FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 107465  de  M.   Braouezec Patrick ( Gauche démocrate et républicaine - Seine-Saint-Denis ) QE
Ministère interrogé :  Affaires étrangères et européennes
Ministère attributaire :  Affaires étrangères et européennes
Question publiée au JO le :  03/05/2011  page :  4367
Réponse publiée au JO le :  25/10/2011  page :  11297
Rubrique :  politique extérieure
Tête d'analyse :  Tchad
Analyse :  situation politique. attitude de la France
Texte de la QUESTION : M. Patrick Braouezec alerte M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur le soutien français au régime d'Idriss Déby, arrivé au pouvoir il y a 21 ans par un coup d'État, et qui a remporté les législatives du 13 février 2011 au terme d'un scrutin entaché de fraudes manifestes, ce qui n'a empêché ni l'Union européenne - par la voix de Catherine Ashton, haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, qui s'est « [félicitée] du bon déroulement des élections législatives au Tchad et du climat apaisé et serein qui a marqué la campagne électorale et le scrutin » -, ni la France - le ministère français des affaires étrangères a salué, le 17 février dernier, « le bon déroulement des élections législatives » - de les cautionner. Les irrégularités dénoncées par la coalition des partis politiques pour la défense de la constitution (CPDC) ont porté sur les bureaux de vote fictifs, le bourrage d'urnes, l'encre non indélébile fournie par la commission électorale nationale indépendante (CENI), les cartes d'électeurs non distribuées, non conformes, manquantes ou surnuméraires. À cela il faut ajouter la corruption de certains chefs traditionnels, des agressions multiples, et le fait que des moyens considérables de l'État ont été mis à la disposition du parti au pouvoir pour mener sa campagne. Enfin, l'opposition a également remis en cause l'indépendance de la CENI mise en place par le régime. L'ensemble des requêtes concernant ces irrégularités, porté devant le Conseil constitutionnel par les principaux représentants de l'opposition, a été rejeté. En conclusion, il aimerait savoir ce que le Gouvernement compte faire pour cesser de cautionner l'élection présidentielle d'un candidat qui n'offre aucune garantie démocratique, alors que la diplomatie française vient de désavouer les dictateurs tunisien, égyptien et libyen.
Texte de la REPONSE : La France entretient avec le Tchad des relations bilatérales étroites et apporte son aide à ce pays, notamment dans le domaine de la gouvernance, du soutien de l'État de droit et des droits de l'Homme. La France y encourage le développement de la démocratie. Le Tchad a en effet connu une grave crise politique après les élections de 2006 boycottées par l'opposition, qui s'est traduite par une crispation de la vie politique, la multiplication de mouvements rebelles et des attaques sur la capitale, N'Djamena, dont les dernières ont eu lieu en février 2008 et mai 2009. Afin d'apaiser cette tension politique, la France s'est engagée au côté de l'Union européenne et a contribué à la signature des accords du 13 août 2007 entre les acteurs politiques et les mouvements politico-militaires tchadiens. Ces accords visaient à démocratiser la vie politique tchadienne à travers un dialogue politique régulier, sous l'égide d'un comité de suivi comprenant des représentants du Gouvernement et de l'opposition, dans le but de tenir des élections législatives dans des conditions crédibles et transparentes. À cette fin, un recensement national a eu lieu puis un enregistrement des électeurs sur tout le pays, sous la direction de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à la composition paritaire. Les autorités tchadiennes ont poursuivi le dialogue politique de façon régulière en présence de leurs partenaires de la communauté internationale et ont finalement pu organiser, avec leur aide, les élections législatives le 13 février 2011. Ces élections ont eu lieu dans le calme, en présence de quatre-vingts observateurs de l'Union européenne mais également d'observateurs de l'Union africaine (UA), de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) et d'organisations de la société civile tchadienne regroupées au sein de la Coalition indépendante pour des élections libres (CIEL). Les observateurs européens ont pu constater que les opérations de vote s'étaient déroulées généralement dans le calme. Ils ont également relevé un certain nombre de manquements qui ont fait l'objet de recommandations à la CENI, dans un rapport rendu le 27 mai 2011. La plupart de ces manquements découlaient du manque de professionnalisation dans les pratiques de la CENI, se répercutant au niveau des bureaux de vote, et de difficultés logistiques diverses qui ont entravé la distribution du matériel électoral ainsi que des cartes d'électeurs. Cependant, la Cour constitutionnelle a examiné près de deux cents recours, dont certains ont été suivis d'annulations de scrutins. Des élections partielles ont été à nouveau organisées le 6 mai 2011 dans trois circonscriptions. Si les partis politiques ont pu faire campagne librement, il est également vrai que les résultats finaux reflètent la domination du parti de la majorité au pouvoir, doté de structures nationales et de plus de moyens que les partis de l'opposition. L'élection présidentielle a eu lieu quant à elle le 25 avril et s'est déroulée en présence d'observateurs de la société civile tchadienne et d'observateurs internationaux de l'UA et de l'OIF. Cette élection s'est déroulée dans le calme, mais elle a été marquée par l'absence des principaux candidats de l'opposition. Malgré des négociations avec la CENI en vue d'améliorer les conditions d'organisation du scrutin, ceux-ci ont estimé que les conditions n'étaient pas réunies pour leur participation et ont suspendu leur candidature. Le Président Idriss Déby a été élu face à deux autres candidats dans un scrutin validé par le Conseil constitutionnel. Dans ce contexte, la France, au côté de l'Union européenne, continue de plaider auprès des autorités tchadiennes pour la poursuite du dialogue politique, qui a permis de tenir les élections législatives dans le calme. Le processus de démocratisation de la vie politique au Tchad doit en effet se poursuivre afin de permettre la réintégration des anciens rebelles et de parachever les engagements pris en 2007, dont certains portaient notamment sur la neutralité politique de l'administration et des chefs traditionnels.
GDR 13 REP_PUB Ile-de-France O