FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 95542  de  M.   Vannson François ( Union pour un Mouvement Populaire - Vosges ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  30/05/2006  page :  5619
Réponse publiée au JO le :  11/07/2006  page :  7379
Rubrique :  professions judiciaires et juridiques
Tête d'analyse :  avocats
Analyse :  accès à la profession. juristes d'entreprise
Texte de la QUESTION : M. François Vannson appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de rapprochement des professions de juristes d'entreprise et d'avocat. De nombreux avocats, par l'intermédiaire de la Confédération nationale des avocats (CNA), s'opposent à un tel rapprochement. En effet, les avocats estiment que « l'hypothèse de travail retenue » à laquelle il était fait référence dans sa réponse à la question écrite n° 89808 (JO 25 avril 2006, p. 4526) ne présente aucun intérêt ni pour le justiciable ni pour l'avocat qui n'est pas demandeur à un nouveau statut d'avocat salarié en entreprise. De surcroît, elle présente l'inconvénient de reconnaître deux statuts différents d'exercice de la profession d'avocat. Enfin, et contrairement à l'affirmation de principe selon laquelle « l'avocat en entreprise ne devrait en aucune manière concurrencer les avocats sur le terrain judiciaire », ce nouvel avocat en entreprise pourrait représenter et/ou assister son employeur devant toutes les juridictions hormis le tribunal de grande instance, et pourrait représenter et/ou assister les clients de son employeur devant toutes les juridictions sans exception. Dans ces conditions, « l'hypothèse de travail » à laquelle il est fait référence ne bénéficierait qu'aux juristes d'entreprise, qui se verraient accéder au statut d'avocat sans en avoir acquis les diplômes, alors que leur souhait, sans doute légitime, se limite à bénéficier du « légal privilège ». Dès lors, le projet de réforme pourrait se limiter à la reconnaissance du bénéfice du « légal privilège » aux juristes d'entreprise. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître son sentiment concernant ces observations.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice, confirme à l'honorable parlementaire que le groupe de travail qui s'est réuni à la chancellerie au cours de l'année 2005 a examiné l'hypothèse d'une réforme au terme de laquelle les avocats pourraient, à l'avenir, choisir d'exercer leur profession en qualité de salarié d'une entreprise. Il ne s'agit donc nullement de créer une nouvelle profession réglementée des juristes d'entreprise bénéficiant du « legal privilege », reconnu aux avocats dans les pays de common law. La discussion actuelle porte sur la création d'un nouveau mode d'exercice de la profession d'avocat : « avocat en entreprise », au sens de l'article 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971. S'agissant de son champ d'activité professionnelle, « l'avocat en entreprise » exercerait les mêmes fonctions de consultation et de rédaction d'actes, au profit de l'entreprise, que l'actuel juriste d'entreprise. Titulaire d'un contrat de travail, il serait soumis au code du travail, sauf dérogations expresses prévues par la loi ou le règlement, justifiées par le respect de l'indépendance et de la déontologie. Salarié de l'entreprise, il n'aurait, par définition, aucune clientèle personnelle. Pour autant, il serait dans une situation bien différente de l'avocat salarié d'un avocat, d'une association ou d'une société d'avocats (cf. art. 136 à 153 du décret n° 91-1147 du 27 novembre 1991). En effet, son employeur n'exerçant pas lui-même la profession, il ne pourrait en aucun cas représenter ou assister les clients de ce dernier devant les juridictions. Ainsi, l'avocat exerçant en entreprise ne concurrencerait pas ses confrères sur le terrain judiciaire. Les associations représentant les juristes d'entreprise ont confirmé lors des réunions du groupe du travail qu'elles ne le souhaitaient absolument pas. Pour que cela soit sans ambiguïté, la loi interdirait à l'avocat exerçant en entreprise de plaider et de représenter son employeur devant les juridictions lorsque la représentation est obligatoire, notamment devant le tribunal de grande instance, mais aussi d'assister son employeur en matière pénale. Il n'est naturellement pas concevable de reconnaître moins de droit à l'avocat exerçant en entreprise qu'à l'actuel juriste d'entreprise. Ce dernier peut aujourd'hui représenter l'entreprise devant le tribunal de commerce dans les conditions prévues par l'article 853 du nouveau code de procédure civile ou bien devant le conseil des prud'hommes sur le fondement des article R. 516-4 et R. 516-5 du code de travail. Le rapport du groupe de travail suscite des réactions nombreuses et diverses qui montrent l'intérêt et l'actualité du sujet. Pour aboutir, le rapprochement doit être perçu comme avantageux pour les deux communautés professionnelles. Encore une fois, il n'y aura pas de réforme et de rapprochement sans adhésion des professionnels du droit de ce pays à un projet clair et consensuel.
UMP 12 REP_PUB Lorraine O