Texte de la QUESTION :
|
Mme Colette Langlade attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conditions d'accès au prêt viager hypothécaire. Lors de l'adoption de l'ordonnance du 23 mars 2006 qui a notamment réformé l'hypothèque, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a présenté ce prêt comme une mesure permettant de « mobiliser la valeur du patrimoine immobilier « dormant » dans le financement de l'économie pour relancer consommation et croissance ». Dès lors, la brochure, conçue par le Crédit foncier, pour faire connaître cette « solution inédite » qu'est le prêt viager hypothécaire, expliquait qu'il s'agit ainsi de permettre « à toutes les personnes seniors d'obtenir des liquidités garanties sur leur patrimoine immobilier », pour leur offrir ce faisant l'opportunité de financer leurs besoins. La diffusion de ce produit paraît cependant plus chaotique que ne l'espéraient sans doute ses promoteurs. L'une de ses concitoyennes lui précise ainsi avoir saisi plusieurs établissements bancaires, dont le Crédit foncier pourtant, sans avoir pu obtenir de réponse favorable. Et tout particulièrement, le Crédit foncier lui aurait objecté ne pouvoir répondre à cette demande car la requérante n'était pas âgée de plus de 65 ans ! Pourtant, aucune condition d'âge, lui semble-t-il, n'assortit l'éligibilité légale ou réglementaire au prêt viager hypothécaire : celle-ci n'est sans doute que la décision propre de cet établissement. Comment justifier une telle limite d'âge ? Ne s'agit-il pas là d'un frein, inutilement contraignant, à la diffusion du prêt viager ? Elle lui demande donc si le Gouvernement envisage de faciliter l'accès à ce produit, et notamment de veiller à ce que les établissements bancaires, à commencer par le Crédit foncier, évitent, par des décisions internes, de freiner sa mise en place.
|
Texte de la REPONSE :
|
Le Gouvernement suit de façon attentive la diffusion du prêt viager hypothécaire (PVH), qui vise à permettre aux propriétaires de tirer des ressources de leur bien immobilier tout en y demeurant. Ce dispositif a été créé en garantissant une protection large de l'emprunteur. L'ordonnance du 23 mars 2006 relative à la sûreté, qui a notamment permis de réformer l'hypothèque, permet aux particuliers de bénéficier d'une flexibilité accrue dans le recours au crédit immobilier. Le Crédit foncier, comme tout établissement de crédit, est responsable des concours financiers qu'il apporte. Il peut fixer, dans son offre commerciale, un âge à soixante-cinq ans, de la même manière que beaucoup d'établissements, élaborent des offres spécifiques pour les moins de vingt-cinq ans ou que certains prêts sont réservés à une catégorie de la population ciblée, comme les primo-accédants, par exemple. Ceci correspond d'ailleurs à l'objectif recherché puisque le PVH est destiné aux seniors tandis que le reste des consommateurs ont un accès plus facile aux crédits classiques. L'offre commerciale des établissements de crédit à destination des personnes âgées en matière de crédit à la consommation progresse. Les statistiques de l'Observatoire des crédits aux ménages montrent que les ménages séniors représentent une part croissante du nombre total de ménages qui ont accès au crédit à la consommation les 55-64 ans représentaient ainsi 15,8 % des ménages endettés en 2009 (contre 13,4 % en 1989). Cette évolution d'ensemble est en partie liée à des facteurs extérieurs aux mécanismes de crédit : l'amélioration du niveau de vie des séniors exerce un effet positif sur leur accès au crédit et l'allongement de leur espérance de vie réduit le risque représenté par l'octroi d'un prêt à un « jeune sénior » du point de vue des établissements de crédit. Ce produit connaît cependant un succès relativement limité auprès des consommateurs séniors : dans la période juin 2007 fin janvier 2010, 4 329 prêts pour 352 Meuros ont été accordés. Ceci tient à plusieurs facteurs : en dépit de la garantie apportée par l'hypothèque, le coût du risque supporté par le prêteur demeure élevé. En effet, contrairement à un prêt classique, la dette s'accroît au cours du temps dans le cas d'un PVH, puisqu'il s'agit d'un produit à remboursement in fine. Dès lors l'établissement de crédit porte un double risque : le risque de longévité de l'emprunteur, qui peut conduire à un accroissement de la dette au-delà de la valeur du bien hypothéqué du fait de la capitalisation des intérêts ; le risque d'évolution à la baisse du marché immobilier, qui se traduit par une baisse de la valeur du bien en-dessous de la dette anticipée. Ce second risque a vraisemblablement pesé sur le développement de ce produit, puisque son lancement est intervenu peu de temps avant une période marquée par une incertitude forte sur la valeur des biens immobiliers, voire par des baisses importantes dans certaines régions. Au total, les établissements de crédit qui ont cherché à développer ce type d'offre rapportent que les conditions de viabilité économique des PVH correspondent à des niveaux de taux effectif global (TEG) élevés, qui dissuadent une partie de la clientèle ; le démarchage est interdit en matière de PVH (art. L. 314-4 du code de la consommation). Ceci constitue un obstacle pratique au développement de ce type de produit, puisque la population concernée est a priori moins mobile que la population générale et que, s'agissant d'un produit récent, des efforts commerciaux spécifiques étaient nécessaires pour le faire connaître lors de son lancement. Le PVH est encore un produit récent dont les limites sont intrinsèquement liées à son mode de fonctionnement. Il est difficile d'attendre une diminution des TEG pratiqués, qui pourrait d'ailleurs se traduire par des phénomènes de sélection des risques qui exclurait davantage de séniors de l'accès au PVH. La stabilisation des prix immobiliers devrait cependant atténuer le risque supporté par les établissements et constituer un contexte favorable au développement du PVH.
|