Texte de la QUESTION :
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Mme Martine Billard interroge M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les principes qu'enfreignent la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites. Dans le protocole international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), ratifié par la France le 4 novembre 1980, et dont le comité des droits économiques et sociaux des Nations-unies est chargé de veiller au respect, des articles stipulent explicitement que : « tous les peuples assurent librement leur développement économique, social et culturel » (article 1er, paragraphe 1), « chacun des États parties au présent pacte s'engage à agir en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le présent pacte par tous les moyens appropriés, y compris en particulier l'adoption de mesures législatives » (article 2, paragraphe 1), « les États parties au présent pacte reconnaissent que, dans la jouissance des droits assurés par l'État conformément au présent pacte, l'État ne peut soumettre ces droits qu'aux limitations établies par la loi, dans la seule mesure compatible avec la nature de ces droits et exclusivement en vue de favoriser le bien-être général dans une société démocratique » (article 4). Ce protocole consacre donc le « principe de non-régression » en matière de droits économiques, sociaux et culturels en soulignant l'existence d'une obligation de progrès, d'amélioration, affirmée dans l'observation générale n° 3 du comité des droits économiques sociaux et culturels des Nations-unies. Les dispositions contenues dans ce protocole sont d'effet direct et invocable devant le juge national, comme rappelé par le comité des Nations-unies tel que le mentionne le site du ministère des affaires étrangères : « le comité a regretté la rareté des décisions de justice faisant référence aux dispositions du pacte, alors même que ce dernier est supposé avoir un effet direct en droit français. Il s'est également montré préoccupé par l'insécurité grandissante de l'emploi ». La charte sociale européenne, signée par la France, énonce en son article 23 « [qu']en vue d'assurer l'exercice effectif du droit des personnes âgées à une protection sociale, les parties s'engagent à prendre ou à promouvoir [...] des mesures appropriées tendant notamment [...] à permettre aux personnes âgées de demeurer le plus longtemps possible des membres à part entière de la société, moyennant des ressources suffisantes pour leur permettre de mener une existence décente et de participer activement à la vie publique, sociale et culturelle ». La charte des droits fondamentaux et les conventions de l'OIT consacrent également la notion de progrès social dont le Président de la République a reconnu la prééminence sur les décisions du FMI et de l'OMC lors de son discours du 15 juin 2009, en appelant, notamment, « le libre échange à une obligation de réciprocité », déclaration ayant une valeur juridique selon la commission du droit international - New-York, ONU, 4 août 2006. Les déclarations de membres du Gouvernement vont en ce sens, notamment le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme le 22 octobre 2010 sur France 24 : « pour beaucoup de syndicats, et je les comprends, c'est une forme de régression sociale. Oui, bien sûr, clairement »; tout comme la décision du Président de l'Assemblée d'interrompre les débats n'ayant pas permis d'étudier et d'adopter des mesures financières alternatives plus conformes à la « justice sociale » et au droit de l'Union. La Cour de justice de l'Union européenne considère que le droit de l'Union participe à la construction « d'un ordre juridique à la mesure de la société qu'il doit régir » : « un droit conforme à l'idée de justice sociale et aux exigences de l'intégration européenne au niveau non seulement de l'économie mais aussi des peuples ». Le Conseil d'État (assemblée, 8 février 2007, n° 279522) engage la responsabilité de l'État en raison des obligations qui sont les siennes pour assurer le respect des conventions internationales par les autorités publiques, pour réparer l'ensemble des préjudices qui résultent de l'intervention d'une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux. Le débat à l'Assemblée nationale a été brutalement interrompu, ne permettant pas de débattre pleinement de la question d'un financement répondant à la justice sociale ni de la question légitime de la conventionnalité de la réforme des retraites, que « l'exception d'inconventionnalité » peut être invoquée par le justiciable puisque la réforme des retraites semble contraire à l'objectif de « justice sociale » protégé par la Cour de Luxembourg. Elle souhaiterait savoir ce qu'il compte faire pour se mettre en accord avec les traités internationaux.
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