Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Luc Pérat attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur les mesures concernant les mineurs prévues dans le projet de loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs. Cette réforme porte principalement sur la réduction des délais de jugement et l'attention toute particulière portée aux 16-18 ans. Elle prévoit notamment un élargissement des possibilités de réponses répressives, illustré par la mise en place d'un tribunal correctionnel pour mineurs. Cette dernière mesure fait craindre à l'UNICEF-France, organisme qui veille au respect de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE), un rapprochement avec la justice des majeurs. De même, ces mesures posent la question de leur financement, notamment l'utilisation plus large du dispositif de centres éducatifs fermés, au regard des moyens dont dispose aujourd'hui la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), dont les effectifs ont baissé de près de 400 postes entre 2008 et 2010. Enfin, ces propositions apparaissent prématurées alors qu'un travail de fonds sur la rédaction d'un code pénal des mineurs est en cours depuis trois ans entre les acteurs associatifs et l'administration centrale. C'est pourquoi il lui demande les réponses qu'il envisage d'apporter face aux inquiétudes de l'UNICEF.
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Texte de la REPONSE :
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La loi n° 2011-939 du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs modifie l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante pour améliorer le fonctionnement de la justice pénale des mineurs. Ce texte favorise la prise en compte de la personnalité du mineur et renforce la lutte contre la récidive ainsi que la responsabilisation des parents pour adapter la réponse pénale à l'évolution de la délinquance des mineurs. La création d'un tribunal correctionnel pour mineurs, validée par la décision du Conseil constitutionnel n° 2011-635 DC du 4 août 2011, reprend une proposition de la commission présidée par le M. le recteur Varinard. Il s'agit de l'expression du principe de progressivité de la justice pénale des mineurs en matière processuelle : à la progressivité des sanctions doit correspondre une progression dans les formations compétentes pour juger les mineurs récidivistes. Le mineur âgé de plus de seize ans poursuivi, en état de récidive légale, pour un ou plusieurs délits dont la peine encourue est supérieure ou égale à trois ans sera jugé par une juridiction adaptée et selon une procédure adaptée : un tribunal correctionnel pour mineurs appliquant les spécificités procédurales prévues par l'ordonnance du 2 février 1945 sera en effet compétent. Conformément aux dispositions du paragraphe 3 de l'article 40 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ratifiée par la France le 7 août 1990, les mineurs ne seront donc pas jugés comme des adultes. L'introduction de la possibilité pour le parquet de faire convoquer le mineur par officier de police judiciaire devant le tribunal pour enfants accélère le traitement des dossiers impliquant des mineurs déjà connus de la justice. Il ne s'agit pas de juger immédiatement le mineur, mais de le faire comparaître dans un délai compris entre dix jours et deux mois dans des conditions strictement encadrées validées par la décision du Conseil constitutionnel du 4 août 2011. Ce dispositif est applicable aux mineurs de treize à seize ans lorsque la peine encourue est d'au moins cinq ans (même seuil que celui permettant la prolongation de garde à vue de ces mineurs, le recours à la procédure de présentation immédiate ou le placement sous contrôle judiciaire) et aux mineurs de seize à dix-huit ans lorsque la peine encourue est d'au moins trois ans (seuil permettant leur placement en détention provisoire). La loi du 10 août 2011 précitée élargit les possibilités de recourir au dispositif des centres éducatifs fermés pour apporter une réponse adaptée à l'évolution de la délinquance juvénile et prévenir efficacement le risque de réitération tout en amorçant une action d'éducation en milieu contraint. Les centres éducatifs fermés offrent une réponse pertinente aux mineurs les plus ancrés dans la délinquance et à ceux qui commettent les actes les plus graves. La prise en charge pluridisciplinaire et très renforcée - les mineurs ne peuvent sortir sans accompagnement et sont pris en charge par des personnels de la protection judiciaire de la jeunesse, de l'éducation nationale, de la santé - favorise l'éducation de mineurs délinquants manquant gravement de repères. La direction de la protection judiciaire de la jeunesse s'efforce quotidiennement d'améliorer l'offre en ce domaine. La direction de la protection judiciaire a observé que le caractère contenant des centres éducatifs fermés offre aux magistrats une alternative supplémentaire à l'incarcération. Le financement de l'élargissement du recours aux centres éducatifs fermés a fait l'objet d'une évaluation dans l'étude d'impact qui accompagne le projet de loi. L'hypothèse retenue consiste à créer vingt nouveaux CEF par transformation d'unités éducatives d'hébergement collectif (UEHC), soit un montant d'investissement de 15 Meuros, un surcoût de masse salariale de 3 Meuros (hors cotisations pensions) et un surcoût de fonctionnement annuel de 0,4 Meuros. Quatre-vingt-dix postes d'éducateurs supplémentaires ont été prévus à cette fin. Il convient enfin de rappeler que la protection judiciaire de la jeunesse poursuit une politique de développement des CEF et d'amélioration de la prise en charge dans ce cadre : suivi médical, notamment psychologique, suivi éducatif, préparation des conditions de sortie du dispositif.
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