Texte de la REPONSE :
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La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative aux travaux de préparation de la Charte de l'environnement. Pour répondre à l'engagement du Président de la République, exprimé à Orléans en 2001 et Avranches en 2002, de proposer aux Français une Charte de l'environnement adossée à la Constitution afin de fonder une nouvelle relation entre l'homme et la nature, conjuguant développement économique et respect des équilibres naturels, la ministre de l'écologie et du développement durable a proposé le 5 juin 2002 une méthode et un calendrier de travail, et la nomination, autour du professeur Yves Coppens, d'une commission composée d'élus, d'experts juridiques et scientifiques, de représentants des partenaires sociaux, des associations et des entreprises. Cette commission, installée par le Premier ministre le 26 juin 2002 pour proposer un contenu et évaluer les enjeux d'une charte en s'appuyant sur une très large consultation, a présenté le 8 avril 2003 à la ministre son rapport, rendu public le 15 avril 2003. Le rapport de la commission Coppens est centré sur un projet de loi constitutionnelle qui vise à faire de la protection de l'environnement une nouvelle étape des droits de l'homme, dont les objectifs et principes seraient énoncés dans une charte ayant une valeur équivalente à la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen de 1789 et au préambule de la Constitution de 1946. La commission Coppens considère que l'adoption d'une telle charte constitue une nécessité de notre temps, répondant à la fois à des enjeux décisifs pour l'avenir de l'humanité et à une attente sociale de plus en plus fortement exprimée. Ses travaux se sont appuyés sur une large consultation nationale, dont les multiples modalités ont eu pour objet d'entendre le plus grand nombre de citoyens. Un questionnaire sur les attentes et les propositions en matière d'environnement et à l'égard d'une charte constitutionnelle a été adressé, dès le mois d'octobre 2002, à 700 élus et personnalités politiques, associations, entreprises, organisations professionnelles et syndicales, experts et autorités administratives de niveau national. La moitié d'entre eux a répondu, suivie par 11 000 acteurs régionaux sur les 55 000 auxquels le même questionnaire a été adressé au mois de novembre. 1 500 internautes ont répondu spontanément au questionnaire sur le site Internet dédié à la charte, qui a également permis de recueillir près de 400 contributions sur un forum de discussions. Un sondage réalisé mi-janvier 2003 sur les attentes des Français en matière d'environnement et de cadre de vie a complété le recueil des opinions. Au-delà de l'expression individuelle des avis, il était important que la nouvelle étape du pacte social que constituera la Charte de l'environnement soit préparée par des débats sur les enjeux d'un tel texte et sur ce que les uns et les autres sont prêts à consentir pour participer à l'amélioration de la qualité de l'environnement. Tant au Conseil économique et social, dont l'avis a été sollicité par le Premier ministre, qu'au cours des quatorze assises territoriales, dont la première a été ouverte à Nantes le 29 janvier 2003 par le chef de l'État et dont le Premier ministre a clos la dernière de métropole le 25 février à Cergy-Pontoise, avant que se tiennent les quatre assises d'outre-mer, la démarche de consultation a été très bien accueillie et les échanges ont été sereins et constructifs. Précédées de débats thématiques dans les régions et de quatre groupes de discussions de citoyens, les assises ont été un moment fort de démocratie participative, permettant à environ 8 000 participants de confronter les principes du droit de l'environnement aux problèmes locaux les plus sensibles, d'en mesurer la pertinence et les limites. La consultation nationale a mis en avant différentes exigences : le souhait d'un acte politique fort pour une meilleure protection de l'environnement et son inscription dans la Constitution ; l'importance des devoirs de chacun pour protéger l'environnement et réparer les atteintes qui y sont portées ; l'importance des modes d'actions incitatifs dans les politiques d'environnement, qui doivent avoir pour objet de prévenir et réduire ce qui est dangereux ou nuisible pour la santé et de préserver la biodiversité et la qualité du patrimoine naturel ; la nécessité de redéfinir les principes placés en tête du code de l'environnement afin de les rendre plus compréhensibles et d'éviter les effets de blocages qu'ils pourraient avoir, particulièrement le principe de précaution ; la nécessité de solidarité entre les hommes et entre les territoires dans une perspective de développement durable ; l'importance de l'éducation, de la participation, de la recherche et de l'évaluation. La commission a tout d'abord souligné les évolutions profondes des relations qu'entretient désormais l'homme avec son milieu naturel. Malgré les progrès technologiques considérables, ce dernier reste dépendant de la nature, mais son impact sur elle n'a jamais été aussi fort. Ses capacités scientifiques et techniques, le développement économique donnent à l'humanité les moyens d'influer durablement sur l'ensemble de la planète. Cet impact grandissant sur les conditions de la vie sur terre se traduit aujourd'hui par des effets néfastes dont fort heureusement la prise de conscience se généralise : changement climatique, amincissement de la couche d'ozone, contaminations de l'air et de l'eau, diminution de la biodiversité et fragilisation des écosystèmes. Il est par ailleurs loin d'être acquis que les services écologiques actuellement rendus par les écosystèmes puissent être systématiquement reproduits de manière artificielle. Ces interrogations doivent donc conduire à la prudence. Cette prudence se fonde sur la conscience que les dégradations actuelles interviennent selon un rythme et avec une ampleur sans doute jamais connus. Désormais un impact massif est exercé sur la biosphère et on commence à peine à déceler les risques qui peuvent en découler. Ces évolutions défavorables n'ont toutefois pas un caractère inéluctable et dépendent de choix économiques et sociaux. La commission souligne à cet égard que le choix collectif du développement durable comme orientation fondamentale du mode de développement constitue le cadre essentiel des propositions qu'elle formule. L'autre perspective forte pour la commission consiste en la reconnaissance de l'environnement comme patrimoine commun des hommes qui fonde une responsabilité particulière, une responsabilité écologique partagée. Ce caractère à la fois patrimonial et commun reconnu au milieu naturel permet ainsi de fonder une nouvelle génération de droits et de devoirs. Issue de la consultation nationale, en particulier des travaux de la commission présidée par le professeur Yves Coppens, la Charte pose des principes constitutionnels sur lesquels pourra s'appuyer un véritable droit de l'environnement, avec pour objectif plus d'efficacité dans la lutte contre les atteintes à l'environnement et dans la mise en oeuvre du développement durable. C'est dans ce sens que le ministre de la Justice, garde des Sceaux, a présenté le mercredi 25 juin 2003 en conseil des ministres le projet de loi constitutionnelle relatif à la Charte de l'environnement. Il modifie, pour la première fois depuis 1958, le préambule de la Constitution afin d'inscrire la troisième génération des droits de l'homme au même rang que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui a consacré les droits civils et politiques et le préambule de la Constitution de 1946 qui a reconnu les droits économiques et sociaux. La Charte de l'environnement de 2003 à laquelle renverra le préambule de la Constitution représente ainsi une nouvelle étape dans la construction du pacte républicain. Les droits et devoirs en matière d'environnement s'imposeront à tous : pouvoirs publics, législateur, entreprises, citoyens, administrations... La Charte, qui affirme le droit pour chacun de vivre dans un environnement équilibré et favorable à sa santé, définit les devoirs de prévention et de réparation. Elle précise les conditions de mise en oeuvre par les autorités publiques du principe de précaution, consacre l'intégration de la préservation de l'environnement dans l'ensemble des politiques publiques, qui doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la nation. Elle consacre également le droit à l'information des citoyens ainsi que leur droit à participer aux décisions ayant un impact sur l'environnement.
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