FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 108183  de  Mme   Marin Christine ( Union pour un Mouvement Populaire - Nord ) QE
Ministère interrogé :  Justice et libertés
Ministère attributaire :  Justice et libertés
Question publiée au JO le :  10/05/2011  page :  4725
Réponse publiée au JO le :  26/07/2011  page :  8184
Rubrique :  sécurité publique
Tête d'analyse :  sécurité des biens et des personnes
Analyse :  usurpations d'identité. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : Mme Christine Marin attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la question de l'usurpation d'identité en France. On estime en effet que plus de 200 000 personnes se font usurper leur identité chaque année. Il suffit en effet de jeter un relevé bancaire, une feuille de soin, une facture, ou n'importe quels papiers administratifs pour être victime de cette arnaque. Au-delà du coût financier, cette escroquerie a d'importantes conséquences sur la privée des victimes. On pense ainsi aux familles brisées, aux interdits bancaires, aux maladies, aux pertes d'emploi, etc. La liste peut encore être longue, mais on constate surtout qu'il n'existe pas de délit en cas d'usurpation d'identité ; même si l'article 434-23 et l'article 433-19 du code pénal condamne le fait de signer un acte authentique sous un état civil d'emprunt et le fait de prendre le nom d'un tiers, dans des circonstances qui ont déterminé ou auraient pu déterminer contre celui-ci des poursuites pénales. Elle lui demande donc de bien vouloir lui préciser quelles mesures il compte prendre pour remédier à cette problématique.
Texte de la REPONSE : L'usurpation d'identité peut être réprimée à plusieurs titres, en tant qu'infraction autonome, ou comme élément constitutif d'une autre infraction pouvant être réalisée par ce biais. Ainsi, l'article 434-23, alinéa 1, du code pénal réprime d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende le fait de prendre le nom d'un tiers dans des circonstances qui ont déterminé ou qui auraient pu déterminer contre celui-ci des poursuites pénales. L'alinéa 3 de cet article prévoit des peines similaires pour celui qui aura fait une fausse déclaration relative à l'état civil d'une personne, qui a déterminé ou qui aurait pu déterminer des poursuites pénales contre un tiers. La fourniture d'une fausse identité (ou d'une fausse adresse) à un agent assermenté pour constater les infractions à la police et à l'exploitation des chemins de fer est un délit puni d'une peine d'amende de 3 750 euros, selon les termes de l'article 23 de la loi du 15 juillet 1845 relative à la police des chemins de fer. L'article 433-19 du code pénal punit d'une peine de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende l'altération ou la modification illicite du nom dans un acte public, ou authentique, ou dans un document administratif destiné à l'autorité publique. Les articles 441-2, 441-3, 441-5 et à 441-6 du code pénal répriment la fabrication, la détention, la fourniture, l'usage et l'obtention indue d'un faux document administratif constatant un droit, une identité, une qualité ou une autorisation. En outre, la prise du nom d'un tiers peut être un élément constitutif des infractions d'escroquerie lorsque l'auteur de l'infraction fait usage d'un faux nom de surcroît, la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure a créé une infraction d'usurpation d'identité à portée générale, incluant le champ des communications électroniques. L'article 2 de cette loi insère désormais après l'article 226-4 du code pénal un article 226-4-1 qui réprime « le fait d'usurper l'identité d'un tiers ou de faire usage d'une ou plusieurs données de toute nature permettant de l'identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d'autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération », et le punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Cette infraction est punie des mêmes peines lorsqu'elle est commise sur un réseau de communication au public en ligne. de plus, une proposition de loi, déposée au Sénat, relative à la protection de l'identité prévoit dans le cadre des atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données, la création d'une circonstance aggravante lorsque l'infraction a été commise à l'encontre d'un traitement automatisé de données à caractère personnel mis en oeuvre par l'État. S'agissant des conséquences subies par les victimes d'usurpation d'identité, le casier judiciaire national traite avec une particulière attention les condamnations pour prise du nom d'un tiers et incite les juridictions à lui communiquer l'identité de la victime. Une alerte est alors systématiquement créée dans le dossier de celle-ci pour éviter d'y intégrer de nouvelles condamnations qui ne lui seraient pas imputables : si une condamnation est adressée au casier judiciaire sous une identité ayant fait l'objet d'une usurpation dans le passé, le procureur de la République est systématiquement sollicité pour obtenir confirmation de l'identité réelle du condamné. Il convient de rappeler que la régularisation du casier judiciaire d'une victime d'usurpation d'identité n'impose pas que l'usurpateur soit condamné pour ces faits. De nombreux procureurs de la République signalent d'initiative au casier judiciaire les cas d'usurpations avérées pour effacer la condamnation du casier judiciaire de la victime. Cette procédure administrative peut notamment être utilisée quand l'usurpateur n'est pas identifié ou quand il est décédé. Par ailleurs, lorsque le procureur de la République constate au cours d'une procédure quelconque qu'une personne identifiée a été condamnée en usurpant un état civil, il peut également sur le fondement de l'article 778 du CPP solliciter la rectification des mentions du casier judiciaire par requête à la juridiction qui a prononcé la condamnation initiale. Cette procédure spécifique n'exige pas comme condition préalable que l'usurpateur ait fait l'objet de poursuites pénales et permet d'enregistrer la condamnation litigieuse dans le casier judiciaire de l'usurpateur. Le nombre de condamnations prononcées pour les infractions relatives à la fraude documentaire à l'identité est stable depuis cinq ans, aux alentours de 11 500 condamnations. Plus précisément, sur les condamnations du chef de prise de nom d'un tiers pouvant déterminer des poursuites pénales prononcées sur le fondement des dispositions de l'article 434-23 du code pénal, on relève que le nombre d'infractions ayant donné lieu à condamnation, en hausse continue de 15 % entre 2005 et 2008, a connu une légère baisse en 2009 portant ce nombre à 3 570. Il apparaît qu'une part significative des usurpations d'identité est commise pour échapper à la répression d'infractions à la circulation routière. Le quantum moyen des peines prononcées est assez stable. En 2009, il s'agit de 3,1 mois pour les peines d'emprisonnement ferme et 396 euros pour les peines d'amende ferme. Compte tenu des évolutions législatives et notamment de la création d'une infraction générale d'usurpation d'identité, il apparaît que l'arsenal législatif est suffisamment complet, permettant de réprimer ce délit à plusieurs titres, en tant qu'infraction autonome, ou comme élément constitutif d'une autre infraction pouvant être réalisée par ce biais. La problématique posée par ce type de faits est davantage liée à la difficulté de découvrir l'infraction, commise par définition à l'insu de tous, puis d'en appréhender l'auteur.
UMP 13 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O