DEBAT :
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PROJET DE LOI CRÉATION ET INTERNET Mme la présidente. La parole est à M. Franck
Riester, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire. M.
Franck Riester. Madame la ministre de la culture et de la
communication, le projet de loi relatif à la protection et à la diffusion de la
création sur Internet va être examiné par notre assemblée cette semaine. Ce
projet de loi, déjà adopté à l'unanimité au Sénat, répond d'abord à une urgence
économique ; c'est en effet une véritable hémorragie qui touche nos industries
culturelles. Le marché de la musique a ainsi perdu la moitié de sa valeur sur
les cinq dernières années. Le cinéma commence à son tour à être durement
frappé par le piratage : 450 000 films sont téléchargés illégalement par jour,
soit l'équivalent du nombre de places de cinéma vendues quotidiennement. Dans
un contexte économique et social particulièrement difficile, plusieurs filières
économiques sont ainsi menacées : 10 000 emplois pourraient être supprimés d'ici
à 2012 si nous ne réagissons pas. La force de ce projet de loi, qui repose
sur un consensus historique, signé à l'Élysée entre les professionnels de la
culture, de l'Internet et des télécommunications, est d'apporter une réponse
radicalement différente au téléchargement illégal. Prévention et pédagogie
sont au coeur du mécanisme de la réponse graduée, qui prévoit deux
avertissements préalables avant une éventuelle suspension temporaire de l'accès
Internet. Rien à voir donc avec le dispositif pénal actuel, avec ses amendes et
peines de prison. Surtout, le contexte est aujourd'hui véritablement
différent : l'offre légale ne cesse de croître. L'industrie du disque a supprimé
les mesures anti-copie, rendant ainsi bien plus facile l'achat de musique sur
Internet, et le cinéma va mettre plus rapidement les films à disposition des
consommateurs après leur sortie en salle. Aussi, madame la ministre, à la
veille de l'examen de ce texte, pouvez-vous dissiper les dernières craintes de
certains de nos collègues et rappeler l'importance de ce projet de loi pour nos
filières culturelles et, au-delà, pour ce qui est une des grandes fiertés de
notre pays : notre exception culturelle ? (Applaudissements sur les bancs du
groupe UMP.) Mme la présidente. La parole est à Mme
Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Mme
Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le député Franck Riester, nous sommes en effet dans une situation
de crise profonde : 50 % de l'économie de la musique, par exemple, s'est
effondrée. Cette économie repose essentiellement sur des PME : 99 % de ces
maisons comptent moins de vingt salariés. Le projet de loi repose sur des
accords interprofessionnels, ce qui est très important. Ce n'est pas la musique
contre le cinéma, et Internet contre tous les autres, mais la musique avec le
cinéma et avec les acteurs Internet. Tous ont conscience d'avoir besoin les uns
des autres. C'est un projet de loi qui se veut favorable aux internautes, car
il vise à accroître l'offre légale : toujours plus de films et de musique
disponibles, avec des modèles très différents, comme l'écoute en
streaming, sur ces sites où vous pouvez écouter gratuitement autant de
musique que vous voulez tout en respectant le droit des auteurs. Ce projet se
veut également pédagogique : un mail est d'abord envoyé, puis un second, puis
une lettre recommandée, la sanction n'arrivant qu'ensuite, car il est légitime
de persuader, de convaincre avant de sanctionner. Et il s'agit de sanctionner de
manière mesurée : la sanction résultera d'un dialogue entre l'internaute et la
Haute autorité. La liberté sur Internet existe et nous devons la défendre,
mais le droit des musiciens, des auteurs, des créateurs d'être rémunérés pour
leur travail existe aussi, surtout dans un pays de culture comme la France.
C'est quelque chose dont nous sommes fiers, et il ne faut pas craindre de
défendre ces pratiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe
UMP.) M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
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