Texte de la QUESTION :
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M. Éric Raoult attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur les différentes accusations de massacres, perpétrés en Côte d'Ivoire, par les camps Ouattara et Gbagbo. En effet, après la décision d'offensive des forces militaires des ex-rebelles de MM. Soro et Ouattara, notamment dans l'ouest de la Côte d'Ivoire, des témoignages concordants sont venus corroborer que des règlements de compte étaient venus ensanglanter cette avancée des troupes venues du nord. Aussi la prise de Douékoué, il est fait état d'un massacre de 300, voire 800 personnes, qui auraient été exécutées sommairement. D'autres cas auraient été signalés dans différents points de passages des militaires ralliés au nouveau président ivoirien. Ces massacres ont été signalés par des observateurs internationaux, et condamnés par l'ONU. Il semblerait que la France n'ait pas dénoncé avec suffisamment de force ces exactions inqualifiables qui laissent supposer une pratique d'épuration d'un camp contre l'autre, principalement contre les populations civiles. La France est très écoutée et suivie en Côte d'Ivoire, notamment par les partisans de M. Ouattara. Notre pays devrait, sans ingérence, rappeler le camp Ouattara à une position respectueuse des droits de l'Homme, en condamnant très fermement ces violences, d'ailleurs souvent interethniques. Des poursuites pénales, après une enquête internationale objective, devraient être obtenues. Cette situation de massacres tribaux ne peut pas être tolérée plus longtemps, en raison du fait que les troupes de M. Ouattara seraient celles du nouveau président élu. Il lui demande donc de lui indiquer sa position sur ce dossier.
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Texte de la REPONSE :
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Dès le début de la crise survenue au lendemain du second tour de l'élection présidentielle en Côte d'Ivoire, le 28 novembre 2010, la France s'est attachée à faciliter une résolution pacifique de ce conflit dans le respect des décisions des Nations unies, de l'Union africaine et de la CEDEAO. La France a joué un rôle décisif au Conseil de sécurité, comme au Conseil des droits de l'Homme des Nations unies, pour faire cesser les graves violations des droits de l'Homme, d'assurer la protection des populations civiles et de renforcer la lutte contre l'impunité à l'égard de tous les auteurs d'atrocités commises en Côte-d'Ivoire. C'est également le sens de son action au sein de l'Union européenne. Au Conseil des droits de l'Homme, la France a soutenu la convocation de la session spéciale du 23 décembre 2010 sur la situation des droits de l'Homme en Côte d'Ivoire. À la suite de la présentation en mars d'un rapport de la haute commissaire aux droits de l'Homme, la France a contribué à l'adoption lors de la 16e session du Conseil des droits de l'Homme, le 25 mars 2011, d'une résolution créant une commission d'enquête internationale chargée d'enquêter sur l'ensemble des violations des droits de l'Homme commises sur le territoire ivoirien depuis le 28 novembre 2010. Cette commission présentera les résultats de son enquête au mois de juin prochain. Sur la base de ses recommandations, il appartiendra à la justice ivoirienne de poursuivre les auteurs et les responsables de ces crimes. La France s'est également attachée à mobiliser le Conseil de sécurité en vue de faire cesser les violations des droits de l'Homme et du droit humanitaire international en Côte d'Ivoire. Conjointement avec le Nigeria, notre pays a joué un rôle déterminant dans l'adoption, le 30 mars 2011, par le Conseil de sécurité de la résolution 1975 autorisant l'ONUCI « dans le cadre de l'exécution impartiale de son mandat, à utiliser tous les moyens nécessaires pour s'acquitter de la tâche qui lui incombe de protéger les civils menacés d'actes de violence physique imminente, dans la limite de ses capacités et dans ses zones de déploiement, y compris pour empêcher l'utilisation d'armes lourdes contre la population civile ». Le président Ouattara s'est engagé à rétablir l'état de droit, à lutter contre l'impunité et à oeuvrer à la réconciliation des Ivoiriens meurtris par une décennie de violences et de déchirements. Il a marqué sa détermination à faire la lumière sur toutes les exactions commises depuis le 28 novembre 2010 et à traduire en justice les auteurs de ces crimes. Le chef de l'État ivoirien a réitéré cet engagement dans la lettre qu'il a adressée au procureur de la Cour pénale internationale. La France a marqué sa disponibilité à apporter son assistance à la Côte d'Ivoire pour mener à bien les objectifs définis par le chef de l'État ivoirien dans ce domaine. Dans son discours du 21 mai, prononcé lors de son déplacement en Côte d'Ivoire à l'occasion de l'investiture du président Ouattara, le président de la République a rappelé le rôle central de la promotion et de la protection des droits de l'Homme dans la politique étrangère de la France. S'agissant des tragiques événements de Duékoué, que la France a aussitôt condamnés avec la plus grande fermeté, il est indispensable que toute la lumière soit faite sur ces crimes comme sur l'ensemble des exactions commises depuis le 28 novembre 2010 et que les auteurs soient identifiés et traduits en justice. La France souhaite que soient prises toutes les mesures nécessaires pour faire cesser sans délai ces atrocités et en juger les auteurs, afin de permettre aux populations sinistrées, en particulier dans l'ouest du pays, de regagner leurs foyers dans les meilleures conditions de sécurité, alors que plus d'un million de personnes réfugiées ou déplacées ont fui ces zones d'insécurité chronique. C'est pourquoi la France souhaite que le mandat de l'ONUCI soit prolongé, conformément au souhait exprimé par le Président ivoirien, et que cette force soit en mesure de jouer pleinement son rôle de protection des civils sur l'ensemble du territoire ivoirien, en particulier dans les zones les plus affectées par le conflit, y compris dans l'ouest du pays, afin de faire cesser les violences, de prévenir de nouvelles exactions et de faciliter le retour des réfugiés. Cette action devra naturellement s'accompagner d'un effort accru de la communauté internationale en vue de soutenir la réforme des forces armées et de la justice en Côte d'Ivoire. La France y prendra toute sa part.
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