FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 33641  de  M.   Lurel Victorin ( Socialiste - Guadeloupe ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  17/02/2004  page :  1165
Réponse publiée au JO le :  25/05/2004  page :  3849
Date de signalisat° :  18/05/2004 Date de changement d'attribution :  31/03/2004
Rubrique :  système pénitentiaire
Tête d'analyse :  détenus
Analyse :  conditions de détention. regroupement ethnique
Texte de la QUESTION : M. Victorin Lurel attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les critères pris en compte dans la distribution cellulaire des détenus. Il ressort en effet des dispositions réglementaires en vigueur (articles D. 88 et 91 du code de procédure pénale notamment) que, si ce placement relève du chef de l'établissement pénitentiaire, celui-ci doit, dans la mesure du possible assurer un emprisonnement individuel et, à défaut, séparer les prisonniers en « catégories ». Cette répartition par « catégories » doit s'entendre comme visant à assurer un regroupement des prisonniers selon leur langue, habitude culturelle et de vie, afin d'assurer la meilleure gestion carcérale possible selon sa réponse (JO Sénat du 6 novembre 2003 p. 3289) faite à la question écrite n° 08690 du 31 juillet 2003 de M. le sénateur Dreyfus-Schmidt. Cette répartition se fait donc, en général, selon l'origine géographique du détenu. Il ressort cependant de simple constatation sur place, notamment à la maison d'arrêt de la Santé, que ce tri selon l'origine géographique des détenus peut aboutir à des aberrations consistant à placer dans le même bloc des détenus selon leur seule couleur de peau et non selon leur lieu de naissance et d'habitudes linguistiques et culturelles. Il apparaît ainsi que des Français, parce qu'ils sont d'origine maghrébine, sont placés systématiquement avec des personnes arrivant directement de pays du Maghreb, ou que des Français, parce qu'ils sont antillais, sont systématiquement placés avec des personnes issues de l'Afrique noire. De tri des détenus selon leur origine géographique, linguistique et culturelle, la répartition aboutit alors à un tri ethnique selon la seule couleur de peau du détenu. En conséquence, et suite aux différentes actions judiciaires ayant abouti à révéler ce système, il lui demande de bien vouloir l'informer des instructions qu'il a adressées aux chefs d'établissements ou des modifications textuelles qu'il envisage, afin de remédier à ce qu'il convient de nommer un tri ethnique contraire à nos principes et valeurs constitutionnels.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de confirmer à l'honorable parlementaire qu'il n'existe pas de principe de répartition au sein des établissements pénitentiaires fondée sur la nationalité, les origines ou les caractéristiques ethniques des détenus. Cependant, comme il l'a rappelé, le code de procédure pénale dispose précisément en son article D. 91 que « le choix des détenus à placer en commun et leur répartition à l'intérieur de chaque maison d'arrêt incombent personnellement au chef de l'établissement », et en l'article D. 88 que « toutes les précautions utiles doivent être prises pour éviter que leur promiscuité n'entraîne des conséquences fâcheuses. Au surplus, dans la mesure du possible, il convient d'assurer l'emprisonnement individuel de certains détenus et, pour les autres, de les séparer par catégories ». En conséquence, pour des raisons de meilleure gestion de la population pénale, afin d'éviter l'isolement de certains détenus étrangers ne pouvant communiquer dans une autre langue que la leur et afin de prévenir des difficultés ou des conflits liés à de trop grandes différences culturelles et d'habitudes de vie, les chefs d'établissement et, par délégation, leurs représentants en détention, peuvent décider de répartir les détenus selon leurs origines géographiques, mais non de manière systématique. L'affectation qui dans la majorité des cas répond à la demande personnelle du détenu est décidée au cas par cas et peut être réexaminée puis changée. C'est pourquoi, la plainte déposée en juillet 2000 par l'association SOS-Racisme pour discrimination raciale à l'encontre du directeur de la maison d'arrêt de Paris-La Santé au motif d'une prétendue répartition par ethnie au sein des bâtiments de la maison d'arrêt avait été suivie d'une ordonnance de non-lieu rendue par le magistrat instructeur le 17 juillet 2003 qui a été confirmée par la chambre d'instruction. Saisie à son tour, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu un n arrêt de non-admission du pourvoi le 11 mai 2004. Cette décision est donc définitive. Le ministre de la justice précise en conséquence à l'honorable parlementaire que l'administration pénitentiaire n'a pas donné de nouvelles instructions aux chefs d'établissement, ni envisagé de modifications textuelles, qui ne sont pas en l'état nécessaires, compte tenu du respect par les fonctionnaires pénitentiaires en charge de l'affectation en cellule des détenus, des principes et valeurs constitutionnels.
SOC 12 REP_PUB Guadeloupe O