Texte de la QUESTION :
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M. Pierre Cardo appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur le devenir et l'utilisation de sites industriels ayant accueilli des entreprises de traitement de matières dangereuses dont l'utilisation est désormais interdite en France, comme l'amiante, sites visés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement. La Charte de l'environnement, adoptée par la loi constitutionnelle du 1er mars 2005, et notamment ses articles 4 et 5, prévoit l'obligation de réparer les dommages causés à l'environnement et incite les autorités publiques, par application du principe de précaution, à la mise en oeuvre de mesures afin de parer à la réalisation de dommages qui pourraient affecter, de manière grave, l'environnement. De même, la directive européenne n° 2004/35/CE fait obligation, aux exploitants d'un site, de réparer les dommages occasionnés, en fonction des effets sur la santé et la sécurité publique. Enfin, la circulaire N) BPSPR/2005-305/TJ du 18 octobre 2005 relative aux nouvelles dispositions concernant la cessation d'activité des installations classées rappelle les obligations de mise en sécurité des sites par une réhabilitation en fonction de l'usage futur. Il s'interroge par conséquent sur l'utilisation immédiate et future de tels sites notamment pour l'implantation d'activités économiques accueillant du public et employant de nombreuses personnes. Une chape de béton recouvrant les terrains pollués serait-elle suffisante, à court et long terme, pour supprimer tout risque pour le sol et le sous-sol. Il lui demande si, dans un souci de développement durable et conformément au principe de précaution, avant l'utilisation de tels sites pour des activités ouvertes au public, une dépollution en profondeur du site n'est pas indispensable pour parer tout risque et de lui indiquer les responsabilités et obligations des autorités publiques en charge de la surveillance de ces mesures avant toute ouverture au public. Enfin, il souhaite savoir quelles surveillances sont prévues, après la réutilisation de ces sites qui n'auraient pas fait l'objet d'une dépollution en profondeur et quelles garanties sont apportées afin d'éviter toute intervention sur le sous-sol.
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Texte de la REPONSE :
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La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative aux changements d'usage des sites industriels mis à l'arrêt définitif. La politique en matière de gestion des sols pollués qui s'est développée en France depuis plus de dix ans s'appuie sur des principes et une mise en oeuvre proches de ce que pratiquent les autres pays européens. Cette politique est basée sur les deux principes suivants : l'examen et la gestion du risque plus que l'attachement au niveau de pollution intrinsèque ; la gestion en fonction de l'usage des sites. Cette politique ne s'oppose en aucune manière à rechercher les possibilités de suppression des sources de pollution compte tenu des techniques disponibles de traitement et de leurs coûts économiques. Il est cependant nécessaire, quand la suppression totale des sources de pollutions n'est pas possible, de garantir que les impacts provenant des sources résiduelles sont maîtrisés et acceptables pour les populations et l'environnement. Sur ce point, les objectifs de cette politique permettent un arbitrage entre les différentes options de gestion possibles (dépollution in situ ou confinement versus mise en décharge de terres polluées par exemple) en tenant compte des perspectives de développement durable et de bilan environnemental global. En effet, l'objectif est bien d'atteindre le meilleur niveau de protection de l'homme et de la nature en mobilisant des ressources proportionnées aux intérêts à protéger. Pour y parvenir, la mise en oeuvre de cette politique conduit à produire un bilan « coûts-avantages » pour permettre aux acteurs de s'appuyer sur des éléments tangibles justifiant les choix retenus. De plus, une politique de gestion des risques suivant l'usage n'est viable que dans la mesure où des mécanismes permettent de garder, de manière fiable et pérenne, la mémoire des pollutions présentes et de tenir l'information à la disposition de l'ensemble des acteurs concernés. L'objectif est de fournir à tous les acteurs en présence l'ensemble des éléments permettant de prendre les précautions appropriées en cas de changement ultérieur de l'usage des sols. Ces mécanismes sont constitués par deux dispositifs complémentaires : les instruments de « mémoire collective » qui consistent à rassembler et mettre l'information à disposition d'un large public (par exemple sur internet) ; les instruments de « mémoire individuelle » qui permettent, pour un site donné, de garder la mémoire des pollutions et des actions de réhabilitation mises en oeuvre, mais aussi de fixer des usages des sols compatibles avec les pollutions résiduelles. Sur le volet de la « mémoire collective », la poursuite de la constitution des inventaires historiques de Basias (http ://basias.brgm.fr) et la mise à jour régulière de Basol (http ://basol.ecologie.gouv.fr) restent des actions prioritaires pour le ministère. Sur le volet de la « mémoire individuelle », à l'échelle de chaque site, des mécanismes de restriction d'usage doivent être mis en oeuvre lorsque des pollutions sont découvertes ou laissées en place. La mise en oeuvre de ces mécanismes doit fixer des usages qui présentent des risques acceptables pour les populations en fonction des situations rencontrées et doit permettre de gérer et de maîtriser, s'ils existent, les impacts environnementaux. Ces mécanismes n'empêchent pas une évolution ultérieure des usages des sols, sous réserve de la réalisation des études et des travaux appropriés. Le ministère de l'écologie et du développement durable a engagé des modifications de nature législative pour simplifier les procédures permettant l'instauration de restrictions d'usage. Après l'examen des amendements législatifs par le Parlement à la rentrée, les nouvelles dispositions devraient être applicables au début de l'année 2007. Pour accompagner les textes d'application de la loi du 30 juillet 2003, le ministère a procédé à l'évaluation de cette politique. Ce travail a été réalisé en concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, sur la base d'un retour d'expériences de l'utilisation des outils méthodologiques. Les nouveaux textes seront d'application à compter du mois de septembre 2007. Il ressort que cette politique et sa mise en oeuvre sont reconnus et appréciés par l'ensemble des acteurs. Cependant, les leçons issues du retour d'expérience conduisent à définir des règles qui permettent une mise en oeuvre de cette politique sur des critères argumentés, transparents et équilibrés, prenant par ailleurs pleinement en compte les dispositions réglementaires déjà en vigueur. Ainsi, lorsqu'une gestion du site pollué est basée sur un confinement des pollutions, les projets de textes imposent désormais : la fourniture d'éléments démonstratifs tangibles sur les performances du confinement et sur leur pérennité dans le temps ; la réalisation d'un contrôle initial suivi d'une surveillance environnementale appropriée pour vérifier l'absence d'impact ou évaluer les impacts résiduels sur les milieux lorsqu'une telle solution a été décidée ; une vigilance pérenne sur les changements d'usage à venir et une information systématique des acquéreurs par le biais des documents d'urbanisme ou fonciers (conservation des hypothèques).
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