FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 18951  de  M.   Roubaud Jean-Marc ( Union pour un Mouvement Populaire - Gard ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  26/05/2003  page :  4030
Réponse publiée au JO le :  14/07/2003  page :  5688
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  code pénal
Analyse :  irresponsabilité pour troubles psychiques. réforme. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Jean-Marc Roubaud appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les dangers de l'article 122.1 du code pénal. Cet article permet la remise en liberté de certains malades assassins sans contrôle de la justice, en provoquant une détresse des victimes qui sont à nouveau en danger. Des récidives ont souvent été à déplorer. Aussi, il serait nécessaire de modifier l'article 122.1 pour que toutes décisions relatives à l'impunité pénale soient le fait d'une juridiction ou d'un tribunal ; qu'il existe un débat contradictoire, et ceci en toute gratuité, pour tous les crimes de sang, afin d'établir les responsabilités de l'entourage ; qu'il y ait un cadre juridique pour protéger les victimes et interdire aux auteurs de s'approcher de celles-ci ; qu'il y ait un véritable suivi médical de ces malades. Il lui demande s'il envisage de prendre en considération cette modification.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait avant tout connaître à l'honorable parlementaire qu'il est particulièrement sensible à la prise en compte des intérêts et de la sécurité des victimes lorsqu'est envisagé, à l'issue d'une information judiciaire, un non-lieu justifié par le trouble mental de l'auteur des faits, jugé pénalement irresponsable en application des dispositions de l'article 122-1 du code pénal. II est dans ce cadre particulièrement attaché à la bonne articulation entre les missions des services judiciaires et celles des services médicaux quant à la prise en charge de ces auteurs de crimes. Or, il lui apparaît que la construction juridique aujourd'hui mise en place pour appréhender ces situations est satisfaisante. En premier lieu, quant à l'information des victimes, l'article 167-1 du code de procédure pénale prévoit que la notification des conclusions d'une expertise tendant au prononcé d'un non-lieu pour trouble mental doit être effectuée « dans les conditions prévues par le premier alinéa de l'article 167 », ce qui signifie que le juge d'instruction doit convoquer les parties civiles et leur avocat pour les aviser oralement des conclusions de l'expertise et qu'il ne peut se contenter de leur adresser ces conclusions par lettre recommandée. Bien évidemment, cette notification orale, qui peut se faire en présence de l'expert, ne dispense pas le juge de remettre aux parties une copie intégrale du rapport, comme l'exige le premier alinéa de l'article 167. Elle permet en revanche au juge d'instruction d'expliquer de façon appropriée le sens de l'expertise aux victimes et de recevoir leurs déclarations. Par ailleurs, l'article 167-1 prévoit que si les parties civiles demandent une contre-expertise, celle-ci est de droit et ne peut donc être refusée par le juge. En second lieu, en cas d'appel de l'ordonnance de non-lieu, l'article 199-1 du code de procédure pénale prévoit que, lorsque la partie civile le demande, la personne mise en examen doit personnellement comparaître, si son état le permet, devant la chambre de l'instruction, et les débats doivent avoir lieu en séance publique. Ces dispositions permettent ainsi à la victime de faire valoir ses observations tant devant le juge d'instruction que devant la chambre de l'instruction. Enfin, la loi du 9 septembre 2002 a inséré dans la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique un article 9-2 instaurant la gratuité de l'accès à la justice pour les victimes de certains crimes. Ainsi, cette nouvelle disposition prévoit que la condition de ressources n'est pas exigée des victimes de crimes d'atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne prévus et réprimés par les articles 221-1 à 221-5, 222-1 à 222-6, 222-8, 222-10, 222-14 (1° et 2°), 222-23 à 222-26, 421-1 (1°) et 421-3 (1° à 4°) du code pénal, ainsi que de leurs ayants droit pour bénéficier de l'aide juridictionnelle en vue d'exercer l'action civile en réparation des dommages résultant des atteintes à la personne. Il en résulte que les membres de la famille d'une victime de l'une de ces infractions voient d'une part les frais d'avocat pris en charge par l'Etat lorsqu'ils se constituent partie civile et d'autre part n'ont pas à verser de caution lorsqu'ils déposent plainte avec constitution de partie civile. Par ailleurs, le constat de l'irresponsabilité de l'auteur principal d'une infraction n'entraîne pas la fin des investigations. Certes, d'une manière générale, il ne saurait y avoir pour un même dommage cumul entre une infraction volontaire et une infraction involontaire. Toutefois, lorsque l'auteur d'un homicide est déclaré irresponsable sur le fondement de l'article 122-1 du code pénal, c'est-à-dire en raison de son absence de volonté, l'homicide volontaire n'existe plus. Il appartient alors au magistrat compétent, en procédant à tous les actes d'investigations nécessaires à l'établissement des circonstances de la commission des faits dont il est saisi, de vérifier dans ce cadre si les éléments constitutifs de l'homicide involontaire peuvent être réunis à l'encontre de tel individu ou éventuellement de telle personne morale. Il est dès lors tenu de rechercher l'ensemble des responsabilités, directes ou indirectes qui pourraient être établies. Toutefois, en application des dispositions de l'article 121-3 du code pénal, il est nécessaire, pour que la responsabilité pénale de l'auteur indirect d'un dommage puisse être engagée, que celui-ci ait soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée dont il savait qu'elle exposait autrui à un risque d'une particulière gravité. Cette responsabilité indirecte pourra notamment être recherchée par le procureur de la République au stade de l'enquête, dans la mesure où cette dernière doit par nature être complète quant au champ d'investigation, que ce soit au niveau des faits ou au niveau des personnes qui peuvent être mises en cause. Lorsqu'une instruction est ouverte, le juge d'instruction étant saisi in rem, il lui appartient, en l'absence de responsabilité directe, de conduire les investigations nécessaires à l'établissement éventuel de responsabilités indirectes. Enfin, quant à la prise en charge de l'auteur des faits, en cas de non-lieu, relaxe ou acquittement, les articles L. 3213-7 et L. 3213-8 du code de la santé publique font obligation aux autorités judiciaires, qui estiment que la personne déclarée irresponsable pourrait compromettre l'ordre public ou la sûreté des personnes, d'aviser d'une part le préfet, qui prend sans délai toute mesure utile, ainsi que d'autre part la commission départementale des hospitalisations psychiatriques. Le préfet, au vu d'un certificat médical circonstancié, prononce une hospitalisation d'office. Il ne peut ensuite être mis fin aux hospitalisations d'office prononcées dans ce cadre que sur décisions conformes de deux psychiatres, n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le préfet sur une liste établie par le procureur de la République après avis de la direction départementale de l'action sanitaire et sociale. Ces deux décisions d'experts doivent résulter de deux examens séparés et concordants et doivent établir que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui.
UMP 12 REP_PUB Languedoc-Roussillon O