FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 68224  de  M.   Auclair Jean ( Union pour un Mouvement Populaire - Creuse ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  21/06/2005  page :  6220
Réponse publiée au JO le :  23/08/2005  page :  8052
Rubrique :  professions judiciaires et juridiques
Tête d'analyse :  experts
Analyse :  exercice de la profession
Texte de la QUESTION : M. Jean Auclair appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la loi n° 2004-130 du 11 février 2004 qui modifie le statut des experts judiciaires résultant de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 et institue notamment de nouvelles règles relatives aux conditions d'établissement des listes les concernant. L'article 2 du décret n° 2001-1463 du 23 décembre 2004 pris pour l'application de cette loi, reprenant à cet égard une disposition de l'article 2 du décret n° 74-1184 du 31 décembre 1974 aujourd'hui abrogé, énonce qu'une personne physique ne peut être inscrite ou réinscrite sur une liste d'experts judiciaires que si elle n'exerce aucune activité incompatible avec l'indépendance nécessaire à l'exercice de missions d'expertises judiciaires ; en outre, l'article 105 du code de déontologie des médecins, codifié sous l'article R. 4127-105 du code de la santé publique, stipule qu'un médecin ne doit pas accepter une mission d'expertise dans laquelle sont en jeu les intérêts d'un groupement qui fait habituellement appel à ses services ; par ailleurs, aux termes de l'article 79 de la loi précitée du 11 février 2004, les experts inscrits, à la date de la publication de cette loi, sur une liste d'experts judiciaires continuent à y figurer jusqu'à ce qu'il soit statué sur leur inscription éventuelle sur les listes nouvelles ; l'article 38 du décret du 23 décembre 2004 précise à ce propos que les experts inscrits sur une liste de cour d'appel au 31 décembre 2004 peuvent solliciter leur réinscription sur une liste pour une durée de cinq ans et que les demandes de réinscription doivent être présentées et examinées chaque années ; les cinq premières années à compter du 1er janvier 2005, par branche de la nomenclature des experts et par cinquième dans l'ordre alphabétique à partir d'une lettre tirée au sort par le président de la commission prévue au II de l'article 2 de la loi du 29 juin 1971 modifiée. Il lui demande si un médecin conseil de sociétés d'assurances doit être exclu des listes d'experts judiciaires dès lors que son activité au service de ces sociétés susceptibles d'être intéressées par le résultat des expertises médicales ordonnées par les juridictions, semble de nature à nuire à son indépendance et, dans l'affirmative, s'il n'estime pas devoir adresser des instructions aux procureurs généraux des cours d'appel afin que les procureurs de la République, chargés, aux termes de l'article 7 du décret du 23 décembre 2004, de recueillir tous renseignements sur les mérites des candidats à l'inscription sur les listes d'experts judiciaires, invitent les médecins posant leur candidature à prendre l'engagement de n'effectuer des missions d'expertise qu'au service de la justice. Deuxièmement, dans la même hypothèse, si la situation des médecins inscrits sur la liste des experts judiciaires d'une cour d'appel au 31 décembre 2004 bien qu'effectuant des expertises à la demande de sociétés d'assurances n'est susceptible de faire l'objet d'un nouvel examen qu'à l'occasion de leur demande de réinscription sur la liste nouvelle établie en exécution du décret du 23 décembre 2004, ce qui impliquerait, semble-t-il, leur maintien su la liste ancienne pendant une période pouvant se prolonger durant cinq années à partir du 1er janvier 2005, compte tenu des dispositions de l'article 38 du décret du 23 décembre 2004, selon la lettre tirée au sort en vertu de ce texte.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que les règles statutaires applicables à l'expert judiciaire et les dispositions du nouveau code de procédure civile permettent de garantir son indépendance et son impartialité. En effet, en application de l'article 237 du nouveau code de procédure civile, le technicien commis par le juge doit accomplir sa mission non seulement avec conscience, mais aussi avec impartialité et objectivité. En outre, les articles 2-6 et 3-3 du décret statutaire du 23 décembre 2004 interdisent à l'expert judiciaire d'exercer une activité incompatible avec l'indépendance nécessaire à l'exercice de sa mission, sans autre précision. Ainsi, au stade du recrutement des experts judiciaires, les cours d'appel peuvent refuser, sur le fondement de ces dispositions, d'inscrire des techniciens qui seraient attachés directement ou indirectement à une compagnie d'assurances lorsque cela est justifié. Par ailleurs, les articles 234 et 341 du nouveau code de procédure civile permettent aux parties au procès de demander la récusation des techniciens pour les mêmes causes que les juges, et notamment lorsque l'expert a un intérêt personnel à la contestation, a conseillé l'une des parties ou connu de l'affaire précédemment ou encore se trouve lié à l'un des justiciables de la cause par un lien de subordination. Ces dispositions peuvent trouver à s'appliquer, dans le cadre d'une instance donnée, lorsque l'expert est désigné par une juridiction après avoir, dans le cadre de la même affaire, conduit des opérations d'expertise amiable pour le compte d'une compagnie d'assurances, partie à l'instance. Outre que ces dispositions sont de nature à garantir l'indépendance de l'expert judiciaire, notamment à l'égard des compagnies d'assurances, il y a lieu de considérer qu'un régime d'incompatibilité de portée générale porterait atteinte à la liberté d'exercice professionnel, constitutionnellement protégée (liberté du commerce et de l'industrie), comme à la philosophie même du statut des experts judiciaires qui, simples collaborateurs occasionnels de la justice, doivent pouvoir enrichir le débat de leur expérience professionnelle.
UMP 12 REP_PUB Limousin O