Texte de la QUESTION :
|
M. François Loncle expose à M. le ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé des affaires européennes, que, depuis 2004, la Croatie est officiellement candidate à l'Union européenne. Issu de l'ancienne Yougoslavie, la Croatie a fait d'incontestables progrès. Elle jouit d'une économie stable et d'institutions consolidées. Elle a entrepris de substantielles réformes constitutionnelles, électorales et judiciaires, notamment en faveur des minorités. Elle a pleinement coopéré avec le Tribunal pénal international de La Haye, permettant l'arrestation ou l'extradition de citoyens croates accusés de crimes. Elle a réglé le différend frontalier avec la Slovénie, en particulier dans la baie de Piran. Elle a également conclu un accord avec l'Italie concernant la libre acquisition de biens immobiliers par des étrangers. Les négociations se sont accélérées depuis cinq ans, au point que 31 des 35 chapitres d'adhésion sont à présent clos et les quatre restants sont en bonne voie. C'est pourquoi la Commission européenne a recommandé, en juin 2011, de conclure rapidement les discussions avec la Croatie dont l'adhésion effective à l'UE pourrait intervenir en 2012 ou au plus tard en 2013. Or la France multiplie les manoeuvres dilatoires, dans le but de retarder l'entrée de ce pays dans la communauté européenne. Ainsi, elle s'oppose à la fixation d'une date de clôture des négociations. En outre, elle demande l'instauration d'un mécanisme spécial de contrôle de la candidature croate, entre la fin des pourparlers et l'intégration définitive. Enfin, elle exige la création d'une clause de sauvegarde destinée à empêcher la Croatie de participer à l'espace Schengen de libre circulation des citoyens européens. Il souhaite qu'il lui explique pourquoi le Gouvernement français adopte une attitude discriminatoire à l'égard d'un pays européen qui remplit toutes les conditions d'adhésion à l'UE. Il voudrait savoir si l'obstruction systématique de la France à l'élargissement répond à une orientation diplomatique ou bien à des considérations populistes.
|
Texte de la REPONSE :
|
Comme le Président de la République l'a souligné à plusieurs reprises, la France a toujours été particulièrement favorable à une adhésion rapide de la Croatie à l'Union européenne. C'est donc avec une grande satisfaction qu'elle a accueilli la recommandation de la Commission européenne du 10 juin 2011 ainsi que les conclusions de la conférence intergouvernementale du 30 juin 2011 qui, en clôturant officiellement un processus de négociations long de six ans, devraient permettre l'adhésion effective de la Croatie d'ici au 1er juillet 2013, une fois le processus de ratification achevé. La procédure d'adhésion à laquelle a été soumise la Croatie n'est en aucun cas discriminatoire et se trouve en complète adéquation avec les principes du « consensus renouvelé pour l'élargissement » agréés par le Conseil européen de décembre 2006 à Thessalonique. Ce consensus a marqué la volonté de tous les États membres de se livrer à un examen rigoureux, tout au long du processus, des mérites et des spécificités individuelles de chaque candidat afin de pouvoir apprécier au mieux leur capacité effective à intégrer l'Union européenne. La Croatie a engagé après l'ouverture en juin 2010 du chapitre 23, « Pouvoir judiciaire et droits fondamentaux », des efforts considérables en vue de satisfaire aux critères de clôture fixés par l'UE dans ce chapitre. Cependant, malgré les progrès accomplis au cours des derniers mois, certaines exigences de l'Union (indépendance du pouvoir judiciaire, traitement du lourd héritage des crimes de guerre, aboutissement des efforts menés contre la corruption, etc.) ne pourront être véritablement appréciées que dans la durée, au cours des prochains mois. C'est pourquoi, dans un contexte où les États membres et les opinions publiques sont de plus en plus sensibles aux questions d'État de droit, notamment dans les pays ayant vocation à adhérer à l'UE, et du débat en cours sur les problèmes de sécurité aux frontières extérieures de l'Union, la France a considéré qu'il était nécessaire de trouver des mécanismes qui permettent de s'assurer que les progrès croates seront bien poursuivis jusqu'à l'adhésion. Notre objectif, lorsque nous avons proposé, en accord avec l'Allemagne, l'introduction d'un mécanisme de surveillance et d'une clause de sauvegarde Schengen, n'était pas de retarder l'adhésion de la Croatie, mais au contraire de permettre qu'elle ait lieu rapidement et dans les meilleures conditions. Grâce à ces dispositifs, les négociations ont pu être conclues sans attendre que les réformes engagées par Zagreb aient produit des résultats concrets, ce qui a fait gagner plusieurs années à la candidature croate. Par ailleurs, dans l'hypothèse, que nous ne souhaitons pas, où ces progrès ne seraient pas jugés complètement satisfaisants à la veille de l'adhésion, il est important que l'Union puisse disposer d'un levier incitatif pour que la Croatie poursuive bien ses efforts après l'adhésion. L'adhésion prochaine de la Croatie marque un moment fort pour l'Union européenne : par son exemple, la Croatie montre la voie à suivre aux Balkans occidentaux et confirme que, si les réformes nécessaires sont effectuées, la perspective d'adhésion des pays de la région, ouverte en 2000 à Zagreb, sous présidence française de l'Union européenne, constitue bien une réalité.
|