FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 68825  de  M.   Mamère Noël ( Députés n'appartenant à aucun groupe - Gironde ) QE
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  affaires étrangères
Question publiée au JO le :  28/06/2005  page :  6341
Réponse publiée au JO le :  27/09/2005  page :  8926
Rubrique :  nationalité
Tête d'analyse :  réintégration
Analyse :  Malgaches nés sous souveraineté française
Texte de la QUESTION : M. Noël Mamère attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation de 700 personnes nées à Madagascar sous souveraineté française mais sans nationalité depuis l'indépendance. Au moment de la décolonisation en 1960, les habitants de Madagascar ont disposé d'un délai de six mois pour faire le choix de garder ou non la citoyenneté française à laquelle ils avaient le droit. L'information n'a pas bien circulé, notamment dans les villages reculés, et beaucoup n'ont pas fait la démarche nécessaire. Des centaines de personnes d'origine hindoue, chinoise, grecque, libanaise se sont donc retrouvées apatrides, sans nationalité, ne pouvant ni recevoir la nationalité française, ni la nationalité malgache qui repose sur le droit du sang (avoir au moins un de ses parents malgache). Ces « oubliés de la décolonisation » viennent de se constituer en association soutenue par les associations de droits de l'homme pour interpeller les autorités françaises face à ce qui constitue un drame humain. En effet, sans nationalité, ces personnes sont vulnérables, sans droits et souvent utilisées comme boucs émissaires désignés à la vindicte par les autorités malgaches. Il lui demande ce qu'il compte faire pour en finir avec ce déni de nationalité. Il lui demande de se prononcer clairement afin que la France puisse se mettre en conformité avec l'article 15 de la convention des droits de l'homme qui précise que « tout individu a droit à une nationalité ».
Texte de la REPONSE : Le ministre des affaires étrangères est particulièrement sensible à la situation, au regard du droit français de la nationalité, des personnes originaires des territoires qui ont autrefois été placés sous la souveraineté française, comme Madagascar, qui fut territoire d'outre-mer de 1946 jusqu'à son accession à la pleine souveraineté internationale, le 26 juin 1960. Les effets sur la nationalité française de l'indépendance de cette île comme de douze autres TOM d'Afrique subsaharienne, bien que les dates du transfert de souveraineté aient pu différer d'un État à l'autre, ont été organisées par la loi n° 60-752 du 28 juillet 1960 et sont actuellement régies par le chapitre VII du titre Ier bis du livre  premier du code civil. En vertu des dispositions de la loi précitée, ont conservé de plein droit la nationalité française à l'indépendance de Madagascar, si elles la possédaient à cette date, les personnes originaires du territoire de la République française tel qu'il restait constitué le 28 juillet 1960, ainsi que les personnes originaires de Madagascar qui avaient, à la date de l'indépendance, établi leur domicile hors de Madagascar et des douze autres États de l'ancienne « Communauté ». La loi du 28 juillet 1960 a en outre accordé aux personnes originaires de Madagascar établissant leur résidence en France la possibilité de souscrire une déclaration récognitive de nationalité française. Cette disposition est restée applicable jusqu'au 31 juillet 1973. La France a toujours veillé à éviter que l'accession à l'indépendance des anciens territoires français ait pour conséquence de créer des situations d'apatridie, conformément à l'article 15 de la Déclaration universelle des droits de l'homme faite à Paris le 10 décembre 1948. L'actuel article 32-3 du chapitre VII du titre 1er bis du livre premier du code civil, reprenant la règle déjà posée par l'article 152 puis par l'article 155-1 de l'ancien code de la nationalité française, dispose ainsi que « Tout Français domicilié à la date de son indépendance sur le territoire d'un État qui avait eu antérieurement le statut de département ou territoire d'outre-mer de la République conserve de plein droit sa nationalité dès lors qu'aucune autre nationalité ne lui a été conférée par la loi de cet État ». En application de cet article, les personnes de nationalité française au moment de l'indépendance de Madagascar qui ne se sont pas vu reconnaître la nationalité malgache et qui ne pourraient, par ailleurs, prétendre posséder encore notre nationalité au titre de la loi du 28 juillet 1960 ou à un autre titre, ont donc conservé de plein droit la nationalité française. Les personnes justifiant être dans cette situation peuvent toujours demander la délivrance d'un certificat de nationalité française. Dans ces conditions, il apparaît donc impossible qu'une personne possédant la nationalité française le 26 juin 1960 se soit retrouvée placée en situation d'apatridie suite à l'indépendance de Madagascar et privée ainsi de son droit à une nationalité. Il va de soi que les autorités françaises examineraient sans délai tout dossier de personne qui satisferait aux critères rappelés ci-dessus et souhaiterait faire valoir ses droits à la nationalité française. En tout état de cause, aucune disposition de notre législation n'a instauré un délai de six mois pour des personnes domiciliées à Madagascar au moment de l'indépendance en vue d'opter pour la conservation ou non de leur nationalité française à cette date. La référence à un tel délai pourrait plutôt viser l'ordonnance n° 60-064 du 22 juillet 1960 portant code de la nationalité malgache prise par le Gouvernement de la République malgache. En revanche, les personnes qui, bien que domiciliées à Madagascar au moment de l'indépendance, n'avaient pas la qualité de Français, n'ont pas été en mesure de conserver une nationalité française qu'ils n'avaient jamais possédée. Il s'agit de ressortissants étrangers, notamment d'origine indo-pakistanaise, anciens sujets de l'Inde britannique, mais aussi d'origine libanaise ou grecque. Le législateur français n'avait pas en effet compétence pour régler les conséquences de l'indépendance d'un de ses territoires sur la nationalité de citoyens non français. Il convient de rappeler que le droit à une nationalité énoncé à l'article 15 de la Déclaration universelle des droits de l'homme est repris, en totalité ou plus particulièrement pour les enfants, dans plusieurs instruments internationaux, notamment à l'article 24 du pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations unies du 16 décembre 1966, à l'article 5 de la convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale des Nations unies du 21 décembre 1965, à l'article 7 de la convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 et à l'article 6 de la Charte africaine sur les droits et le bien-être de l'enfant de juillet 1990. La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples du 27 juin 1981 se réfère par ailleurs expressément dans son préambule à la déclaration de 1948. Si de nombreux États sont parties à ces instruments, la France a bien veillé pour ce qui la concernait, et s'agissant de ce qui relevait de la compétence de son législateur, à savoir le droit de la nationalité française, à éviter les cas d'apatridie.
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