Texte de la QUESTION :
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M. Daniel Paul appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les récentes mesures gouvernementales concernant le contrat de partenariat public-privé (PPP) qui remettent gravement en cause la profession d'architecte. Ce dispositif institué par l'ordonnance du 17 juin 2004 déroge au code des marchés publics et à la loi MOP. II consacre le retour en force des procédures de conception-réalisation qui favorisent la dévolution de la commande à des entreprises mandataires avec maîtrise d'ouvrage intégrée, effaçant ainsi la phase de conception indépendante. Ces mesures, qui semblent avoir été prises dans un contexte de préoccupation financière sous la pression des grandes entreprises du BTP, ne permettront plus aux architectes de répondre aux appels d'offres d'ouvrages publics, réduisant de ce fait les conditions et le champ de leurs interventions. Ces nouvelles procédures marginalisent la réflexion et les études, rompent le dialogue direct entre les maîtres d'ouvrage et les architectes, menacent à terme le rôle de l'architecture dans le cadre de vie des Français et la qualité globale et durable du cadre bâti. D'autres conséquences de ce contrat PPP sont à craindre, tels que l'inéluctable déstructuration du tissu économique du bâtiment (PME, artisans, industriels...) et les risques de dérives financières induites par la remise en cause de projets insuffisamment élaborés. Il lui demande donc d'aménager l'ordonnance du 17 juin 2004 afin que la mission de l'architecte soit respectée telle qu'elle est définie dans la loi MOP, de la conception jusqu'au suivi de chantier.
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Texte de la REPONSE :
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La loi d'habilitation sur la simplification du droit du 2 juillet 2003 a autorisé le Gouvernement à créer par ordonnance de nouvelles formes de contrats intégrant la conception, la réalisation, la transformation, l'exploitation et le financement d'équipements publics, ou une combinaison de ces différentes missions. Elle a également posé de strictes conditions en matière de transparence. Créé par l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004, le contrat de partenariat se distingue clairement des procédures de conception-réalisation, lesquelles sont régies par l'article 37 du code des marchés publics, et il ne remet pas en cause le principe de séparation des activités de conception et de construction. À cet égard, il convient d'abord de préciser que l'ordonnance précitée ne déroge en aucun cas à la loi sur l'architecture n° 77-2 du 3 janvier 1977, qui trouve toujours à s'appliquer dans le cadre des contrats de partenariat. Par ailleurs, et pour répondre aux exigences de la loi d'habilitation d'un accès équitable des architectes aux contrats de partenariat, l'ordonnance propose deux voies : d'une part, elle laisse ouverte la possibilité de conclure un contrat de partenariat qui ne comprendrait pas la conception des ouvrages. Dans ce cas, les règles traditionnelles concernant l'intervention des architectes s'appliquent. D'autre part, quand un contrat global est conclu, elle organise un mécanisme particulier qui reconstitue un lien privilégié entre la personne publique et l'architecte. On peut relever que le système mis en place dans l'hypothèse où la personne publique choisit - ce qu'elle n'est jamais obligée de faire - de confier au cocontractant la maîtrise d'ouvrage est un système bien plus protecteur pour l'architecte que celui qui existe aujourd'hui en matière de concessions. Au surplus, les règles de la commande publique s'appliqueront à la personne publique pour le choix du concepteur, avec l'organisation de concours d'architecture pour les bâtiments neufs d'une certaine importance. Enfin, l'ordonnance précitée prévoit en son article 12 des dispositions spécifiques destinées à assurer la qualité architecturale de l'ouvrage. S'agissant des craintes exprimées vis-à-vis des petites et moyennes entreprises (PME) et artisans, il sera rappelé que, tout au long des négociations avec les secteurs économiques concernés, les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie se sont attachés à donner un contenu concret à leur accès équitable à cette nouvelle forme contractuelle. C'est ainsi que l'article 8, alinéa 3, de l'ordonnance susvisée dispose que, parmi les critères d'attribution du contrat, « figurent nécessairement le coût global de l'offre, des objectifs de performance définis en fonction de l'objet du contrat et la part d'exécution du contrat que le candidat s'engage à confier à des petites et moyennes entreprises et à des artisans ». Cette rédaction est reprise à l'article L. 1414-9 du code général des collectivités territoriales (CGCT) applicable aux contrats de partenariat conclus par ces collectivités ou leurs établissements publics. Pour permettre à la personne publique de vérifier que les PME et artisans peuvent effectivement être associés, dans toute la mesure du possible, à ces contrats, les articles 11, f et 14 (lequel a inséré un nouvel article L. 1414-12-f au CGCT) de l'ordonnance précitée imposent ainsi la présence dans le contrat de partenariat de clauses relatives « aux modalités de contrôle par la personne publique de l'exécution du contrat, notamment du respect des objectifs de performance, ainsi que des conditions dans lesquelles le cocontractant fait appel à d'autres entreprises pour l'exécution du contrat, et notamment des conditions dans lesquelles il respecte son engagement d'attribuer une partie du contrat à des petites et moyennes entreprises et à des artisans ». Cette précaution, voulue par le législateur, permettra en temps utile à la personne publique d'assurer sur le titulaire du contrat un contrôle des conditions dans lesquelles cette part sera éventuellement attribuée. Par ailleurs, les PME et artisans ont, comme toutes les autres entreprises, la possibilité de se porter candidats à des contrats de partenariat, notamment par le biais de la constitution d'un groupement d'entreprises, l'ensemble du tissu économique ayant ainsi vocation à bénéficier de cette nouvelle forme contractuelle qui constitue de fait un débouché supplémentaire. Ainsi que l'a reconnu la section du contentieux du Conseil d'État dans sa décision du 29 octobre 2004 rejetant plusieurs recours dirigés contre l'ordonnance du 17 juin 2004 : « Aucune disposition de l'ordonnance attaquée ne fait obstacle à ce qu'une petite ou moyenne entreprise se porte candidate, notamment dans le cadre d'un groupement d'entreprises, à l'attribution d'un contrat de partenariat. » Enfin, le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2004-506 DC du 2 décembre 2004 a déclaré l'ensemble du dispositif conforme à la Constitution. S'agissant des risques de dérives évoqués, il faut rappeler que le recours à un contrat de partenariat est très précisément encadré par son texte fondateur, dont l'article 2 énonce ainsi qu'il ne peut être conclu que pour la réalisation de projets pour lesquels une évaluation, à laquelle la personne publique procède avant le lancement de la procédure de passation, « expose avec précision les motifs de caractère économique, financier, juridique et administratif, qui l'ont conduite, après une analyse comparative, notamment en termes de coût global, de performance et de partage des risques, de différentes options, à retenir le projet envisagé ». L'article 8 dispose quant à lui que « le contrat est attribué au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus avantageuse ». Enfin, les clauses que doivent comporter tout contrat de partenariat, qui sont précisées à l'article 11 de l'ordonnance, et notamment l'obligation de distinguer dans la rémunération du co-contractant les parts relatives aux coûts d'investissement, de fonctionnement et de financement, offrent toutes les garanties de transparence nécessaires.
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