FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 61063  de  M.   Cochet Yves ( Députés n'appartenant à aucun groupe - Paris ) QE
Ministère interrogé :  agriculture, alimentation et pêche
Ministère attributaire :  agriculture, alimentation et pêche
Question publiée au JO le :  22/03/2005  page :  2863
Réponse publiée au JO le :  03/05/2005  page :  4539
Rubrique :  agriculture
Tête d'analyse :  PAC
Analyse :  réforme. perspectives
Texte de la QUESTION : M. Yves Cochet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité sur les effets désastreux de la PAC actuelle sur les paysans. La politique agricole commune a été créée pour assurer la sécurité alimentaire de l'Europe et contribuer à sa sécurité politique. Très vite, parce qu'elle a privilégié les produits au détriment des personnes et des territoires, la PAC a servi les intérêts des firmes de l'agro-industrie et de la grande distribution. Les pertes d'emplois, les crises à répétition, les effets néfastes sur l'environnement, les menaces sur la santé des consommateurs en sont le résultat. Les PAC successives ont des conséquences néfastes réelles sur les paysans : disparitions massives d'exploitations, concentration des exploitations dans quelques bassins de production, baisse du revenu agricole etc... Les conséquences environnementales dues aux pratiques agricoles trop intensives sont également importantes : transports accrus par les délocalisations, utilisation massive de pesticides, d'organismes génétiquement modifiés, d'antibiotiques ou autres médicaments, justifiés par la fragilisation des cultures et des élevages intensifs. Les réformes adoptées dans le cadre de la nouvelle PAC, qui renforcent la désorganisation totale des marchés et le déménagement massif des petits et moyens paysans, fragilisent encore une fois la condition des paysans et posent de véritables interrogations quant à l'avenir de ce métier. Les modalités d'application retenues par la France reposent sur une telle complexité d'application qu'elles rendent cette réforme inapplicable. Les paiements directs qui se mettent en place sont calculés à partir de références historiques. Ils ne sont donc liés à aucune production spécifique. Ainsi, la répartition des aides entre les différentes exploitations restera inchangée : les 20 % des exploitations les plus grosses continueront à s'accaparer 73 % des nouvelles aides découplées, pour 59 % des superficies et seulement 25 % des emplois. De plus, cette réforme va instaurer la création d'un marché des droits à prime, intégralement financé par l'impôt. Au regard des citoyens, cette politique agricole n'est pas acceptable dans son essence même car elle conforte la loi des plus forts. Les aides découplées de l'acte de production vont amplifier le mouvement de désertification des campagnes. Elles ne garantiront pas à la société européenne la production de la nourriture dont elle a besoin, contrairement au principe même d'institution de la PAC ! L'ouverture de discussions sur la gestion des crises agricoles et sur la mise en place d'outils législatifs et économiques est certes importante mais les termes du débat semblent être mal posés. En effet, ce débat montre la totale contradiction à se préoccuper en France des effets dévastateurs des crises agricoles, tout en acceptant à Bruxelles la mise en place de politiques défendant les seuls intérêts de l'agro-industrie. C'est pourquoi il lui demande s'il envisage de reporter l'application de la PAC à 2007 afin qu'un grand débat parlementaire sur les choix économiques, sociaux et territoriaux, capables de guider la mise en application de cette réforme, puisse avoir lieu.
Texte de la REPONSE : Le Gouvernement a eu tout au long de la négociation de la réforme de la Politique agricole commune (PAC) la préoccupation de garantir un développement équilibré de notre agriculture et du territoire. À partir de cette ligne de conduite, et compte tenu de ce qu'étaient les propositions initiales de la Commission européenne, mais aussi d'un certain nombre de nos partenaires de l'Union européenne, le Gouvernement se félicite d'un accord qui permet de satisfaire la plupart des objectifs que la France s'était fixés. Le découplage total a pu être évité, et une formule satisfaisante de découplage partiel a été trouvée. Avec un taux de couplage de 25 % en grandes cultures, l'avenir de la production céréalière dans les zones intermédiaires n'est pas remis en cause. Dans les productions animales, le maintien de la prime ovine et de la prime à la vache allaitante préserve le couplage de celles des aides qui sont les plus importantes pour l'équilibre de nos territoires. La France a pu obtenir les contreparties qu'elle demandait pour se rallier à un accord large et ambitieux. Revendication ancienne, la légitimité d'instruments de gestion des crises de marché se trouve reconnue aux niveaux tant européen que national, avec des moyens financiers spécifiques. La Commission européenne présentera, comme elle s'y est engagée en juin 2003, un rapport sur la gestion des crises de marché au printemps 2005. Notre pays a choisi de mettre en place le découplage en 2006, dix pays membres ayant choisi une application dès le 1er janvier 2005. La France a, en effet, préféré disposer d'une année, l'année 2005, pour bien définir le dispositif et le tester sur l'ensemble du territoire. Chaque agriculteur se verra donc allouer un certain nombre de droits à paiement unique (DPU) calculées sur la base des aides perçues en 2000, 2001 et 2002. Alerté par les organisations professionnelles agricoles sur le fait que le dispositif des droits à paiement unique tel qu'il était prévu ne garantissait pas une gestion optimale des aides découplées, le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité a saisi la Commission européenne dans le courant du mois de janvier 2005 et l'a informée de la nécessité d'étudier les modalités d'activation et de répartition des DPU permettant d'optimiser leur affectation aux agriculteurs réellement productifs en 2006. Ce travail est maintenant en cours et devrait se conclure à la fin avril. En ce qui concerne la cession des DPU, un dispositif pour lutter contre la spéculation a été mis en place. Les échanges de droits à paiement ne pourront se faire qu'à l'intérieur d'un département. Les ventes de droits à paiement déconnectées du foncier feront l'objet d'un prélèvement de 50 % des droits transférés. Ce taux dissuasif permettra de créer un lien étroit entre le foncier et les droits et donc de faciliter, tout en les encadrant, les évolutions structurelles des exploitations. La conditionnalité des aides et les contrôles qui lui sont liés sont la contrepartie des aides versées dans le cadre de la PAC, chaque année, à hauteur de 8 milliards d'euros. Elle est aussi garante de la prise en compte de l'environnement et de la santé publique par une agriculture soucieuse de répondre aux attentes de la société. Notre pays est entré depuis le 1er janvier 2005 dans la phase de mise en oeuvre locale des règles de la conditionnalité. Si la nécessité des contrôles n'est pas contestée, les responsables professionnels s'inquiètent de la pression qu'ils viennent ajouter sur les exploitants agricoles et du caractère parfois très strict et détaillé des points qui seront contrôlés. À la demande de la France, la Commission et le Conseil européens ont reconnu dans une déclaration adoptée à l'unanimité, lors du conseil des ministres de l'agriculture à Bruxelles, le 21 décembre 2004, que la mise en oeuvre de la conditionnalité nécessiterait un effort important de la part des agriculteurs et des Ëtats membres. Aux termes de la déclaration, il convenait d'instaurer un système efficace et équilibré de contrôle de la conditionnalité. Le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité a défini, dès le 22 décembre 2004, les règles nationales pour garantir une mise en oeuvre pragmatique et raisonnée de la réforme de la PAC : en 2005, les anomalies mineures ne feront pas l'objet de sanctions financières et, par exemple, l'absence d'une boucle ou son caractère illisible pour un seul animal d'une exploitation ne seront plus considérés comme une anomalie. Des instructions ont été données aux préfets afin qu'ils assurent sur le terrain une mise en oeuvre de la réforme telle que le Gouvernement l'a voulue, avec pédagogie et progressivité. Ces principes guideront l'action quotidienne des services de contrôle. Une année est donnée pour une mise en oeuvre plus pragmatique et plus souple que ce qu'avait prévu le dispositif initial, ce qui permettra aux agriculteurs d'apprendre les règles et de s'y familiariser. Ce calendrier permet de répondre à la fois à la volonté d'accompagner de façon rapprochée les agriculteurs et de définir, avec les organisations professionnelles agricoles, le dispositif le plus adapté possible aux réalités de terrain. Dans ces circonstances le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité n'envisage pas de reporter l'application de la PAC à 2007.
NI 12 REP_PUB Ile-de-France O