FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 80749  de  Mme   Royal Ségolène ( Socialiste - Deux-Sèvres ) QE
Ministère interrogé :  cohésion sociale et parité
Ministère attributaire :  cohésion sociale et parité
Question publiée au JO le :  13/12/2005  page :  11416
Réponse publiée au JO le :  03/10/2006  page :  10325
Rubrique :  femmes
Tête d'analyse :  politique à l'égard des femmes
Analyse :  femmes victimes de violences conjugales
Texte de la QUESTION : Devant le terrible bilan des violences faites aux femmes par leur conjoint, qui aboutit à un décès tous les quatre jours selon le dernier recensement rendu public, Mme Ségolène Royal souhaite que la lutte contre les violences fasse enfin l'objet d'une mobilisation prioritaire. Elle appelle à l'élaboration d'une loi-cadre qui permette de lutter globalement contre ce fléau, à l'image de la loi mise en place par le gouvernement socialiste de Zapatero en Espagne. Elle demande à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité dans quels délais et quels moyens matériels, juridiques et financiers, elle compte mettre en place pour lutter efficacement contre ce fléau.
Texte de la REPONSE : La France a choisi de lutter contre les violences faites aux femmes à travers un ensemble de dispositifs complémentaires plutôt qu'au moyen d'une loi cadre à l'instar de l'Espagne. Le 24 novembre 2004, un plan d'action global contre les violences faites aux femmes, intitulé « 10 mesures pour l'autonomie des femmes », a été adopté par le Gouvernement. Il a d'ores et déjà permis des avancées concrètes : en matière d'hébergement, des référents « violences-hébergement », à même de connaître en temps réel toutes les places disponibles, ont été ainsi désignés dans les départements. Les femmes victimes de violences figurent désormais parmi les publics prioritaires des centres d'hébergement et de réinsertion sociale ; en ce qui concerne la réinsertion sociale et professionnelle des femmes victimes de violence, un accord signé par les partenaires sociaux le 18 janvier 2006 prévoit que l'UNEDIC considère désormais comme légitime la démission consécutive au changement de résidence du salarié dès lors que celui-ci est victime de violences conjugales et justifie avoir déposé une plainte auprès du procureur de la République. Ce cas de démission ouvre des droits à l'assurance chômage en faveur de la personne victime de ce type de violences ; les commissions départementales d'action contre les violences faites aux femmes ont favorisé la mobilisation des acteurs locaux ; une campagne nationale de communication sous le slogan « Stop violence - Agir, c'est le dire » a été lancée en novembre 2004 ; des formations initiales et continues ont renforcé la sensibilisation des professionnels (policiers, gendarmes, magistrats) ; enfin, une brochure destinée à l'ensemble des professionnels concernés par les violences conjugales a été réalisée en 2005 et largement diffusée. En novembre 2005, un premier recensement national des morts violentes survenues au sein du couple en 2003 et 2004, réalisé par l'ENSEA Junior études en collaboration avec le ministère de l'intérieur, a été rendu public par la ministre en charge de la parité. Aujourd'hui, un affinement des données statistiques est nécessaire. C'est pourquoi, à l'initiative de la ministre en charge de la parité, de nombreuses études sont menées. L'INSEE et l'INHES préparent le lancement, en 2007, d'une véritable enquête de victimation au sens des enquêtes nationales anglo-saxonnes. Les premiers résultats sont attendus pour 2007. Enfin, la ministre en charge de la parité a demandé l'intégration de la dimension sexuée dans les analyses liées à l'enquête « événements de vie et santé » lancée en 2005 par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES). Une étude a également été confiée au Centre de recherches économiques, sociologiques et de gestion, afin d'examiner la faisabilité d'une étude du coût économique des violences au sein du couple, en France. Dans le domaine juridique, la loi renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs a été promulguée le 4 avril 2006 et publiée au Journal officiel le 5 avril 2006. Dans la plupart des cas, les faits de violences commis au sein du couple mettent en danger la femme. Désormais, l'infraction constituée par ces faits est automatiquement sanctionnée par une peine aggravée. Pour cela, est introduite dans le code pénal la définition générale de la circonstance aggravante pour tout acte punissable commis au sein du couple. Ensuite, sont précisés quels peuvent être les auteurs concernés par cette circonstance aggravante. Il s'agissait déjà, pour certaines infractions, du conjoint et du concubin. La loi étend l'application de la circonstance aggravante au partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité ainsi qu'aux anciens conjoints, anciens concubins et anciens partenaires liés par un Pacs. La gravité de la sanction est la même pour des faits commis pendant l'union ou après la séparation du couple, sans limite temporelle, à condition qu'ils aient été commis en raison des relations ayant existé entre l'auteur des faits et la victime. Cette absence de limite temporelle accroît la protection de la victime. L'auteur de violences sera plus fortement puni en raison de la liaison qu'il a entretenue ou entretient toujours avec la victime. La protection des victimes est traduite par une répression renforcée. Les faits concernés par l'aggravation sont tout d'abord les infractions de violence : tortures et actes de barbarie, violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, violences ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à huit jours ou n'ayant entraîné aucune Incapacité totale de travail. La violence en cause est aussi bien celle qui cause des lésions corporelles que des troubles psychologiques. Grâce à l'étendue de la notion de l'ITT qui comprend ces deux types de troubles, l'intégrité physique et psychologique est pleinement garantie par la loi. La circonstance aggravante érigée par la loi en principe général en matière de violences au sein du couple est élargie aux cas de viol, d'agressions sexuelles autres que le viol et de meurtre. La loi permet ainsi de confirmer une jurisprudence de la Cour de cassation reconnaissant le viol au sein du couple. Enfin, une importante disposition de la loi doit permettre de renforcer la sécurité des victimes et éviter les risques de représailles dont elles peuvent faire l'objet. L'éloignement de l'auteur des violences du domicile de la victime peut être ordonné par le juge à tous les stades de la procédure pénale. L'auteur des faits de violence concerné par cette mesure est le conjoint, l'ancien conjoint, le concubin, l'ancien concubin, le partenaire de Pacs et l'ancien partenaire de Pacs. Dès le signalement des faits, une telle mesure peut être imposée par le juge et s'accompagner d'une obligation de prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique. Ce dispositif d'éloignement assure ainsi la protection indispensable dont doivent bénéficier les victimes. Enfin, alors que la répression du vol entre époux était jusqu'alors impossible, la nouvelle loi pose une exception limitée au vol d'objets ou de documents particulièrement importants, tels les documents d'identité relatifs au titre de séjour ou de résidence d'un étranger, ou des moyens de paiement. Bien qu'il s'applique identiquement à tous les couples mariés, le texte législatif est venu combler un manque de protection avéré des femmes étrangères conjointes de ressortissants français et victimes de violences conjugales en mentionnant expressément le titre de séjour ou de résidence d'un étranger dans la liste non limitative des documents visés par l'exception. En outre, ce texte législatif : complète l'article 212 du code civil afin que les époux se doivent mutuellement non seulement fidélité, secours, assistance, mais aussi respect ; prévoit une évaluation de la politique menée en matière de lutte contre les violences conjugales et le dépôt tous les deux ans d'un rapport gouvernemental sur le bureau du Parlement. En matière de soutien financier, les subventions accordées au secteur associatif spécialisé ont été augmentées de près de 20 % en 2005 par rapport 2004, effort qui a été maintenu en 2006. Enfin, quatre nouveaux axes de travail contribuent, en 2006, à soutenir la politique déjà mise en oeuvre dans ce domaine : - l'élargissement de la palette des dispositifs d'hébergement des femmes grâce à l'expérimentation d'un accueil à titre onéreux dans des familles, menée dans les départements de l'Ardèche, de la Drôme et de la Réunion ; - l'amélioration, en partenariat avec le ministère de la santé et des solidarités, de la coordination des divers professionnels, notamment de santé, concernés par la prise en charge des femmes victimes de violences (médecins de ville, services d'urgence, services judiciaires et services sociaux municipaux et départementaux) avec la création à titre expérimental de réseaux d'accueil dans trois sites hospitaliers, à partir d'une unité médico-judiciaire. Cette expérimentation s'inscrit à la fois dans le Plan d'action global 2005-2007 précité et le futur Plan violence et santé du ministère de la santé et des solidarités. La prise en charge des personnes victimes de violence concerne en effet chaque professionnel de santé qui peut être conduit, dans le cadre de sa pratique, soit à recevoir soit à assurer le suivi de celles-ci ; - l'amélioration de la connaissance des besoins et des offres en matière d'hébergement et de logement des femmes victimes de violences. Un groupe de travail, placé sous l'égide du Service des droits et de l'égalité (SDFE), est chargé en 2006 d'élaborer une méthodologie de comptabilisation des offres et surtout des besoins en matière d'hébergement et de logement des femmes victimes de violences ;- le suivi des hommes violents. Dans cette perspective, un groupe de travail a été constitué afin d'évaluer les progrès réalisés et l'efficience des dispositifs existants en matière de prise en charge et de suivi des hommes auteurs de violences.
SOC 12 REP_PUB Poitou-Charentes O