donc aucune nouvelle voie, pour l'instant, de recours pour l'Etat. Enfin, il convient de citer l'action initiée par d'anciens salariés de la société Metaleurop Nord devant le conseil des prud'hommes de Lens : audience reportée au 28 novembre 2006 pour la section Industrie et au 23 janvier 2007 pour la section Encadrement. Il s'agit des demandes d'indemnité déposées par 586 anciens salariés de la société Metaleurop Nord qui réclament chacun le versement d'une indemnité de 30.000 euros et d'une somme de 300 euros à titre de frais. Le Gouvernement sera très attentif aux suites de ces différentes affaires et étudiera précisément les décisions de justice pour déterminer si ces dernières lui ouvrent de nouvelles voies d'action. Enfin, pour prévenir les pollutions futures, le Gouvernement s'apprête à transmettre au Conseil d'Etat un projet de décret sur les garanties financières pour la remise en état des sites en fin d'activité. En conjonction avec les mesures prévues dans la directive sur la responsabilité environnementale et la réparation des dommages, ces mesures permettront d'assurer une meilleure disponibilité des fonds nécessaires au moment de la fin d'activité des sites pour les opérations de remise en état.
CR 12 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O