FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 105500  de  M.   Loncle François ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Eure ) QE
Ministère interrogé :  Industrie, énergie et économie numérique
Ministère attributaire :  Industrie, énergie et économie numérique
Question publiée au JO le :  19/04/2011  page :  3839
Réponse publiée au JO le :  16/08/2011  page :  8862
Date de changement d'attribution :  29/06/2011
Rubrique :  énergie et carburants
Tête d'analyse :  énergie nucléaire
Analyse :  centrales nucléaires. sécurité
Texte de la QUESTION : M. François Loncle à M. le ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, sur le grave accident survenu à la centrale nucléaire japonaise de Fukushima, à la suite du tremblement de terre et du tsunami. Cet accident soulève la question des risques que la production et l'utilisation de l'énergie nucléaire font planer sur tous les pays, notamment la France qui est l'un des principaux acteurs de cette filière. En l'occurrence, les interrogations et les craintes sont nourries dans notre pays par un manque flagrant de transparence de la part des pouvoirs publics et des entreprises nationales en charge de ce secteur capital. Il semble que la tendance des responsables consiste systématiquement à nier les dangers, à occulter les menaces, à minimiser les incidents. C'est pourquoi il lui demande de lui indiquer, avec précision, les effets en Europe de l'accident de Fukushima. Il souhaite que les résultats du test européen de résistance et de ceux de l'audit national des centrales nucléaires françaises soient communiqués au plus vite. Il voudrait qu'il lui fournisse des chiffres détaillés sur le démantèlement prévu des installations nucléaires. Il voudrait savoir pourquoi la commission créée en 2006 et chargée d'évaluer le coût et le financement de ces opérations de démantèlement ne s'est jamais réunie et n'a produit aucun rapport. En se reportant à la situation de la centrale nucléaire de Brennilis, située dans le Finistère et en service de 1966 à 1985, dont le démantèlement a été interrompu il y a cinq ans et n'a été réalisé qu'à moitié, car le Conseil d'État, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et la Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité (Criirad) ont relevé maints dysfonctionnements et de nombreuses anomalies, il lui demande s'il faut s'attendre à des problèmes similaires pour les autres centrales, comme Fessenheim.
Texte de la REPONSE : Concernant les effets en Europe de l'accident de Fukushima : en ce qui concerne la contamination atmosphérique, les masses d'air en France et en Europe sont très faiblement contaminées du fait de l'importance de la dilution dans l'hémisphère nord. Même en présence de pluies, les retombées seront très faibles et ne nécessitent pas de précautions particulières. Aucune contamination des nappes phréatiques n'est attendue en France et le niveau des activités mesurées ne présente aucun risque sanitaire ni environnemental. Quant à l'importation de produits en provenance du Japon, l'Europe a renforcé les contrôles sur les importations de denrées alimentaires provenant de certaines régions du Japon (notamment les quatre les plus touchées par cet accident) en adoptant le 24 mars un texte qui impose des mesures de surveillance et de contrôle particulières. Tous les produits provenant de ces préfectures doivent être contrôlés avant de quitter le Japon et seront soumis à des tests aléatoires dans l'Union européenne. En France, les services des douanes et les services en charge du contrôle de la qualité des denrées ont mis en place un système de contrôle aux frontières. Concernant le calendrier des tests de résistance : lors de sa réunion des 24 et 25 mars, le Conseil européen a demandé l'organisation de « tests de résistance ». Le Conseil a invité l'ENSREG (groupe des régulateurs européens sur la sûreté nucléaire et la gestion des déchets radioactifs, formellement créé pour conseiller la Commission européenne) et la Commission à définir le plus rapidement possible l'étendue et les modalités de ces tests dans un cadre coordonné, à la lumière des enseignements tirés de l'accident qui s'est produit au Japon et avec la participation pleine et entière des États membres, en tirant pleinement parti de l'expertise disponible (notamment WENRA, club européen des autorités de sûreté). Le cahier des charges des « stress tests » européens a été adopté le 24 mai dernier par la Commission et les autorités de sûreté nucléaire des 27 États membres. Il demande une réévaluation ciblée des marges de sûreté des centrales nucléaires, portant sur les effets de phénomènes naturels extrêmes (séisme, inondation), sur les conséquences des scénarios de perte d'une ou plusieurs des fonctions de sûreté, et sur la gestion des accidents graves pouvant résulter de ces évènements. Les exploitants ont la responsabilité de mener ces stress tests sous le contrôle des autorités de sûreté nationales. Les autorités de sûreté rendront public leur rapport sur les résultats des « stress tests », et la Commission rendra compte des premiers résultats de ces exercices au Conseil européen du 9 décembre 2011. Sur le plan national, le Premier ministre a indiqué que la France tirera toutes les leçons du retour d'expérience de l'accident japonais. Le Premier ministre a ainsi demandé à I'ASN de mener une étude de la sûreté des installations nucléaires, en priorité les centrales nucléaires, au regard de l'accident en cours dans la centrale de Fukushima. L'ASN a ainsi publié le 9 mai une « présentation des évaluations complémentaires de la sûreté des installations nucléaires au regard de l'accident de Fukushima ». L'évaluation complémentaire de sûreté consistera en une réévaluation ciblée des marges de sûreté. Elle portera d'abord sur les effets de phénomènes naturels extrêmes (séisme, inondation et leur cumul) ; elle s'intéressera ensuite aux conséquences des scénarios de perte d'une ou plusieurs des fonctions de sûreté mises en cause à Fukushima (alimentations électriques et systèmes de refroidissement) quelle que soit son origine ; enfin elle traitera la gestion des accidents graves pouvant résulter de ces évènements et les conditions de recours aux entreprises prestataires. Dans ce but, seront en particulier étudiées les dispositions prises en compte dans le dimensionnement de l'installation et la conformité de l'installation aux exigences de conception qui lui sont applicables, la robustesse de l'installation au-delà de ce pour quoi elle est dimensionnée, et les possibilités de modification susceptible d'améliorer le niveau de sûreté de l'installation. Attachant la plus haute importance à ce que cette démarche soit effectuée de manière ouverte et transparente, le Premier ministre a demandé que le Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) y contribue à toutes les étapes. L'ASN a ainsi proposé au HCTISN de poursuivre son association à ces travaux selon des modalités à convenir en commun. Les évaluations complémentaires de sûreté donneront lieu dans un premier temps et pour chaque installation concernée à l'établissement par l'exploitant d'un rapport répondant au cahier des charges défini par l'ASN. Ces rapports, demandés pour la plupart avant le 15 septembre 2011, seront ensuite examinés par I'ASN avec l'appui de l'IRSN d'ici le 15 novembre 2011. Sur cette base, l'ASN livrera ses premières conclusions demandées par le Premier ministre pour la fin de l'année 2011. Concernant les chiffres du démantèlement des installations nucléaires : la loi du 28 juin 2006, et plus particulièrement son article 20, a pour objectif de garantir que les exploitants financent les charges de démantèlement des centrales et de gestion des déchets radioactifs, sans qu'il soit besoin de faire appel à la collectivité, ni aux générations futures. Pour ce faire, les exploitants nucléaires, parmi lesquels EDF, AREVA et le CEA, sont tenus d'évaluer leurs charges de long terme de façon prudente et d'inscrire les provisions correspondantes dans leurs comptes. Les exploitants sont également tenus de couvrir au moins 75 % de ces provisions par des portefeuilles d'actifs dédiés à compter du 29 juin 2011, et totalement à compter du 29 juin 2016. Ces actifs sont constitués dans des conditions de liquidité et de sécurité qui garantissent leur disponibilité au moment où l'on en aura besoin, pour démanteler les centrales et gérer les déchets radioactifs. Sans attendre l'échéance légale de fin juin 2011, EDF, AREVA et le CEA ont déjà constitué des portefeuilles d'actifs d'un montant d'environ 15,8 Mdeuros pour EDF, d'environ 5,3 Mdeuros pour AREVA et d'environ 10,4 Mdeuros pour le CEA pour la couverture de passifs s'élevant à la clôture des comptes de l'exercice 2010 à environ 17,9 Mdeuros pour EDF, 5,5 Mdeuros pour AREVA et 10,5 Mdeuros pour le CEA. Concernant la réunion de la Commission nationale d'évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs : la loi du 28 juin 2006 prévoit également que le contrôle des obligations des exploitants par l'autorité administrative soit évalué par une commission nationale indépendante (la « Commission nationale d'évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs »). Cette commission n'a pu être constituée qu'en septembre 2010 par la nomination de M. Ollier par le président de l'Assemblée nationale. Au cours de sa réunion constitutive, tenue le 7 juin 2011, notamment en présence de M. Jean-Paul Emorine, président de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire du Sénat, elle a désigné son président en la personne de M. Jean-Luc Lépine, inspecteur général des finances. Deux rapporteurs ont été mis à la disposition de la commission par le Gouvernement. Concernant le processus de démantèlement des centrales d'EDF : le démantèlement des réacteurs d'EDF actuellement en exploitation bénéficiera de deux atouts majeurs par rapport au démantèlement de la centrale de Brennilis que vous évoquez : la centrale nucléaire de Brennilis devait initialement être maintenue dans un état intermédiaire de démantèlement sous surveillance pendant plusieurs dizaines d'années. Considérant que cette stratégie présente davantage d'inconvénients et de risques, notamment la perte progressive des connaissances de l'outil industriel, comparée à un démantèlement complet immédiat, l'exploitant a déposé une demande visant à démanteler complètement l'installation ; les centrales aujourd'hui en exploitation bénéficieront pour leur démantèlement du retour d'expérience des réacteurs qui auront été démantelés ou qui seront en cours de démantèlement à ce moment.
S.R.C. 13 REP_PUB Haute-Normandie O