FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 97662  de  M.   Nicolas Jean-Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Eure ) QE
Ministère interrogé :  santé et solidarités
Ministère attributaire :  santé et solidarités
Question publiée au JO le :  20/06/2006  page :  6401
Réponse publiée au JO le :  12/09/2006  page :  9660
Rubrique :  pharmacie et médicaments
Tête d'analyse :  médicaments
Analyse :  contrefaçons. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Jean-Pierre Nicolas attire l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur le commerce de médicaments ou de contrefaçons de médicaments sur internet. Actuellement, les services douaniers concentrent leur action sur les réseaux de distribution de produits contrefaits. Les aéroports et les ports constituant l'axe principal d'entrée des marchandises contrefaites en provenance des pays tiers producteurs, c'est donc à ce niveau que l'essentiel des constatations et des saisies douanières sont réalisées. Or, avec la mondialisation des échanges, c'est par la voie postale que le trafic s'organise aujourd'hui. La contrefaçon de médicaments constitue un fléau croissant dans de nombreux pays, mettant en danger la santé des consommateurs exposés. L'utilisation accrue d'internet, l'élargissement des frontières européennes à un espace où les règles de contrôle aux frontières ne sont pas encore homogènes, pourraient être sources d'une amplification de ce phénomène et de son développement en Europe. Perçue comme un délit d'ordre économique, la contrefaçon prend une autre nature lorsqu'elle s'attaque aux médicaments. Elle s'apparente alors à un commerce criminel. On ne meurt pas de porter un faux sac à main. En revanche, un médicament contrefait, lui, peut tuer. On estime qu'entre 6 et 10 % des médicaments disponibles sur le marché mondial sont des contrefaçons. Au total, l'Organisation mondiale de la santé estime que cela représente 35 milliards de dollars de ventes chaque année. Chaque jour, en France, des milliers de boîtes de médicament contrefaits ou provenant de pays tiers sont écoulées sur des sites de vente sur internet et expédiées par voie postale. Aujourd'hui, l'Union européenne dispose de 150 000 douaniers, pour un volume annuel qui porte sur des dizaines de millions de colis postaux. Il est donc impossible de tous les contrôler. Au pire, ces faux médicaments peuvent contenir des substances dangereuses pour la santé. Au mieux, ce sont en fait des placebos sans principe actif, du faux Tamiflu a par exemple été vendu sur internet, alors qu'il ne contenait pas de principe actif.Par ailleurs, les acheteurs de ces faux médicaments tombent, de fait, sous le coup de la loi contre la contrefaçon. Le problème des médicaments contrefaits s'inscrit dans le cadre plus large des produits pharmaceutiques de qualité inférieure. La différence tient à ce qu'ils sont étiquetés frauduleusement de manière délibérée pour en dissimuler la nature et/ou la source. La contrefaçon peut concerner aussi bien des produits de marque que des produits génériques, et les médicaments contrefaits peuvent comprendre des produits qui contiennent les principes actifs authentiques mais un emballage imité, ou d'autres principes actifs, aucun principe actif ou des principes actifs en quantité insuffisante. Restent les médicaments officiels commercialisés légalement à l'étranger, mais non autorisés en France, comme la mélatonine. Dans ce cas, le risque est tout aussi important. S'ils ne sont pas autorisés dans notre pays, c'est qu'il y avait de bonnes raisons. Les critères d'autorisation portent entre autres sur le contenu même du produit, mais aussi sur la qualité de ses circuits de fabrication et de distribution, qui peuvent le détériorer. Dans d'autres pays, la vente de médicaments sur internet n'est pas illégale et il n'y a pas de monopole de distribution au profit des seules officines de pharmacie. En conséquence, il le remercie de bien vouloir lui indiquer quelles mesures il serait susceptible de prendre dans ce domaine.
Texte de la REPONSE : La contrefaçon médicamenteuse est un problème préoccupant à l'échelle mondiale. Les données du Comité national anti-contrefaçon du ministère de l'industrie montrent que 7 % des médicaments dans le monde seraient des contrefaçons. Les médicaments, comme les autres produits de santé tels que les dispositifs médicaux, sont susceptibles lorsqu'ils sont contrefaits de causer un risque de santé publique en ce qu'ils ne répondent pas à la qualité attendue et peuvent ne pas avoir les effets thérapeutiques escomptés ou entraîner des effets nocifs inattendus. La lutte contre la contrefaçon, qui constitue notamment un délit au code de la propriété intellectuelle, est susceptible d'être relevée en premier lieu par les services des douanes et des fraudes. Compte tenu des nombreuses infractions au code de la santé publique commises, par ailleurs, à l'occasion de la contrefaçon de médicaments et de sa compétence en matière de produits de santé, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) joue également un rôle important dans la lutte contre la contrefaçon des produits de santé. Sur le plan national, l'AFSSAPS procède à des inspections portant sur l'importation, l'exploitation et la fabrication des médicaments. Conformément aux dispositions de l'article R. 5313-3 du code de la santé publique, les inspecteurs sont habilités à constater les infractions à la réglementation en vigueur sur procès-verbal transmis au procureur de la République compétent pour engager les poursuites pénales. Par ailleurs, les pharmaciens inspecteurs de santé publique, affectés dans les directions régionales des affaires sanitaires et sociales, sont chargés de contrôler la conformité de la distribution en gros des médicaments à la réglementation en vigueur. Des inspections des établissements pharmaceutiques concernés sont ainsi effectuées et permettent notamment des prélèvements aléatoires d'échantillons de spécialités pharmaceutiques afin de vérifier la conformité de leurs compositions aux dossiers d'autorisations de mise sur le marché (AMM). Outre les dispositions du code de la santé publique, ces établissements doivent également respecter des bonnes pratiques de distribution en gros des médicaments à usage humain publiées par arrêté du 30 juin 2000 prévoyant notamment que les distributeurs soient vigilants à l'égard de la contrefaçon, l'identifient et, le cas échéant, en informent les autorités compétentes et les titulaires des AMM. En cas de contrefaçon avérée, le directeur général de l'AFSSAPS peut prendre les mesures de police sanitaire nécessaires mentionnées aux articles L. 5312-1 et suivants du code de la santé publique, en vue de prévenir la distribution et l'utilisation des spécialités concernées. Des poursuites disciplinaires peuvent être engagées par l'Ordre des pharmaciens, sur demande du directeur général de l'AFSSAPS, si un pharmacien était impliqué dans une affaire de contrefaçon, ceci sans préjudice des actions susceptibles d'être engagées par d'autres administrations dont notamment la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF). Enfin, des protocoles reposant sur l'échange d'informations ont été conclus entre l'Afssaps et diverses administrations (DGCCRF) afin d'optimiser la prévention des risques issus de la contrefaçon médicamenteuse. Au plan international, l'AFSSAPS entretient une collaboration étroite avec d'autres autorités sanitaires européennes en matière de surveillance du marché des produits de santé, incluant la contrefaçon médicamenteuse. Au titre d'actions de coopération bilatérale ponctuelles, l'AFSSAPS procède, sur demande d'une autorité nationale de réglementation (ANR), d'une organisation non gouvernementale, d'une association ou de l'OMS, à des contrôles de médicaments prélevés sur des marchés illicites dans les pays tiers. Par ailleurs, au titre des actions de coopération bilatérales suivies, l'Agence apporte son aide à l'élaboration de réglementations relatives aux pouvoirs de police sanitaire d'une ANR (notamment avec le ministère de la santé russe), voire à la mise en place de laboratoires de contrôle (en Algérie ou en Russie). Enfin, au titre des actions de coopération multilatérale avec l'OMS. L'AFSSAPS participe également à des missions d'expertise dans le cadre de la préqualification des producteurs de vaccins et médicaments destinés aux appels d'offres de l'OMS pour l'UNICEF. En outre, au niveau communautaire, la directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, relative aux mesures et procédures visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle, en cours de transposition en droit français harmonise les législations des États membres afin d'assurer un niveau équivalent de protection de la propriété intellectuelle au sein du marché intérieur. Elle impose un socle d'obligations aux États membres dans la lutte contre la contrefaçon, en particulier médicamenteuse, pour une répression plus ferme et uniforme de la fabrication et de la diffusion de produits contrefaits. S'agissant de la vente de médicaments sur internet, il est à souligner que la mise en oeuvre de sanctions administratives ou pénales est particulièrement délicate, dans la mesure où l'hébergeur du site est susceptible de se localiser en dehors du territoire français, voire communautaire. Néanmoins, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a estimé, dans son arrêt du 11 décembre 2003 DocMorris, que les impératifs de santé publique, en ce qui concerne les médicaments soumis à prescription médicale obligatoire, peuvent justifier l'interdiction nationale de leur vente par correspondance, ainsi que l'interdiction de publicités afférentes à cette modalité de vente. Par ailleurs, l'AFSSAPS a mis en place le 18 janvier 2006 une action d'information préventive vis-à-vis du public relative aux risques liés à la vente de médicaments sur internet. Il y a également lieu de noter que, dans le cadre de l'application du règlement communautaire n° 2006/2004 du 27 octobre 2004 relatif à la coopération en matière de protection des consommateurs, l'AFSSAPS a été désignée autorité compétente pour rapporter tous les manquements à la réglementation communautaire en matière de protection du consommateur pour ce qui concerne la publicité pour le médicament à usage humain. Cette action a été mise en place en liaison avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), qui centralise l'ensemble des informations relatives aux domaines couverts par ce règlement.
UMP 12 REP_PUB Haute-Normandie O