Texte de la QUESTION :
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M. Philippe Duron attire l'attention de M. le ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, sur la couverture du territoire français en très haut débit. Le 14 Juin 2010, le Premier Ministre a dévoilé le programme national très haut débit, auquel l'État consacrera 2 milliards d'euros. Ce programme vise à accompagner les collectivités et les opérateurs qui souhaitent déployer leurs réseaux. Il comprend une phase de lancement, qui permettra de recueillir les intentions des opérateurs privés en termes de déploiement de réseaux à horizon de cinq ans, puis une phase de soutien au déploiement de réseaux très haut débit via deux mécanismes distincts : d'une part, une labellisation et un soutien non subventionnel aux projets des opérateurs privés dans les zones dites « rentables » et, d'autre part, un co-financement de projets portés par des collectivités territoriales dans les zones pour lesquelles aucun opérateur privé n'a manifesté d'intérêt. Ce fléchage des subventions vers les zones « non rentables » n'est pas sans poser des difficultés de mise en oeuvre et sans menacer l'équité territoriale en matière de couverture numérique. Il semble certes pertinent de ne pas investir d'argent public pour la couverture de territoires où des opérateurs privés ont déjà déployé la fibre optique ou sont sur le point de le faire. Cependant, étendre cette restriction à l'ensemble des territoires où les acteurs privés déclarent avoir l'intention d'investir dans les cinq prochaines années, comme l'a décidé le Gouvernement, constitue une prise de risque conséquente. En effet, les opérateurs privés ne seront liés par aucune obligation contractuelle en termes de calendrier et de taux de couverture des zones pour lesquelles ils auront manifesté leur intention d'investissements. Dans le Calvados, le conseil général a inscrit dans son schéma départemental d'aménagement numérique sa volonté de garantir la couverture très haut débit de « l'ensemble du territoire du département ». Des opérateurs privés ont cependant déclaré leur intention de déployer la fibre optique sur l'agglomération de Caen-la-Mer et la ville de Lisieux. Pour bénéficier du soutien de l'État, le conseil général sera donc contraint d'exclure l'agglomération caennaise et la ville de Lisieux du périmètre de la DSP. Cette exclusion n'est pas sans conséquence. Elle risque de créer un décalage entre les zones urbaines, dont la couverture très haut débit dépendra du bon vouloir d'opérateurs privés et pourrait n'être achevée que tardivement, et les zones rurales, où le conseil général garantira une extension rapide du réseau. Si le conseil général décidait au contraire de préserver l'équité territoriale et de ne pas exclure Caen-la-mer et Lisieux du périmètre de la DSP, il devrait alors renoncer à la subvention du Fonds national pour la société numérique et serait confronté à des difficultés de financement majeures. Le strict fléchage des subventions décidé par le Gouvernement risque ainsi d'engendrer une fracture numérique inversée entre les zones sans investissements privés qui bénéficieront de subventions publiques rapidement mobilisables et les zones « rentables » où l'extension du très haut débit restera soumise aux aléas des décisions d'investissements des opérateurs privés, qui ne s'engageront ni sur le périmètre, ni sur le calendrier, ni sur le taux de couverture de ces zones et auront même la possibilité de se rétracter de leurs intentions d'investissements. Il lui demande s'il est disposé à faire évoluer le programme national très haut débit afin de garantir un déploiement équitable du très haut débit sur l'ensemble du territoire et de lutter contre les inégalités d'accès au numérique existantes sans risquer d'inverser la fracture numérique aux dépens des zones urbaines.
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