POLITIQUE DE L'IMMIGRATION
M. le président. La
parole est à M. Etienne Mourrut, pour le groupe UMP.
M. Etienne Mourrut. Monsieur le président, mes chers collègues, c'est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales que ma question s'adresse. Les Français vous sont reconnaissants, monsieur le ministre, d'avoir pris à bras-le-corps et avec l'efficacité qui vous caractérise la résolution des drames humains et sociaux que représente, tant pour les pays d'accueil que pour les pays d'origine, l'immigration clandestine. Pour autant, il est indéniable que l'immigration légale aboutit aussi, en son flux continu, à créer ou à renforcer de véritable ghettos dans certaines communes ou dans certains quartiers. L'héritage de la gauche, avec l'abrogation, en 1998, de certaines dispositions des lois Pasqua-Debré sur l'entrée et le séjour des étrangers en France a des conséquences néfastes sur la cohésion sociale dans de nombreuses communes et quartiers, particulièrement dans le Midi méditerranéen. Le Général de Gaulle lui-même, il y a plus de quarante ans, ne manquait pas d'insister sur la forme que devait revêtir l'immigration en France. « L'immigration doit rester, disait-il, une force d'appoint et ne jamais devenir une force de subdivision ». Tout dans sa vision et dans son discours servait les intérêts de la France et par là même la cohésion sociale.
Aujourd'hui, peut-on accepter que des regroupements familiaux se fassent dans des quartiers déjà considérés commes des ghettos ? Peut-on accepter que les attestations d'accueil, dont la procédure a été ramenée au rang de simple formalité par la gauche en 1998, aboutissent, dans une proportion non négligeable, à une immigration clandestine au terme du séjour ?
M. Jean-Claude Lefort. Et votre question ?
M. Etienne Mourrut. Les Français sont et restent un peuple généreux et hospitalier. ( «Pas vous ! » sur quelques bancs du groupe socialiste.) Pourtant, le 21 avril dernier, ils nous ont lancé un cri d'alarme.
M. le président. Monsieur Mourrut, pourriez-vous avoir l'amabilité de poser votre question ?
M. Etienne Mourrut. Nos concitoyens peuvent-ils compter, monsieur le ministre, sur un vrai débat sur l'émigration, sans tabou ni terrorisme intellectuel, en vue d'établir une rédaction adaptée de l'ordonnance du 2 novembre 1945, qui complèterait votre engagement fort contre l'immigration clandestine ? Et enfin, pour avoir une approche concrète...
M. le président. Cher collègue, M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a entendu votre question, et je lui donne la parole.
M. François Hollande. Ah, laissez-lui poser sa question !
M. Jean-Pierre Brard. Il n'y a qu'à deviner le reste !...
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, vous avez raison, la politique de l'immigration est un grand défi pour la France, et il faut que nous l'abordions dans toutes ses composantes.
D'abord, pour parvenir à une véritable intégration, il faut - enfin ! - engager une lutte efficace contre l'immigration clandestine, dont les premières victimes sont les étrangers en situation régulière. C'est pourquoi nous voulons nous réjouir de l'action des services de police, qui, dans la nuit du 23 octobre, ont démantelé, à Sangatte, le dernier réseau de trafiquants qui aidait des étrangers à s'introduire illégalement sur le territoire.
M. Dominique Paillé. Bravo !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Quarante Kurdes d'origine irakienne ont été mis sous les verrous, ce qui est une bonne nouvelle. Il n'y a aucune indulgence à avoir envers des comportements de ce type. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
Ensuite, la première frontière de la France est incontestablement Roissy.
M. Jacques Desallangre. C'est l'océan !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est pourquoi je proposerai au Premier ministre, avant la fin de l'année, une réforme profonde de l'organisation des services de sécurité de l'aéroport. Si nous voulons être efficaces, il faut agir en amont, dans les pays source en y plaçant, avec leur accord, des forces de police qui empêcheront que d'éventuels clandestins ne montent dans l'avion, plutôt que d'attendre, en France, qu'ils en descendent.
M. Richard Mallié. Très bien !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. C'est ce que nous avons fait en Roumanie où sept fonctionnaires de police sont démormais en poste.
Il faut également être plus accueillant et poser les véritables questions. Dans les Bouches-du-Rhône, un étranger a dû attendre plus de six ans pour obtenir une réponse à une demande de droit d'asile, alors que le délai officiel de rétention administrative est de douze jours.
M. Yves Bur. Scandaleux !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Cela n'a aucune signification, ni dans un sens ni dans un autre.
Enfin, il faudra avoir le courage - et cela ne me gêne pas de le dire devant la majorité -...
M. Bernard Roman. Nous, nous ne comptons pas ?
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. ... d'aller jusqu'au bout de certains débats qui n'ont pas été purgés par la gauche. Celle-ci aime parler de générosité, mais elle déteste la mettre en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.) Et je ne crains pas de dire devant la représentation nationale que ce n'est pas satisfaisant.
M. François Hollande. Nous ne pouvons pas accepter d'être traités ainsi !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Il en est ainsi de la pratique de la double peine, qui conduit à renvoyer dans leur pays d'origine - par exemple en Algérie - des gens qui en sont venus à l'âge de huit mois et qui vivent en France depuis trente ans.
Il faudra avoir le courage de changer cette pratique. (« Faites-le ! » sur quelques bancs du groupe socialiste.) La majorité, comme le pays, souhaite une politique d'immigration ferme, certes, mais également généreuse. Elle sera d'autant plus ferme, mesdames, messieurs les députés, que nous ne craindrons pas de la voir généreuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Jacques Desallangre. Régularisez ! Régularisez !