Texte de la QUESTION :
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M. Jean-Luc Reitzer attire l'attention de M. le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants au sujet du droit à réparation des orphelins de guerre et pupilles de la Nation. Deux décrets ont été adoptés par le passé pour répondre à cette question. Le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 a institué une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. Le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 a institué une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale. À ce titre, une indemnisation spéciale a été instaurée au bénéfice des orphelins dont les parents sont morts en déportation ou ont été exécutés pour actes de résistance, occultant la condition des autres orphelins de guerre. Afin d'aboutir à un système plus juste, le Président de la République a souhaité procéder à une unification de ces dispositifs d'indemnisation, assortis de mesures complémentaires, rétablissant ainsi une certaine équité. Sur la base du rapport Audouin, la commission nationale de concertation associant les représentants du monde associatif concerné et l'administration a remis différentes hypothèses au Gouvernement. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui présenter les nouvelles modalités d'indemnisation envisagées par le Gouvernement, tout en indiquant le calendrier qu'il entend mettre en oeuvre pour répondre au droit à réparation des orphelins de guerre.
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Texte de la REPONSE :
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INDEMNISATION DES ORPHELINS DE GUERRE M. le président. La parole est à M. Jean-Luc
Reitzer, pour exposer sa question, n° 1081, relative à l'indemnisation des
orphelins de guerre. M. Jean-Luc Reitzer. Monsieur le
secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants, avant de vous poser
ma question qui concerne le droit à réparation des orphelins de guerre et
pupilles de la nation, je tiens à dire solennellement dans cet hémicycle, au nom
de tous les élus alsaciens et de toute la population de l'Alsace, combien les
paroles prononcées par le Président de la République à Colmar, le 8 mai dernier,
sont allées droit au coeur de chacune et de chacun d'entre nous. Vous étiez
présent et vous avez vu que nombre d'entre nous avaient ce jour-là les larmes
aux yeux. Le Président de la République a su trouver des mots justes, émouvants
et sincères pour parler du drame alsacien dans toute sa diversité, y compris et
surtout de l'incorporation de force. Mais ce beau discours ne résout
évidemment pas tous les dossiers concernant le deuxième conflit mondial,
notamment celui des orphelins et pupilles de la nation. Deux décrets ont été
adoptés par le passé : celui du 13 juillet 2000, qui a institué une mesure de
réparation pour les orphelins dont les parents avaient été victimes de
persécutions antisémites durant la deuxième guerre mondiale ; celui du 27
juillet 2004, qui a institué une aide financière en reconnaissance des
souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d'actes
de barbarie durant la même période et, à ce titre, une indemnisation spéciale a
été instaurée au bénéfice des orphelins dont les parents sont morts en
déportation ou ont été persécutés pour actes de résistance. Pour aboutir à un
système plus équitable, le Président de la République a souhaité procéder à une
unification des dispositifs d'indemnisation, assortie de mesures
complémentaires. Sur la base du rapport Audouin, la Commission nationale de
concertation a remis différentes hypothèses au Gouvernement, c'est-à-dire
vraisemblablement à vous-même. Je souhaite savoir quelles sont les nouvelles
modalités d'indemnisation envisagées par le Gouvernement et quel calendrier
celui-ci entend mettre en oeuvre pour répondre au droit à réparation des
orphelins de guerre. M. le président. La parole est à M.
Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens
combattants. M. Hubert Falco, secrétaire d'État à la
défense et aux anciens combattants. Cher Jean-Luc Reitzer, les deux décrets
de 2000 et 2004 ont institué un dispositif spécifique d'indemnisation des
orphelins de certaines victimes de la seconde guerre mondiale : en 2000, les
victimes de persécutions antisémites, et, en 2004, les victimes d'actes
qualifiés d'actes de barbarie. La notion d'actes de barbarie n'est visée que
dans le titre du décret de 2004, sans être définie dans le corps du texte,
lequel renvoie à des articles précis du code des pensions militaires
d'invalidité et des victimes de la guerre correspondant à des catégories de
victimes bien déterminées. Deux demandes de natures très différentes sont
apparues depuis 2004. D'une part, les associations représentatives de déportés,
internés et résistants ont souligné que le décret de 2004 ne prenait pas en
compte, à leurs yeux, l'ensemble des cas pouvant relever de la barbarie nazie,
malgré les inflexions de l'administration au fil du temps ; d'autre part, les
associations dites " généralistes " d'orphelins de guerre ont demandé que ce
dispositif de réparation soit étendu à l'ensemble des orphelins de tous les
conflits. En 2007, le Président de la République a estimé que les décrets de
2000 et de 2004 n'avaient pu régler toutes les situations de manière équitable
et lisible. Il a demandé au Gouvernement de rédiger un décret unique qui
remplacerait et compléterait les deux décrets existants. À cet effet, en mars
2009, un rapport d'analyse juridique et financier a été remis par le préfet
honoraire Jean-Yves Audouin. Le même mois, une commission nationale de
concertation a été chargée, à partir des données contenues dans ce rapport, de
discuter des recommandations qui pourraient en être tirées. Cette commission
associait des représentants de l'administration, du monde combattant, des
déportés, internés et résistants, et des associations d'orphelins de guerre. La
commission de concertation a terminé ses travaux à la fin de l'année 2009. Elle
n'a malheureusement pas été en mesure de dégager une position consensuelle dont
le Gouvernement aurait pu se saisir comme base pour une mise en oeuvre rapide.
En effet, une ligne de partage sépare les tenants d'une indemnisation élargie
aux orphelins de tous les conflits et les tenants d'une limitation des
extensions aux seuls orphelins de victimes d'actes de barbarie durant la Seconde
Guerre mondiale. Deux scenarii sont donc présentés par la commission
au Gouvernement, assortis des estimations financières afférentes. Pour des
raisons tant de principe que de coût, le Gouvernement ne peut envisager
aujourd'hui l'élargissement du dispositif actuel aux orphelins de tous les
conflits. Pour des raisons de principe tout d'abord : une telle
généralisation romprait complètement avec la justification fondamentale du
dispositif, qui est le caractère spécifique de la reconnaissance des conditions
d'extrême barbarie qui ont caractérisé certaines disparitions pendant la Seconde
Guerre mondiale et soulèverait inévitablement la question du traitement réservé
aux orphelins d'autres catégories de victimes du devoir. Ensuite, le
Gouvernement ne peut non plus envisager une extension totale du dispositif pour
des raisons de coût : l'indemnisation des orphelins de victimes de tous les
conflits coûterait, selon les hypothèses retenues, entre 1 et 2 milliards
d'euros en 2011, suivis d'un coût récurrent, à partir de 2012, compris entre 150
et 300 millions d'euros. Le Gouvernement a la responsabilité et le devoir de
prendre des décisions dont l'impact financier pour la nation est compatible avec
la capacité de nos finances publiques.
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