FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 28764  de  M.   Francina Marc ( Union pour un Mouvement Populaire - Haute-Savoie ) QE
Ministère interrogé :  budget
Ministère attributaire :  budget
Question publiée au JO le :  24/11/2003  page :  8889
Réponse publiée au JO le :  10/02/2004  page :  1023
Rubrique :  politiques communautaires
Tête d'analyse :  libre circulation des capitaux
Analyse :  réglementation. réforme
Texte de la QUESTION : M. Marc Francina attire l'attention de M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire l'article 464 du code des douanes. En effet, celui-ci dispose que toute personne physique qui transfère vers l'étranger ou en provenance de l'étranger des sommes, titres ou valeurs d'un montant supérieur à 50 000 francs (7 500 euros), ou à leur valeur en devises étrangères, est tenue d'établir une déclaration près des services de la douane française. La Commission européenne considère que cette incrimination et surtout la sanction corrélative sont contraires aux dispositions de l'article 6-5 de la directive 88-361 CE du 24 juin 1988 relative à la libre circulation des capitaux. Ainsi, si le traité de l'Union européenne autorise les États membres à prévoir des procédures de déclarations de mouvements de capitaux à des fins d'informations administratives ou statistiques ou à prendre des mesures liées à l'ordre public ou à la sécurité publique, la Commission européenne de Bruxelles a rappelé que « ces procédures de déclarations ne doivent pas constituer ni un moyen de discrimination arbitraire, ni une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux et des paiements ». A cet égard, la Commission de Bruxelles considère que la sanction imposée par les articles 463 et suivants du code des douanes est précisément contraire à la libre circulation des capitaux, en ce qu'elle constitue une discrimination arbitraire et une restriction déguisée à cette libre circulation des capitaux et des paiements. La Commission européenne a du reste mis en demeure la France de modifier son code des douanes. Elle a indiqué que si ce pays ne s'exécutait pas, la Commission saisirait la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE). La Commission européenne a insisté sur le critère de proportionnalité et constaté que, dans le cas d'espèce, la sanction normalement prévue et appliquée conduit à la négation même de la liberté fondamentale du mouvement des capitaux, de sorte qu'il s'agit d'une mesure manifestement disproportionnée. La Commission européenne a finalement saisi la CJCE d'un recours en manquement. Toutefois, les autorités françaises ont proposé un projet d'amendement modificatif des dispositions des articles 463 et suivants du code des douanes, lequel projet faisait l'objet d'une analyse technique par les services concernés, dans le cadre d'un projet de modification du cadre légal régissant l'obligation de déclaration des moyens de paiement, destiné à rendre celui-ci conforme au droit communautaire. Malgré cette absence de conformité des dispositions internes au droit communautaire, les juridictions de l'ordre judiciaire, quel que soit leur degré, persistent à appliquer avec rigueur les articles 463 et suivants du code des douanes, en écartant les dispositions européennes, normativement supérieures. En conséquence, considérant cette absence de conformité au droit communautaire, il souhaiterait connaître les mesures qu'il envisage de prendre pour faire cesser l'application des dispositions du code des douanes contraires au droit européen, tant par l'administration des douanes que par les juridictions de l'ordre judiciaire. D'autre part, il lui demande si le projet d'amendement proposé par les autorités françaises à la Commission européenne peut être rendu public et si oui dans quel délai.
Texte de la REPONSE : L'article 464 du code des douanes prévoit une obligation de déclaration des transferts de capitaux vers l'étranger ou en provenance de l'étranger, par les personnes physiques, lorsque leur montant est supérieur à 7 600 euros. Les manquements à cette obligation sont sanctionnés par l'article 465 du même code qui prévoit la confiscation du corps du délit ou d'une somme équivalente et une amende comprise entre un quart et une fois le montant de la somme sur laquelle porte l'infraction ou la tentative d'infraction. Il convient de souligner que ni la Cour de justice des Communautés européennes ni la Cour de cassation n'ont jugé cette obligation contraire aux dispositions communautaires relatives à la libre circulation des capitaux. La Cour de cassation a en particulier considéré dans un arrêt du 29 mars 2000 que « l'obligation prévue à l'article 464 du code des douanes entre dans les prévisions de l'article 73 D, paragraphe 1 b) devenu l'article 58, paragraphe 1 b) du traité CE (...). Cette obligation et les sanctions prévues à l'article 465 du code des douanes, qui ont été instituées notamment en vue de la lutte contre le blanchiment des capitaux, laquelle figure parmi les objectifs de la Communauté européenne, sont conformes au principe communautaire de proportionnalité ». S'agissant de la Cour de justice des Communautés européennes, elle a jugé le dispositif français conforme au droit communautaire, notamment dans un arrêt du 23 février 1995 (affaire C-358/93). A la suite de l'avis motivé du 27 juillet 2001, par lequel la Commission a demandé aux autorités françaises de revoir le dispositif de sanctions applicable aux manquements à l'obligation déclarative des sommés titrés ou valeurs d'un montant supérieur ou égal à 7 600 euros, un projet de modification de l'article L. 152-4 du code monétaire et financier (CMF) a été présenté, dans le cadre du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité organisée. Dans le souci de mettre un terme à la procédure engagée par la Commission, au motif que la législation française serait de nature à constituer une entrave à la liberté de mouvement des capitaux, ce projet d'article supprime la peine de confiscation actuellement prévue et réduit l'amende au quart de la somme sur laquelle a porté l'infraction. Ces sanctions sont assorties de la possibilité de consigner la totalité de cette somme, pendant un délai de trois mois renouvelable une fois, sur autorisation du procureur de la République, durée pendant laquelle les agents des douanes pourront rechercher lés éléments de nature à établir le lien entre l'auteur du manquement à l'obligation déclarative et des infractions douanières. Si un tel lien est établi, la somme consignée pourra, dès lors, être saisie et sa confiscation pourra être prononcée. Le projet de loi modifie l'article L. 152-4 du CMF. La disposition équivalente dans le code des douanes (article 465) sera modifiée par voie de décret d'incorporation. Le projet d'article L. 152-4 du CMF, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale, le 26 novembre 2003, figure à l'article 11-V du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité organisée. Il peut être consulté sur les sites de l'Assemblée nationale et du Sénat. Ce texte devrait donc être applicable dans le courant de l'année 2004.
UMP 12 REP_PUB Rhône-Alpes O