FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 15749  de  M.   Le Guen Jacques ( Union pour un Mouvement Populaire - Finistère ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  07/04/2003  page :  2639
Réponse publiée au JO le :  25/08/2003  page :  6722
Erratum de la Question publié au JO le :  14/04/2003  page : 
Rubrique :  déchets, pollution et nuisances
Tête d'analyse :  mer et littoral
Analyse :  hydrocarbures. naufrages des pétroliers Erika et Prestige. responsabilité
Texte de la QUESTION : M. Jacques Le Guen attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le système de responsabilité en matière de pollution maritime accidentelle par hydrocarbures. Les accidents de l'Erika et du Prestige ont mis en évidence des lacunes du régime international en vigueur. En effet, celui-ci est essentiellement fondé sur la notion de compensation et non sur celle de responsabilité et, de ce fait, ne conduit en rien à l'adoption de mesures préventives. Il serait donc souhaitable de refonder ce système de façon à ce que, d'une part, les propriétaires de pétroliers ne soient pas en mesure de limiter leur responsabilité en cas de faute ou de négligence et que, d'autre part, le mécanisme de recours en réparation permettre de poursuivre tous les acteurs concernés, au-delà des propriétaires enregistrés des pétroliers (gestionnaires, exploitants, affréteurs, assureurs). Il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement sur ces deux points.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux informe l'honorable parlementaire que le Gouvernement est conscient des lacunes que peut présenter le système actuel. Deux axes principaux de révision des conventions ont été souhaités par la France, rejointe en cela par l'Union européenne. Tout d'abord revoir de façon urgente le montant des sommes disponibles pour indemniser les victimes de tels sinistres. A cet égard un nouveau protocole, adopté sous l'égide de l'Organisation maritime internationale le 16 mai dernier, devrait permettre dès son entrée en vigueur de disposer au total d'une somme avoisinant un milliard d'euros par incident. Le Gouvernement présentera prochainement au parlement un projet de loi d'approbation de ce protocole. Le Gouvernement est également attaché à un réexamen des principes de responsabilité tels qu'ils figurent dans la convention de 1992 sur la responsabilité civile et sa position est la suivante : si la convention de 1992 apporte une protection aux victimes dans la mesure où, dans un secteur où la fragmentation des activités et la séparation des patrimoines conduisent à favoriser l'opacité des véritables acteurs du transport, elle désigne le propriétaire immatriculé comme responsable des dommages et ce bénéfice ne doit pas empêcher la recherche d'autres responsables dès lors qu'une faute peut être démontrée à leur encontre. Toutefois, il convient de replacer l'examen des clauses litigieuses de ces conventions dans le contexte du droit international du transport et plus particulièrement dans celui du transport maritime. De ce point de vue, force est de constater que la clause qui tend à retirer le bénéfice du droit à limitation seulement en cas de faute lourde est la règle générale, reprise dans toutes les conventions, qui traitent soit de la responsabilité du transporteur (convention de Varsovie de 1929 sur le transport aérien, ou convention sur la responsabilité civile pour les dommages causés au cours du transport de marchandises dangereuses par route, rail et bateaux de navigation intérieure [CRTD], à laquelle la France n'est toutefois pas partie), soit de celle du propriétaire, de l'armateur ou de l'affréteur (convention de 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes). Cette uniformité des régimes internationaux rend plus difficile l'exercice de révision dans un domaine spécifique et explique les réactions négatives qu'ont reçu les propositions françaises dans ce domaine, y compris de la part de nos principaux partenaires européens. Le débat reste cependant ouvert au sein du groupe de travail du FIPOL créé à la demande de la France. Il convient également d'avoir présent à l'esprit que ces négociations se déroulent au sein d'une organisation qui compte déjà plus de 84 États parties et que ce n'est que sur la base d'un consensus sur les modifications qui seraient apportées à la convention de 1992, qu'un tel protocole serait susceptible d'être adopté afin de garantir l'intégrité du système international. Sur le plan pénal, le délit de pollution marine involontaire est actuellement prévu par les dispositions de l'article L. 218-22 du code de l'environnement, lequel incrimine l'imprudence, la négligence ou l'inobservation des lois et règlements ayant eu pour conséquence un accident de mer, lorsque cet accident a entraîné une pollution des eaux territoriales, des eaux intérieures ou des voies navigables jusqu'à la limite de la navigation maritime. Ces dispositions s'appliquent en premier lieu à la personne du capitaine ou du responsable de la conduite ou de l'exploitation à bord du navire ou de la plate-forme qui a provoqué un tel accident ou n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'éviter. Cependant, il convient de noter que l'article L. 218-22 énumère une liste de personnes auxquelles l'infraction peut également être imputée, à savoir, le propriétaire, l'exploitant, le représentant légal ou dirigeant de fait, ou toute autre personne exerçant, en droit ou en fait, un pouvoir de contrôle ou de direction dans la gestion ou la marche du navire. A ce titre, la mise en cause pénale de personnes non expressément visées à cet article, tels par exemple un affréteur ou une société de classification, est juridiquement possible, dès lors qu'il est démontré que ces derniers ont exercé effectivement un pouvoir de contrôle ou de direction dans la marche du navire.
UMP 12 REP_PUB Bretagne O