FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 43732  de  M.   Aeschlimann Manuel ( Union pour un Mouvement Populaire - Hauts-de-Seine ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  13/07/2004  page :  5265
Réponse publiée au JO le :  23/11/2004  page :  9251
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  récidive
Analyse :  lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Manuel Aeschlimann appelle la bienveillante attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'importance du nombre de récidives. En effet, force est de constater que des carences tant juridiques, humaines et matérielles contribuent à ce que des individus qui ont fait l'objet d'une condamnation soient amenés à récidiver. En effet, la législation et plus particulièrement le régime juridique de l'application des peines semble ne plus assurer pratiquement et efficacement sa fonction dissuasive et répressive. En conséquence, il lui demande d'une part quelles mesures il entend prendre pour éviter les récidives et d'autre part quelles garanties notamment humaines et matérielles il entend mettre en place pour permettre un traitement efficace des dossiers et une meilleure considération des droits de la victime. En bref, il souhaiterait avoir connaissance des garanties qu'il entend concrètement proposer aux justiciables pour éviter que des faits divers retracent régulièrement dans la presse des atrocités commises par des personnes condamnées et remises en liberté sans surveillance et suivi pénal.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice fait connaître à l'honorable parlementaire que la prévention de la récidive est au centre des préoccupations du ministère de la justice. En ce sens, nonobstant les récents faits d'actualité, il a la conviction que la libération conditionnelle, et plus largement les aménagements de peine, en évitant une sortie sans préparation et sans contrôle judiciaire, demeurent un outil important pour prévenir la récidive. Il tient ainsi à rappeler à l'honorable parlementaire que la procédure de libération conditionnelle n'a aucun caractère d'automaticité et s'inscrit au contraire au coeur du principe d'individualisation de la peine. En effet, d'une part, elle est le plus souvent précédée de plusieurs cycles de permissions de sortir dont le principal intérêt est de tester les capacités de réinsertion de la personne. D'autre part, cette mesure d'aménagement de la peine répond à des critères rigoureux fondés sur les efforts de réinsertion sociale manifestés par le condamné : comportement en détention, suivi psychologique ou psychiatrique pour les auteurs d'infractions sexuelles ou les condamnés atteints de troubles du comportement, indemnisation des parties civiles, caractère adapté et cohérence du projet de sortie. Dans le même sens, l'expertise psychiatrique, diligentée en amont de la décision d'octroi d'une libération conditionnelle, permet de connaître la dangerosité de la personne et le risque éventuel de récidive. Ainsi, dans ce souci de prévenir toute commission de nouvelle infraction dans le cadre de la libération conditionnelle, l'arsenal législatif actuel rend obligatoire le recours à cette expertise psychiatrique dans un nombre non négligeable de cas. Ainsi, sur la délicate question des délinquants sexuels, la loi du 1er février 1994 puis celle du 17 juin 1998 a complété l'article 722 du code de procédure pénale relatif aux mesures d'aménagement de peine en indiquant que les personnes condamnées pour meurtre et assassinat précédés de viol, tortures ou actes de barbarie perpétrés à l'encontre d'un mineur, ou pour viol simple ou aggravé, agression sexuelle ou atteinte sexuelle ne peuvent se voir accorder une mesure d'aménagement de peine ou une permission de sortir sans expertise psychiatrique préalable. L'expertise doit être réalisée par trois experts lorsque la personne a été condamnée pour viol, meurtre ou assassinat d'un mineur de 15 ans. Dans les autres cas, la faculté laissée au juge de l'application des peines de diligenter une expertise lorsqu'il l'estime nécessaire est amplement utilisée en particulier pour les longues peines et quelle que soit l'infraction à l'origine de la condamnation. Par ailleurs, les éléments produits par le condamné à l'appui de sa demande d'aménagement de peine font l'objet d'une vérification systématique par les services de police ou de gendarmerie : enquête sur le certificat d'hébergement et sur le contrat de travail ou la formation envisagée. Quant à la prise en compte des victimes, il faut savoir que le juge de l'application des peines a toujours eu la possibilité, sur le fondement de l'article D116-1 du code de procédure pénale, d'entendre les victimes ou de les faire entendre par les services de police ou de gendarmerie. La loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité entend néanmoins renforcer les droits des victimes dans la phase post-sententielle. Ainsi, dans le cadre de l'article 712-16 du code de procédure pénale qui confie, à compter du 1er janvier 2005, des attributions nouvelles aux juridictions de l'application des peines, ces dernières peuvent, avant toute décision sur un éventuel aménagement de peine, informer les victimes qu'elle peuvent présenter leurs observations par écrit. Dans le même sens, l'article 720 du code de procédure pénale indique que lorsqu'en matière de libération conditionnelle il existe un risque que le condamné puisse se trouver en présence de la victime ou de la partie civile et qu'une telle rencontre paraît devoir être évitée, la juridiction interdit au condamné d'entrer en relation avec elle de quelque façon que ce soit. A cet effet, la juridiction adresse à la victime un avis l'informant de cette mesure et de la révocation de la libération conditionnelle qu'encourt le condamné s'il ne la respecte pas. Enfin, la prévention de la récidive, dans le cadre des aménagements de peine se fonde également sur le renforcement du contrôle judiciaire à l'issue de l'incarcération. La durée de la libération conditionnelle ne pouvant pas être supérieure à la durée de la peine non exécutée prolongée d'un an dans un maximum de dix ans, la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a ouvert à la juridiction de jugement la possibilité d'allonger la durée du suivi socio-judiciaire qui pourra utilement prendre la suite des mesures d'aide et de contrôle de la libération conditionnelle et ainsi soumettre le condamné à un contrôle le plus long possible.
UMP 12 REP_PUB Ile-de-France O