Texte de la QUESTION :
|
M. Jean-Marie Demange appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la distinction entre eaux closes et eaux libres. Le droit de la pêche s'applique aux eaux libres gérées par les fédérations départementales de pêche. Tout pêcheur en eaux libres doit être titulaire d'une carte de pêche, qui implique une affiliation à une association agréée de pêche et de protection des milieux aquatiques (AAPMA), le paiement d'une cotisation et l'acquittement d'une taxe piscicole. Ces obligations ne s'appliquent pas à la pêche en eaux dites closes. Avant la loi de 1984, le critère d'application de la police de la pêche résidait dans la circulation du poisson. La loi de 1984 a opté pour un autre critère, celui de la communication des eaux, « même de façon discontinue ». En conséquence, le champ d'application de la loi s'est étendu à toutes les eaux, dès lors que toutes les eaux communiquent entre elles. Certains ont pu parler de « nationalisation » de la ressource piscicole car sous l'effet de cette extension, faisant ainsi évoluer la nature juridique du poisson de « res propria » (élevé et acheté par le propriétaire du plan d'eau) en « res nullius ». Cependant, à partir de 1984, en l'absence de définition légale, le juge judiciaire s'est progressivement opposé à une conception trop extensive des eaux dites libres. Par ailleurs, le législateur a corrigé en 1991 les critères d'application de la police des eaux en supprimant les termes « même de façon discontinue ». Suivant ces positions, il était convenu qu'une communication discontinue entraînait la qualification d'eaux dites closes. Á ce titre, l'arrêt de la Cour de cassation du 5 mars 1997 exige pour des eaux libres l'existence « d'une communication permanente, naturelle et directe ». Malgré la jurisprudence, qui traduit un retour au critère de la communication du poisson, certains gardes-pêche conserveraient une interprétation extensive des eaux libres. Une carte de pêche est donc parfois exigée pour pratiquer la pêche dans les étangs privés et on observe une multiplication des poursuites pénales, contribuant ainsi à l'encombrement des tribunaux. Ce climat pourrait, en partie, expliquer la désaffection de la clientèle des parcours de pêche, situation de nature à remettre en cause leur pérennité financière. Cette question complexe et sensible a été portée au débat lors de l'examen du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, au Sénat en avril dernier. Il a alors été fait mention d'un rapport rédigé par d'éminents juristes du Conseil d'État, de la Cour de cassation et du monde universitaire sur la problématique des eaux libres et des eaux closes. Il lui demande de bien vouloir lui communiquer l'analyse, faite par ses services, des conclusions de ce rapport.
|
Texte de la REPONSE :
|
La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question concernant la problématique de la définition des eaux libres et des eaux closes existant en matière de police de la pêche et les conséquences pouvant en résulter quant à l'exercice de la pêche sur les étangs privés. Un groupe de travail composé de membres du Conseil d'État, de la Cour de cassation et du monde universitaire a en effet rendu son expertise et ses propositions pour faire évoluer cette difficulté. Le rapport d'expertise a été transmis en juin dernier à l'Union nationale des pêcheurs ainsi qu'à la commission des lois de l'Assemblée nationale. Se plaçant dans la perspective de l'adoption du projet de loi sur l'eau, le groupe de travail propose que soient considérés comme eaux closes « les fossés, canaux, étangs, réservoirs et autres plans d'eau dans lesquels le poisson ne peut passer naturellement [, sauf par l'effet d'un phénomène involontaire et temporaire] ». Les services du ministère de l'écologie et du développement durable réfléchissent actuellement aux conséquences d'une telle évolution législative, et ce point sera vraisemblablement évoqué lors du prochain examen du projet de loi sur l'eau par l'Assemblée nationale.
|