FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 110817  de  M.   Féron Hervé ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Meurthe-et-Moselle ) QE
Ministère interrogé :  Justice et libertés
Ministère attributaire :  Justice et libertés
Question publiée au JO le :  14/06/2011  page :  6220
Réponse publiée au JO le :  17/01/2012  page :  679
Rubrique :  droit pénal
Tête d'analyse :  peines
Analyse :  exécution. rapport parlementaire. propositions
Texte de la QUESTION : M. Hervé Féron attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur les propositions formulées dans le rapport d'un député de la majorité rendu le mardi 7 juin au Président de la République. Dans son rapport, le député propose d'instaurer une période de « placement sous main de justice ». « Une durée intangible durant laquelle la personne condamnée à une peine d'emprisonnement » doit, dit-il, « rendre des comptes à l'institution judiciaire et à la société. Ici deux ans signifient deux ans, vingt ans signifient vingt ans, perpétuité signifie perpétuité ». Cette période se diviserait en deux temps : la sanction, puis la mise à l'épreuve. Cela ne signifie pas que le condamné à vingt ans de prison resterait pendant vingt ans derrière les barreaux. Il pourrait très bien sortir avant, mais durant vingt ans, il serait suivi, évalué, accompagné dans sa réinsertion. Il lui demande quelle est sa position sur cette proposition.
Texte de la REPONSE : La justice n'est crédible et respectée que si ses décisions sont exécutées. Au plan pénal, l'effectivité de l'exécution des peines est une composante essentielle de la politique générale de lutte contre la délinquance et la récidive. L'exécution des peines constitue ainsi l'une des priorités de l'action du garde des sceaux à la tête du ministère de la justice et des libertés. C'est donc avec un grand intérêt qu'il a pris connaissance du rapport remis par le député Éric Ciotti au Président de la République. Le député propose, afin de lutter contre le phénomène d'« érosion de la peine », d'instaurer un placement sous main de justice, soit une durée intangible fixée par les juridictions pénales durant laquelle la personne condamnée à une peine d'emprisonnement ferme devrait rendre des comptes à l'institution judiciaire et à la société. Cette période serait divisée en deux temps, celui de la sanction effective et celui de la mise à l'épreuve. Notre droit pénal prévoit d'ores et déjà un ensemble d'outils permettant d'assurer l'effectivité de la peine prononcée. Il en est tout d'abord ainsi du système des réductions de peine. Les dispositions des articles 721 et D. 115 du code de procédure pénale issues de la loi du 9 mars 2004 prévoient l'application systématique de réductions de peines venant s'imputer dès le début de la détention sur la durée de la peine fixée par la condamnation. Le retrait du bénéfice de ce crédit de réduction de peine peut cependant être décidé par le juge de l'application des peines, après avis de la commission d'application des peines, en cas de mauvaise conduite du détenu pendant l'incarcération. de même, l'article 721-1 du code de procédure pénale conditionne le bénéfice des réductions supplémentaires de peine (de trois mois par année d'incarcération ou de sept jours par mois lorsque la durée d'incarcération restant à subir est inférieure à une année, ces quantas étant réduits pour les récidivistes) par décision du juge de l'application des peines à la démonstration par la personne condamnée d'efforts sérieux de réadaptation sociale, notamment en matière de travail, de formation, de soins et d'indemnisation des victimes. Ces réductions de peines sont en outre soumises, lorsque la personne est condamnée pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru et sauf décision contraire du juge de l'application des peines, au suivi en détention des soins qui lui sont proposés. Les réductions de peine dont peuvent bénéficier les personnes condamnées pour les crimes ou délits, commis sur un mineur, de meurtre, assassinat, torture ou acte de barbarie, viol, agression sexuelle ou atteinte sexuelle sont en outre réduites si elles refusent les soins qui leur sont proposés (deux mois par an ou quatre jours par mois ou, si elles sont en état de récidive légale, un mois par an ou deux jours par mois). Le système de réduction de peine prévoit par ailleurs un contrôle par la justice de l'intéressé pendant la période correspondant aux réductions de peines supplémentaires dont le détenu a bénéficié et qu'il effectue à l'extérieur de la prison. Le crédit de réduction de peine automatique peut en effet être retiré par la juridiction de jugement en cas de nouvelle condamnation à une peine d'emprisonnement pour des faits commis après la libération, pendant la période correspondant à la durée de cette réduction de peine. Le condamné exécute alors en détention le retrait de crédit de réductions de peine en plus de sa nouvelle peine. L'article 721-1 du code de procédure pénale dispose par ailleurs que le juge de l'application des peines peut soumettre le condamné ayant bénéficié de réductions de peine après sa libération à certaines obligations et interdictions, dont le non-respect est sanctionné par la réincarcération de l'intéressé pour la durée de tout ou partie des réductions de peines qui lui ont été octroyées. Une mesure de surveillance judiciaire peut également être prononcée par le tribunal de l'application des peines pour la durée des réductions de peines obtenues pendant l'incarcération (art. D. 147-39 du code de procédure pénale) lorsque la personne a été condamnée à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à sept ans pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru ou d'une durée supérieure ou égale à cinq ans pour un crime ou un délit commis une nouvelle fois en état de récidive légale. Ces réductions de peine constituent ainsi un outil indispensable à la prévention de la récidive. Les nombreuses modalités d'aménagement ou d'exécution de la fin de la peine d'emprisonnement des détenus écroués telles que prévues par notre droit pénal participent en outre à l'effectivité de la sanction pénale. Une peine aménagée constitue une peine exécutée qui favorise, la réinsertion des condamnés et la prévention de la récidive, d'autant que pendant toute la durée de la mesure d'aménagement de peine, qui correspond en principe à la durée de la peine restant à subir, le condamné fait l'objet d'un suivi par le juge de l'application des peines et les personnels des services pénitentiaires d'insertion et de probation. Par ailleurs, tout manquement volontaire par le condamné aux obligations qui lui sont fixées peut être sanctionné par le retrait de l'aménagement de peine et sa réincarcération. La possibilité d'un suivi judiciaire au-delà de la fin de la peine dans le cadre des mesures de sûreté (surveillance judiciaire, surveillance de sûreté et rétention de sûreté) est également prévue par le législateur pour les condamnés considérés comme particulièrement dangereux et pour lesquels le risque de récidive est très élevé.
S.R.C. 13 REP_PUB Lorraine O