Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Claude Bois appelle l'attention de M. le ministre de l'écologie et du développement durable sur les dégradations physico-chimiques des eaux destinées à la consommation. Adopté en première lecture par l'Assemblée nationale en janvier 2002, le précédent projet de loi sur l'eau fut abandonné par le gouvernement Raffarin. Mais devant la détérioration généralisée du milieu aquatique et des ressources en eau, le Gouvernement semble avoir enfin compris l'intérêt manifeste de l'ambition affichée par la réforme globale de la politique de l'eau du gouvernement Jospin et c'est ainsi que la France s'engage dans l'élaboration d'une nouvelle loi sur l'eau et envisage de réformer son dispositif de gestion en matière d'eau et environnement. Il est regrettable de constater que les lois sur l'eau se suivent mais les pollutions demeurent ou s'aggravent. C'est ainsi que les habitants de quinze villages du Pas-de-Calais ont été privés d'eau toute une semaine et la région a subi 18 alertes de ce type en 2004 et ce, à chaque fois, pour cause de pollution, d'abord d'origine agricole, puis industrielle et domestique avec les sérieuses conséquences sanitaires qui auraient pu en résulter. Mais ce département n'est malheureusement pas le seul concerné par ces événements. La réforme de la politique de l'eau doit donc répondre à l'urgence de la situation car la tâche n'est pas négligeable à l'exemple des pollutions diffuses agricoles et notre pays doit, en premier lieu, respecter les directives européennes. Selon la directive nitrates de 1991 qui délimite les zones dites « vulnérables », la France s'était engagée à faire régresser ces zones. Aujourd'hui, les zones vulnérables ont augmenté et représentent la moitié du territoire national. Comment en aurait-il été autrement puisque le flux des engrais et du lisier poursuit sa dangereuse croissance ? Le ministère de l'agriculture estime d'ailleurs à 714 000 tonnes l'excédent annuel d'azote. La surfertilisation est la principale source d'alimentation des 714 000 tonnes qui polluent les nappes, les cours d'eau et les mers. Cette situation dégradée est supportée par tous les Français car, en supprimant la redevance sur la pollution par les nitrates, et sachant que l'agriculture française est subventionnée à hauteur de 11 milliards avec un gaspillage d'engrais d'environ 430 millions d'euros, l'Europe, par son astreinte financière, applique à la France le principe pollueur payeur, idée majeure de la loi Jospin qui ciblait les vrais responsables du mauvais état écologique des nappes, des cours d'eau et des mers de l'hexagone. Cette disposition va à l'encontre du principe d'équité entre les différents usagers et de la déclaration fort remarquée du Président de la République, le 3 mai 2001, au cours de laquelle il réclamait la contribution de chacun, sans exception, à l'effort financier général pour la préservation de notre capital « eau » Cette suppression augure mal de l'avenir ainsi d'ailleurs que les mesures d'écoconditionnalité de la PAC qui régulent la surfertilisation. Au vu de l'état de notre environnement, on ne peut se permettre d'attendre. La France, comme tous les autres pays, ne peut plus se permettre d'atermoyer, l'or bleu n'est pas une richesse intarissable. Il ne faut pas oublier que dans certains pays les gens se battent et parfois se tuent pour avoir la possibilité d'accéder à un point d'eau, cet élément est indispensable à toute vie. Même si, aujourd'hui, la situation n'est pas aussi catastrophique en quantité, elle l'est sans aucun doute en qualité. Il lui demande solennellement quelles mesures urgentes et efficientes il a l'intention de mettre en oeuvre qui démontrent enfin l'ambition politique du Gouvernement dans ce domaine et qui concilient les nécessités écologiques et les impératifs économiques.
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Texte de la REPONSE :
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La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question concernant le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques. Le projet adopté en conseil des ministres le 9 mars 2005 vient d'être approuvé en première lecture par le Sénat le 14 avril 2005. Il viendra prochainement en discussion à l'Assemblée nationale. Ce projet de loi crée les conditions qui permettront d'atteindre l'objectif ambitieux de bon état écologique des eaux de nos cours d'eau, lacs, nappes souterraines et eaux littorales d'ici à 2015. Cet objectif a été fixé par la directive européenne cadre sur l'eau du 23 octobre 2000. Le projet de loi rénove tout d'abord l'organisation institutionnelle en renforçant le poids des comités de bassin. Les sénateurs ont augmenté la part de représentants des élus locaux dans les comités de bassin au détriment de celle des représentants de l'État. Ils ont proposé une organisation plus déconcentrée pour le fonctionnement des instances de bassin. Le dispositif des redevances des agences de l'eau est rendu compatible avec le droit constitutionnel par la définition, au niveau de la loi, d'assiettes de redevances et de fourchettes de taux. Ce dispositif doit permettre de continuer à financer pour environ 2 milliards d'euros par an la politique de l'eau. Ni le Gouvernement ni le Sénat n'ont retenu le principe d'une taxe ou d'une redevance sur les engrais, considérant que l'application de la conditionnalité environnementale au versement des aides de la politique agricole commune constituera une incitation financière suffisante pour les agriculteurs, sans qu'il soit nécessaire de les pénaliser financièrement par ailleurs. Une nouvelle redevance sur les produits phytosanitaires remplace par contre la taxe globale sur les activités polluantes portant sur ces produits. Son produit sera affecté aux agences de l'eau. La lutte contre la pollution par les résidus de pesticides constitue d'ailleurs une priorité explicite. Des plans d'action contre les pollutions diffuses par les engrais et les pesticides dans les secteurs sensibles seront mis en place. Une traçabilité des ventes des produits phytosanitaires sera établie et un contrôle technique périodique des pulvérisateurs utilisés pour leur application sera instauré. Au niveau national, le conseil supérieur de la pêche est transformé en Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), chargé du système d'information sur l'eau, de la surveillance, des études et de l'expertise. Afin de reconquérir la qualité écologique des rivières, le projet de loi rénove les procédures d'entretien des rivières et précise les niveaux de débits minimums qui devront être laissés dans les cours d'eau par les ouvrages hydrauliques. Le projet de loi renforce la gestion locale et partagée de la ressource en eau à travers les schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) dont la portée juridique est renforcée. Il donne des outils nouveaux aux maires pour gérer les services publics de l'eau et de l'assainissement dans la transparence. Des compétences accrues sont données aux communes en matière d'assainissement non collectif. Les sénateurs ont souhaité laisser la voie ouverte à la mise en place d'un dispositif de contrôle des assainissements non collectifs similaires au contrôle technique des véhicules. Ils ont par ailleurs rendu obligatoire l'information préalable des acquéreurs sur l'état des dispositifs d'assainissement non collectif. Le projet de loi améliore la transparence de la gestion des services publics d'eau et d'assainissement et facilite l'accès à ces services. Le Sénat a adopté un amendement plafonnant le montant de la part fixe dans la facture d'eau. Afin de promouvoir une élimination durable des boues d'épuration, le projet de loi crée un fonds de garantie spécial visant à couvrir les dommages imprévisibles pour les terres agricoles liés à l'épandage de ces boues. Le Sénat a adopté un amendement habilitant les départements à créer, s'ils le souhaitent, un fonds départemental pour l'eau et l'assainissement alimenté par une taxe spéciale sur les volumes d'eau distribués. Il a fixé à 150 millions d'euros par an le plancher du montant des aides accordées par les agences de l'eau au titre de la solidarité rurale pour la période 2007-2012. Enfin, le projet de loi réforme l'organisation de la pêche en eau douce à travers notamment la création d'une fédération nationale de la pêche. Ce projet de loi s'inscrit dans la continuité de la politique française de l'eau qui privilégie l'action locale, au niveau du bassin versant, et l'association de l'ensemble des acteurs de l'eau. Il apporte des éléments de simplification et de nouveaux outils qui permettront d'atteindre effectivement l'objectif ambitieux de bon état écologique des eaux en 2015.
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