Texte de la QUESTION :
|
M. Stéphane Demilly souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la nécessité d'instaurer un système de consigne pour les bouteilles de bière en verre, pour lequel il a déposé une proposition de loi. Les bouteilles de bière vides abandonnées dans la nature, qui représentent de très loin la majorité des bouteilles que l'on retrouve, constituent en effet un véritable fléau pour nos communes, et chaque semaine les services municipaux des villes et villages de France ramassent en quantité impressionnante des canettes jonchant les espaces publics, les chemins, ou encore le pied des murs et des édifices. Vestiges de libations sur la voie publique, ces canettes représentent une importante source de pollution, puisque le verre met très longtemps à se dégrader, sont un danger lorsque le verre est brisé et constituent un risque pour les récoltes des agriculteurs. Face à ce problème qui n'est pas spécifique à la France, d'autres pays, comme le Canada avec le dispositif Recyc-Québec, ont mis en place pour la collecte des bouteilles de bière en verre un système qui a fait ses preuves : celui de la consigne. C'est un système écologique, efficace et surtout citoyen. Qu'importe que la bouteille récupérée soit ensuite réemployée ou qu'elle soit recyclée, l'important est que la consigne incite financièrement le consommateur à la rapporter plutôt que de la jeter dans la nature, via un principe de dépôt de garantie remboursable au moment de l'achat. Il souhaite donc savoir si le Gouvernement entend faire inscrire l'instauration de ce système à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ou s'il entend prendre lui-même une initiative en ce sens.
|
Texte de la REPONSE :
|
INSTAURATION D'UN SYSTEME DE CONSIGNE POUR LES BOUTEILLES DE
BIERE EN VERRE M. le président. La parole
est à M. Stéphane Demilly, pour exposer sa question, n° 1623, relative à
l'instauration d'un système de consigne pour les bouteilles de bière en
verre. M. Stéphane Demilly. Madame la ministre de l'écologie
et du développement durable, c'est en tant que député, mais aussi en tant que
maire depuis dix-sept ans d'une ville de Picardie que je souhaite évoquer la
question de l'instauration d'un système de consigne pour les bouteilles de bière
en verre. Je ne suis pas un grand théoricien de l'environnement, mais un
praticien de l'écologie au quotidien. Je me fais en tout cas l'avocat des gestes
simples qui, additionnés les uns aux autres, contribuent aussi et de façon
concrète à préserver notre planète ! C'est ainsi que j'ai soutenu
l'interdiction au 1er janvier 2010 de la distribution aux consommateurs de sacs
de caisse en plastique non biodégradables. C'est ainsi également que je compte
prendre prochainement une initiative pour lutter contre le fléau que
représentent les emballages de fast-food abandonnés dans la nature. Mais la
question que je voudrais évoquer plus spécifiquement aujourd'hui est celle des
bouteilles de bière en verre. Depuis que j'ai déposé une proposition de loi
visant à ce que ces bouteilles soient obligatoirement consignées, il ne se passe
pas une semaine sans que des élus locaux, des agriculteurs, des randonneurs ou
d'autres habitants de ma circonscription ne m'en parlent pour saluer cette
initiative. Comme vous le savez, chaque semaine, les services municipaux des
villes et villages de France ramassent des quantités impressionnantes de
canettes de bière jonchant ça et là les espaces publics, les chemins, ou encore
le pied des murs et des édifices. Sans compter ce que les agriculteurs
retrouvent dans leurs champs, au risque de leur faire perdre des contrats avec
l'industrie agroalimentaire ! Certes, il existe d'autres emballages et
d'autres bouteilles que celles visées par ma proposition, mais ce sont les
canettes de bière qui figurent en première place, et de loin, du palmarès des
vestiges de la consommation extérieure. Et je le dis tout net, madame la
ministre : c'est devenu insupportable ! On me dit que réintroduire la
consigne est compliqué, qu'il y a des filières déjà en place, que d'importants
intérêts industriels sont en jeu. J'entends bien tout cela. Pour autant, le bon
sens doit l'emporter ! Que les bouteilles soient réutilisées ou qu'elles
soient recyclées, peu importe. L'essentiel est que, comme cela se pratique avec
succès dans d'autres pays tels l'Allemagne ou le Canada, le consommateur ait une
incitation financière, même modique, à rapporter ses bouteilles plutôt que de
les jeter dans la nature. Autrement dit, il faut que le prix d'achat
comprenne une sorte de dépôt de garantie de citoyenneté, qu'un geste civique
simple permettra de récupérer sous forme de monnaie sonnante et trébuchante ou
d'une déduction lors de l'achat suivant. Madame la ministre, ma question est
extrêmement simple : le Gouvernement entend-il faire inscrire l'instauration de
la consigne pour les bouteilles de bière en verre à l'ordre du jour de
l'Assemblée nationale, ou entend-il prendre lui-même une initiative de portée
plus générale en ce sens, par voie réglementaire ou parlementaire
? M. le président. La parole est à Mme la ministre de
l'écologie et du développement durable. Mme Nelly Olin,
ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le député,
vous évoquez un sujet qui fait l'objet de débats car il touche au quotidien des
Français : faut-il introduire la consigne pour certains emballages, notamment
les emballages en verre de certaines boissons ? Comme vous le savez, la
gestion des emballages ménagers s'est considérablement améliorée au cours des
quinze dernières années avec la mise en place du dispositif prévu par le décret
du 1er avril 1992 : les producteurs de produits emballés versent une
contribution à une société agréée par les pouvoirs publics qui apporte des
soutiens aux collectivités locales effectuant le tri sélectif des déchets
d'emballages. En tant qu'élue d'une grande ville, je sais à quel point les
maires sont impliqués dans la mise en pratique de l'écologie et du développement
durable au quotidien et je tiens à saluer leurs efforts insuffisamment
reconnus. Grâce à ces actions, la France a pu respecter en 2001 les objectifs
en termes de recyclage et de valorisation des déchets d'emballages fixés par la
Commission européenne en 1994. Ce dispositif a su évoluer vers une plus
grande efficacité : les deux sociétés agréées se sont enfin rapprochées, ce qui
permet une plus grande cohérence, et l'industrie du médicament, qui avait
jusqu'à présent son propre système de reprise, a décidé de rejoindre le
dispositif commun. Si ce bilan est globalement positif, les efforts doivent
néanmoins être poursuivis : il nous faut encore davantage recycler nos déchets
et, bien sûr, absolument éviter qu'ils ne soient abandonnés. Cela n'ira
évidemment pas sans une plus grande implication et une meilleure information de
nos concitoyens, donc un effort de pédagogie en leur direction. Aussi, et
comme je l'avais annoncé en septembre dernier, une convention sera signée demain
mercredi, notamment avec le ministère de l'emploi, l'Association des maires de
France et les sociétés agréées. Elle prévoit de faire passer de 1 300
aujourd'hui à 3 000 en 2008, le nombre d'ambassadeurs du tri chargés d'informer
les Français sur ce sujet. La mise en place d'un système de consigne pour
certains emballages, comme vous le proposez, permettrait effectivement d'assurer
un meilleur taux de retour des déchets d'emballages concernés et de sensibiliser
le consommateur, notamment pour réduire l'abandon de ces déchets. S'agissant
des sacs de caisse, des dispositifs reposant sur la consigne ou des principes
similaires sont mis en place par les enseignes, qui réduisent les quantités de
sacs jetables qu'elles distribuent à leur client, voire cessent de le faire. Les
éléments dont je dispose me laissent penser que l'objectif que j'avais fixé de
diminution par deux des quantités de sacs de caisse distribués gratuitement sera
bien atteint d'ici à la fin 2006. Concernant les emballages de boisson, les
implications sont plus lourdes pour les professionnels concernés comme pour les
consommateurs. Par exemple, il faut au préalable savoir si le consommateur
pourra rapporter l'emballage vide et récupérer la consigne dans n'importe quel
point de vente. Rendre obligatoire la consigne, c'est aussi faire peser sur
les producteurs la responsabilité de mettre en place une logistique assez
lourde. Une telle contrainte peut être jugée comme une entrave disproportionnée
aux échanges de biens et marchandises au sein du marché unique. C'est ce que
montre le cas d'un récent arrêt de la Cour de justice des communautés
européennes concernant le système de nos voisins allemands. Elle peut aussi
entraîner des surcoûts pour nos concitoyens. Au total, il me semble que
beaucoup d'incertitudes et d'interrogations méritent d'être éclaircies avant de
prendre une initiative dans le sens que vous préconisez. L'intérêt de votre
proposition est évident pour ce qui concerne la diminution des quantités de
déchets d'emballages de boissons abandonnés sur la voie publique mais les
inconvénients potentiels peuvent être importants. Un examen plus approfondi est
donc nécessaire, notamment au vu de l'expérience accumulée par certains de nos
voisins européens. Sachez en tout cas que je retiens votre proposition sur
laquelle nous allons à nouveau travailler. M. le président.
La parole est à M. Stéphane Demilly. M. Stéphane Demilly.
Merci, madame la ministre, d'avoir salué l'important travail effectué par les
collectivités locales en ce domaine. Je préside également une communauté de
communes qui a la compétence en matière de gestion des déchets ménagers. Bien
sûr, nous avons mis en place le tri sélectif et développé les points d'apport
volontaire. Mais face à la triste réalité que j'ai décrite, il faut aller
au-delà. Vous parlez de pédagogie à l'égard de nos concitoyens. Certes, la
prévention c'est bien mais ce n'est pas suffisant, sinon il n'aurait pas été
utile de placer des radars sur les routes ! Sans vouloir faire preuve de
pessimisme, il me paraît donc nécessaire de mener des actions un peu plus
exigeantes vis-à-vis des consommateurs. Enfin, vous dites que le dispositif
impliquerait une logistique lourde pour les producteurs. Ce ne sera pas
forcément pas le cas. Il est en effet possible de mettre en place un protocole
d'accord avec la distribution, voire la grande distribution. Je pense
véritablement que ces mesures, simples et de bon sens, seront efficaces. Je sais
aussi que des lobbies vont s'élever contre cette proposition de loi mais le bon
sens doit parfois savoir l'emporter.
|